Des bioingénieurs de l'Université de Zurich ont mis au point un ciseau génétique plus précis qui permet une édition du génome plus efficace et plus fine. Cet outil exploite l'ingénierie des protéines et un modèle d'IA pour rendre une protéine clé, TnpB, beaucoup plus efficiente. Les systèmes d’édition CRISPR-Cas, basés sur des composants protéiques et de l’ARN, ont été développés à l'origine comme mécanisme de défense naturel des bactéries pour repousser les virus intrus. La réingénierie de ces "ciseaux génétiques" a révolutionné l'ingénierie génétique en science et en médecine. Aujourd’hui, la technologie d’édition du génome permet de trouver ou cibler un emplacement spécifique dans notre ADN et de modifier les informations génétiques de manière précise. Par exemple, corriger dans l'ADN une mutation responsable d’une maladie.
Au départ, les protéines Cas ont été exploitées pour leur capacité à couper l'ADN au niveau de séquences spécifiques. Cependant, leur grande taille pose des problèmes lorsqu’il s’agit de les introduire dans les cellules du corps, c’est pourquoi des recherches plus récentes se sont orientées vers l’utilisation de leurs progéniteurs, plus petits, comme nouveaux agents d’édition du génome. C’est le cas de la petite mais puissante protéine TnpB. L’équipe suisse est parvenue à en concevoir une variante qui présente une efficacité de correction de l’ADN 4,4 fois supérieure à celle de Cas.
Les protéines TnpB sont présentes dans toute une variété de bactéries et d’archées (unicellulaires). La TnpB prise en compte dans cette recherche est issue de la bactérie Deinococcus radiodurans. Ce microbe survit au froid, à la déshydratation, au vide et à l’acide, et est l’un des organismes les plus résistants aux radiations. La protéine compacte TnpB a déjà été documentée comme efficace pour l’édition du génome dans les cellules humaines mais présente une capacité de ciblage limitée lors de la liaison à l’ADN. Les chercheurs ont donc optimisé la protéine TnpB de manière à ce qu’elle atteigne plus efficacement le noyau où se trouve l’ADN génomique et cible également des séquences génomiques bien précises. Testée sur plus de 10.000 sites d’ADN cibles différents et avec l’aide de l’intelligence artificielle (IA) la protéine atteint sa cible dans 65 à 75 % des cas.
L’outil TnpB apparait en effet prometteur pour supprimer le défaut génétique qui cause l’hypercholestérolémie familiale - qui affecte environ 31 millions de personnes dans le monde. « Nous avons pu modifier un gène qui régule le taux de cholestérol, réduisant ainsi le taux de cholestérol chez les souris traitées de près de 80 %. L’objectif est de développer des stratégies de modification génétique similaires chez l’Homme afin de traiter les patients souffrant d’hypercholestérolémie.
Nature Methods : https://www.nature.com/articles/s41592-024-02418-z