Les physiciens de la collaboration ALPHA, qui travaillent au Cern, près de Genève, ont franchi une nouvelle étape décisive : après avoir réussi dans un premier temps à produire des atomes d’antihydrogène, puis dans un second temps à les piéger plus de 1000 secondes, ils ont réussi à réaliser une première mesure. «Nous avons prouvé que nous pouvons sonder la structure interne de l’atome d’antihydrogène», explique Jeffrey Hangst, porte-parole de la collaboration internationale, sur le site du Cern. Si un atome d’hydrogène rencontre un atome d’antihydrogène, ils s’annihilent. D’où la difficulté à faire vivre l’antimatière plus que quelques fractions de seconde. Dans le dispositif de l’expérience ALPHA, les chercheurs piègent les antiatomes grâce à des champs magnétiques. Ils ont ajouté des microondes dans le dispositif pour modifier l’orientation de ces atomes d’antihydrogène et les libérer ainsi du piège. Au moment où l’antiatome s’annihile au contact de la matière, il laisse des traces caractéristiques de sa structure dans les détecteurs du piège.
Cette expérience, qui vient d'être publiée dans la revue Nature, n’a pas encore fourni de mesure extrêmement précise, elle avait d’abord pour objectif de démontrer la faisabilité de telles manipulations. L’objectif est de pouvoir comparer le spectre de l’atome d’hydrogène et de l’atome d’antihydrogène. Pour l’hydrogène, ce spectre est déjà connu : il est obtenu en excitant l’atome avec de la lumière. L’électron qui est en orbite autour du noyau passe sur une orbite plus haute avant de revenir à la normale. En mesurant toutes les fréquences lumineuses émises par l’atome on obtient un spectre caractéristique. Le Graal des physiciens d’ALPHA est de mesurer le spectre de l’atome d’antihydrogène !
Il sera alors peut-être possible de répondre à la question fondamentale qui sous-tend tous ces efforts : pourquoi la matière l’a emporté sur l’antimatière, alors qu’elles ont existé en quantités égales au moment du Big Bang.