RTFlash

Edito : Vers une télévision ubiquitaire planétaire

Aux Etats Unis, les chaînes de télévision locales et nationales américaines se sont massivement engagées dans la vente de leurs programmes et séries très populaires sur le Net. Les réseaux nationaux vendent de plus en plus souvent en ligne les émissions les plus populaires. Des séries comme "Lost" et "New York District" sont maintenant disponibles sur Internet pour 1,60 euro par épisode dès le lendemain de leur première diffusion.

En France, après Free et sa nouvelle Freebox HD, France Télécom vient d'annoncer la diffusion des premiers programmes TV en haute définition sur ADSL. L'offre de contenu est encore maigre, mais déjà monnayée : ainsi, l'option HD qui sera proposée sur MaLigne TV (offre de TV sur ADSL de France Télécom) sera facturée jusqu'à 5 ?/mois en plus du forfait TV. Seul problème, mais de taille, MaLigne TV HD ne sera pas accessible à tous. Pour y prétendre, il faut habiter à moins de 1 km d'un central téléphonique France Télécom, « ce qui correspond à 25 % des lignes éligibles à l'ADSL, soit 2 millions de lignes », précise Jérôme Soulet, de la division Contenus de l'opérateur. Les flux HD nécessitent en effet, selon France Télécom, un débit de 10 à 12 Mbit/s qui ne peut souffrir une distance trop importante avec le central téléphonique.

Alors que France Télécom annonçait ses premiers programmes TVHD sur ADSL, l'Institut National de l'Audiovisuel ouvrait enfin ses fabuleuses archives au grand public grâce au Web. Au total, 8.000 heures gratuites d'archives radiophoniques et télévisuelles, disponibles sur le site de l'Ina. Il suffit de cliquer sur ina.fr. Une page apparaît qui ressemble au sommaire d'un magazine, avec ses fenêtres : "Archive du jour", "Rendez-vous", des noms de dossiers, comme "Mai 68" ou "Serge Gainsbourg". Sur le côté, les différentes possibilités : explorer, découvrir, partager, télécharger.

L'accès à ces archives sera majoritairement gratuit : le visionnage de ce site extraordinaire qui réunit donc en une malle magique des feuilletons, des séries, des journaux télévisés, des dramatiques, des grands débats, des émissions de reportages, des magazines culturels, du sport et des variétés, et tout autant en radio, est en effet à 80 % gratuit. Le site proposera diverses possibilités de recherche : par mot-clé, par grandes thématiques ou genres de programmes, ou via une sélection aléatoire.

Pour la partie payante (20 % de l'offre), c'est-à-dire les programmes considérés comme des oeuvres et pour lesquels il faut reverser de l'argent aux ayants droit, les internautes pourront visionner les premières minutes d'un document avant de décider s'ils souhaitent le louer ou l'acheter par téléchargement, avec des prix allant de 1 à 3 euros pour la location et de 1 à 12 euros pour l'achat. Du côté des usages, la demande éducative est très forte et, d'ici septembre, le site proposera en effet des archives télé classées en fonction du programme scolaire, de la sixième à la terminale.

L'Agence de l'Innovation Industrielle (AII) a dévoilé pour sa part, il y a quelques jours, son projet " Télévision Mobile Sans Limite" (TMSL), avec comme chef de file Alcatel. Ce projet sur 4 ans prévu pour coûter 98 millions d'euros (dont 38 millions d'aide) vise à rendre la TV mobile accessible partout sur un mobile ou un PDA, quelles que soient les contraintes géographiques, avec une bonne qualité de réception en extérieur comme en intérieur, et sans la contrainte d'un nombre d'utilisateurs limité (comme pour la TV mobile par réseau 3G).

Sur la plan technologique, grâce au futur système hybride de diffusion, combinant habilement satellite et relais hertziens, et à l'arrivée de micro-disques durs de plusieurs dizaines de Go de capacité, la prochaine génération de mobiles et de PDA, va, d'ici 2008, intégrer complètement la vidéo et la télévision, téléchargeables ou consultables en continu (par "streaming").

On voit donc se mettre en place un nouveau paysage audiovisuel dans lequel la télévision sera, d'une part, totalement intégrée au Web, avec toutes les fonctionnalités et applications nouvelles qui s'y rattachent et, d'autre part, nous sera proposée en mobilité de manière personnalisée et automatiquement formatée au type de terminal numérique que nous utilisons. Nous pourrons ainsi commencer à regarder notre journal télévisé personnalisé (composé sur le Net grâce aux flux RSS vidéo) sur notre écran domestique puis, lorsque nous quitterons notre domicile pour aller au travail, ce journal, ainsi d'ailleurs que nos mails et vidéos préférés, basculeront automatiquement sur notre mobile ou notre PDA, puis sur l'écran de notre voiture et enfin sur l'ordinateur de notre bureau.

On voit bien que dans un tel contexte techno-économique, les chaînes de télévision "généralistes", telles que nous les connaissons aujourd'hui, sont appelées à une disparition inéluctable. Les chaînes et réseaux de télévision seront, pour la plupart, purement et simplement intégrés à des grands portails d'informations qui fourniront des contenus multi-supports en flux et en stock sur tous les terminaux et appareils numériques que nous utiliserons mais aussi, et de plus en plus, sur tous les objets, murs ou surfaces qui composent notre environnement et qui deviendront très vite, grâce aux nanotechnologies, autant d'écrans virtuels pouvant diffuser en permanence des images de nature utilitaires, commerciales ou distractives qui pourront être dirigées de manière totalement personnalisées vers un individu (Voir article sur le neuromarketing dans notre rubrique « information&Communication »).

Dans ce monde qui va devenir, d'ici 10 ans, un immense téléviseur virtuel, l'image deviendra une dimension essentielle de notre réalité personnelle et professionnelle et nous devrons apprendre à la filtrer, à en décoder le sens... et à savoir nous en passer, sous peine de nous noyer dans ce déferlement permanent d'images et de devenir pathologiquement dépendants de cette nouvelle dimension virtuelle ubiquitaire.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

Noter cet article :

 

Recommander cet article :

back-to-top