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Des vaisseaux sanguins créés à partir de cellules humaines !
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Au cinquième étage d’un bâtiment de l’université de Bordeaux (Gironde), dans la salle de biofabrication du laboratoire BioTis, un objet détonne : une sorte de métier à tisser circulaire. Marie Hourques, assistante ingénieure, fait s’entrecroiser les fils qui s’enroulent autour d’une tige métallique et finissent pas former un petit tuyau. Il lui faut quatre jours pour en fabriquer un de quatre ou cinq centimètres de long. Ce travail artisanal est unique au monde ! Le laboratoire de bio-ingénierie tissulaire BioTis (Inserm-université de Bordeaux) est en effet le seul à mener des recherches sur la production de textiles biologiques humains. Son principal objectif : mettre au point des vaisseaux sanguins.
Concrètement, l’équipe dirigée par Nicolas L’Heureux récupère des cellules de peau dans des déchets chirurgicaux issus, par exemple, de réduction mammaire. « Ensuite, on les cultive, on les fait proliférer et on leur demande de faire tout le travail, c’est-à-dire de produire de la matrice extracellulaire » (un échafaudage de molécules entourant les cellules), explique-t-il. Ce matériau va peu à peu se déposer dans des flasques sous forme de feuillets. Ces derniers, cultivés pendant cinq à vingt-quatre semaines, sont débarrassés de leurs cellules et essentiellement constitués de collagène. Or cette protéine, souvent définie comme "l’échafaudage de notre peau", a un gros avantage : elle ne varie pas d’une personne à l’autre. « L’organisme ne la considère pas comme un corps étranger », ajoute Nicolas L’Heureux. Alors que les prothèses d’artères actuelles, en plastique ou d’origine animale, peuvent provoquer un rejet, « c’est un biomatériau que l’on peut utiliser à toutes les sauces ! »
Stockés à -80°C dans de grands congélateurs, les feuillets sont découpés en fil, puis tissés et tricotés ou tressés selon les besoins. Les fils biologiques servent à fabriquer des vaisseaux robustes et souples à la fois, étanches, résistants aux infections. Les personnes atteintes d’insuffisance rénale, dont les veines et artères sont abîmées par de multiples dialyses, pourraient bien être les premières à en bénéficier. Ces travaux devraient aussi profiter aux victimes d’infarctus : les vaisseaux biologiques semblent beaucoup moins s’encrasser que les artères greffées aujourd’hui lors d’un pontage.
Dans le domaine cardiovasculaire, les chercheurs bordelais utilisent aussi les feuillets de collagène pour reconstruire une valve pulmonaire chez des enfants atteints de la tétralogie de Fallot. Dans cette malformation congénitale, la voie de sortie du sang depuis le ventricule droit du cœur vers l’artère pulmonaire est rétrécie, ce qui empêche un écoulement normal vers les poumons et diminue le taux d’oxygène sanguin. Les reconstructions actuelles, à base de téflon ou de tissu animal, ont deux inconvénients majeurs : le risque de rejet, mais aussi le fait que « les valves ne grandissent pas avec l’enfant, qui doit donc être réopéré », explique Fabien Kawecki, chercheur Inserm. Les tissus humains auraient, eux, la possibilité de croître avec le jeune patient.
Une étude parue en juillet dernier dans Science Translational Medicine a montré que le feuillet de collagène implanté sur un modèle de cœur organo-synthétique, une réplique fonctionnelle de l’organe humain, avait permis de « rétablir la circulation du sang sans générer de fuite valvulaire. De plus, après sept jours d’implantation dans une brebis, nous avons constaté sur notre valve la présence de cellules musculaires lisses, qui joueront un rôle important dans son remodelage et sa croissance », précise Fabien Kawecki. Reste à présent à vérifier l’application de ces vaisseaux de synthèse sur l'homme.
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