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Edito : Les vaccins, plus que jamais indispensables pour améliorer la santé mondiale !
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Chaque année, comme le rappelle inlassablement l’OMS, la vaccination permet d'éviter environ 2 à 3 millions de décès dus à la diphtérie, au tétanos, à la coqueluche et à la rougeole, maladies mortelles qui affectent particulièrement les enfants. Pour la seule rougeole, on estime que la vaccination a permis d’éviter depuis 1963 au moins 110 millions de décès dans le monde, soit autant de vies épargnées que le nombre de victimes des quatre conflits les plus meurtriers du siècle dernier, première et seconde guerres mondiales, guerre civile russe er guerre de Corée...
Une autre étude de l’Organisation Mondiale de la Santé montre qu’entre 2001 et 2020, les vaccins contre l’hépatite B, le papillomavirus, la rougeole, la fièvre jaune, le rotavirus, la rubéole, l’encéphalite japonaise et trois souches bactériennes qui causent la pneumonie et la méningite auront sauvé 20 millions de vies dans 73 pays pauvres, (Voir OMS). Selon cette étude, le programme « Gavi, l’Alliance du Vaccin », lancé en 2000 afin de vacciner les enfants des pays les plus démunis de la planète, a permis de protéger près de 600 millions d’enfants.
Cette étude a également montré, qu'outre les nombreuses vies sauvées, ces vaccins auront permis, d’ici 2020, de réaliser plus de cinq milliards de dollars d'économie sur les traitements des patients, sachant que ce sont les vaccins contre les bactéries qui sont la cause de la pneumonie et de la méningite, qui permettent de réaliser le plus d'économies. En tout, plus de 820 milliards de dollars d’économies auront été réalisées dans les 73 pays étudiés, une économie évidemment vitale pour les systèmes de santé de ces états, disposant de moyens très limités, sans comparaison avec ceux des pays développés.
Chaque année, pour le plus grand bénéfice de la santé mondiale, à commencer par les pays à faibles revenus, où le rapport coût-efficacité de la vaccination est bien supérieur à n’importe quel autre traitement, de nouveaux vaccins apparaissent et permettent de prévenir avec une efficacité croissante de plus en plus de maladies infectieuses, d’origine virale ou bactérienne. Parmi les nouveaux vaccins apparus au cours de ces dernières années, on trouve le vaccin contre les papillomavirus humains (HPV), responsables de huit localisations de cancers : le col de l’utérus, l’anus, l’oropharynx, la vulve, le vagin, la cavité orale, le larynx et le pénis.
En 2018, 570 000 nouveaux cas de cancers du col de l’utérus ont été diagnostiqués dans le monde. A l’origine de la plupart de ces cancers, des virus appelés papillomavirus humains (HPV), qui se transmettent au cours de rapports sexuels. Une vaste étude parue dans le Lancet vient de montrer que ce vaccin diminue les risques d’infections génitales et anales ainsi que de lésions précancéreuses chez les jeunes femmes (Voir étude The Lancet).
D’après les experts, il existerait plus de 100 souches de HPV et chaque personne pourrait se retrouver infectée de manière provisoire au moins une fois dans sa vie. Heureusement, seules quelques-unes de ces souches peuvent provoquer des verrues ou des cancers.
La vaste étude réalisée par des chercheurs canadiens, américains, australiens et européens a porté sur l’analyse des données concernant 66 millions de personnes de moins de 30 ans vivant dans 14 pays riches où le vaccin contre le papillomavirus est arrivé aux alentours de 2007. Aussi, parmi elles, la plupart avaient reçu des vaccins plus anciens et donc moins performants qui les protégeaient contre deux souches de HPV seulement. Pourtant, les scientifiques ont pu observer que dans les pays où le vaccin était administré depuis plus de cinq ans, les deux souches de papillomavirus à l’origine de 70 % des cancers, HPV 16 et 18, avaient diminué de 83% chez les adolescentes et de 66% chez les femmes âgées de 20 à 24 ans. Quant aux lésions précancéreuses du col de l’utérus, elles avaient diminué de 51% chez les adolescentes et de 31% chez les jeunes femmes.
A l’heure actuelle, l’OMS recommande à toutes les filles de 9 à 14 ans de se faire vacciner mais certains pays le proposent aux deux sexes. L’étude souligne que ce sont dans les régions ou le taux de vaccination contre le HPV est le plus important, qu’on observe le moins d’infections aux HPV. En France, les papillomavirus humains sont à l’origine de 6 300 cancers chaque année. Outre les cancers du col de l’utérus (2 900 nouveaux cas chaque année), les lésions précancéreuses (30 000) qui peuvent induire un risque accru d’accouchement prématuré ou de fausse couche et les verrues génitales (100 000), les HPV sont responsables de cancers du vagin, de la vulve, du pénis, de l’anus et de cancers ORL comme les tumeurs au pharynx.
Depuis 2018, un nouveau vaccin contre les papillomavirus (HPV), virus sexuellement transmissibles qui causent certains cancers, est désormais disponible sur le marché, le Gardasil 9. Ce vaccin, fabriqué par le laboratoire MSD, protège contre neuf souches du virus, soit cinq de plus que le vaccin initial. "On passe de 70 % des HPV couverts par la vaccination à 90 %", explique le docteur Alexandra Leary, cancérologue à Gustave-Roussy à Villejuif (Val-de-Marne).
En circulation depuis 2006, le vaccin contre le papillomavirus n'a toutefois pas atteint sa cible en France, où la couverture vaccinale chez les filles est jugée insuffisante, à moins de 20 %, alors que l'objectif fixé par le Plan cancer 2014-2019 est de 60 %. La vaccination est recommandée depuis 2012 pour toutes les filles entre 11 et 14 ans (avec rattrapage éventuel entre 15 et 19 ans), mais pas pour les garçons. Face à cette couverture vaccinale qui reste trop faible, un collectif réunissant cinquante sociétés savantes a appelé à une plus grande mobilisation des pouvoirs publics en faveur de la vaccination contre les HPV. La communauté scientifique plaide pour une la vaccination universelle et remboursée, sans distinction de sexe ou de risque, pour protéger filles et garçons, réduire les inégalités et participer, avec les autres pays, à l’élimination des cancers HPV induits.
En Grande-Bretagne, où la confiance vis-à-vis des vaccins est beaucoup plus forte qu’en France, tous les garçons de 12 et 13 ans seront vaccinés contre le papillomavirus humain (HPV) à partir de septembre prochain. Actuellement, seules les filles reçoivent le vaccin afin de les protéger contre le cancer du col de l'utérus. Mais le vaccin anti HPV protège également contre les cancers du pénis, de l'anus et des organes génitaux, ainsi que contre certains cancers de la tête et du cou. C'est pourquoi les autorités sanitaires britanniques ont décidé de l'étendre aux garçons.
"Offrir le vaccin aux garçons non seulement les protégera mais empêchera également davantage de cas de cancers liés au HPV chez les filles et réduira le fardeau global de ces cancers chez les hommes et les femmes à l'avenir", a déclaré Mary Ramsay, de Public Health England. Les autorités sanitaires britanniques estiment que la vaccination des garçons pourrait prévenir plus de 100 000 cancers au Royaume-Uni d'ici à 2058. Une étude récente publiée en février dernier a montré que la généralisation de la vaccination et du dépistage du cancer du col pourrait, à terme, quasiment éradiquer cette forme de cancer. Le nombre moyen de cancers du col de l'utérus pourrait en effet passer sous la barre des quatre cas pour 100 000 femmes (Voir étude The Lancet).
S’agissant du nouveau schéma de vaccination décidé en France par le Gouvernement, il est important de rappeler que l’Agence du médicament (ANSM) a montré, dans un rapport publié fin juin, que le passage de 3 à 11 vaccins obligatoires chez les enfants de moins de 2 ans n’a pas entraîné d’augmentation des effets indésirables, ni l’apparition de nouveaux effets non répertoriés (Voir ANSM).
Ce rapport, où sont recensés les "événements indésirables" liés à la vaccination des bébés depuis 2012, permet de tirer un bilan très rassurant de ce nouveau schéma de vaccination. En effet, le passage de 8 vaccins recommandés à obligatoires (haemophilus influenzae B, coqueluche, hépatite B, rougeole, oreillons, rubéole, méningocoque C et pneumocoque) avait suscité de vives inquiétudes, notamment en ce qui concernait le risque d’effets indésirables.
"Le but de ce rapport était de savoir s’il y avait un signal de pharmacovigilance qui pouvait ressortir de ce bilan : de nouveaux effets indésirables qui n'étaient pas connus ou dont la fréquence augmentait », souligne Alban Dhanani, directeur adjoint de la division de l'ANSM chargé notamment des vaccins. Ce rapport, très précis et complet montre qu’aucune hausse des effets indésirables ni d’apparition de nouveaux effets non répertoriés n’a été constatée par l’ANSM après le passage à 11 vaccins obligatoires. Dans ce travail rigoureux, les scientifiques ont d’abord établi un bilan de la période 2012-2017, puis des six premiers mois de l’année 2018, après l’extension vaccinale.
Durant cette première période, 962 effets indésirables ont été recensés, soit en moyenne 160 par an pour près de 38 millions de doses de vaccins administrées. La moitié de ces déclarations ont été classées comme "graves", car nécessitant généralement une hospitalisation. Les cas les plus fréquemment déclarés ont été des fièvres, des affections cutanées, des convulsions et une diminution du tonus musculaire. "Sur l'ensemble de la période, 23 décès ont été notifiés, parmi lesquels près de la moitié sont survenus chez des enfants souffrant de lourds antécédents ou d'affections sévères pouvant expliquer l'issue fatale", détaille l'ANSM.
Autre avancée importante sur le front des vaccins, celle réalisée par des chercheurs américains qui ont montré qu’après une greffe autologue de cellules-souches hématopoïétiques, les patients immunodéprimés, particulièrement à risque de développer des infections, pouvaient être protégés à l’aide d’un nouveau vaccin adjuvant recombinant inerte qui permettait de prévenir efficacement la survenue d'un zona (Voir étude JAMA Network).
Contrairement au vaccin vivant atténué, ce nouveau vaccin, qui devrait bientôt être disponible en France, convient aux patients immunodéprimés. Cet essai de phase III a été conduit dans 167 centres de 28 pays entre juillet 2012 et février 2017. Au total, 1 846 patients adultes ayant eu une greffe autologue de cellules-souches hématopoïétiques ont été inclus et randomisés en deux groupes : 922 patients ont reçu deux doses du vaccin quelques mois après la transplantation et 924 un placebo en deux fois également.
Au cours du suivi de 21 mois, au moins un épisode de zona a été confirmé chez 49 patients vaccinés et 135 patients du groupe placebo (différence significative). L'efficacité vaccinale constatée a été de 68,2 %. Le vaccin a également entraîné une réduction de l'incidence des névralgies post-herpétiques et des autres complications liées au zona et des hospitalisations. « Cet essai est important car il montre que le vaccin fonctionne chez les patients sévèrement immunodéprimés », indique Keith Sullivan, co-auteur de l'étude. « Cela suggère qu'il pourrait également être utile chez d'autres patients dont le système immunitaire est affaibli, comme les patients VIH, atteints de cancer du sein et d'affections auto-immunes ». Le vaccin a également entraîné une réduction de l'incidence des névralgies post-herpétiques et des autres complications liées au zona et des hospitalisations.
Autre remarquable percée scientifique, celle réalisée par des chercheurs australiens qui ont fait appel à l'intelligence artificielle pour doper l’efficacité du vaccin antigrippal. Leur vaccin, mis au point par une IA, va prochainement entrer en phase d’essai clinique aux États-Unis, sur 371 personnes de 18 à 64 ans, après deux ans de recherche. Les chercheurs affirment que l'efficacité du vaccin pourrait atteindre 80 à 90 %, contre 20 à 50 % en moyenne pour les vaccins classiques (Voir Flinders University).
« L’adjuvant que nous avons identifié grâce à notre outil d’IA cible un récepteur particulier qui stimule le système immunitaire lorsqu'il est en contact avec le virus de la grippe », précise le Professeur Nikolai Petrovsky qui dirige ces recherches. Pendant deux ans, les chercheurs ont appris à leur IA à reconnaître et différencier les vaccins qui avaient fonctionné de ceux qui avaient échoué à prévenir la grippe. À partir de ces informations, un autre programme a conçu des milliards de composés imaginaires qu’il a ensuite analysés pour identifier les 10 composés les plus efficaces.
Sur le front du paludisme, après plusieurs décennies de recherches, un vaccin antipaludéen est en cours d’essai à grande échelle au Ghana depuis avril 2019. Les premiers vaccins ont été administrés à Cape Coast, à environ 150 km à l'Ouest de la capitale ghanéenne, Accra. Les enfants âgés de six à 24 mois seront les premiers bénéficiaires de cette initiative lancée par le ministère de la Santé du Ghana et l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Au seul Ghana, 5,5 millions de cas de paludisme ont été confirmés en 2018 et, selon l'OMS, le paludisme a tué 435.000 personnes en 2017 dans le monde. Le nombre de cas de contamination est passé à 219 millions en 2017, soit deux millions de plus qu'en 2016. Ce vaccin, le RTS, S, qui devrait également être développé au Kenya dans les prochaines semaines, a passé avec succès de nombreux essais scientifiques, qui l'ont révélé sans danger et permettant de réduire le risque de paludisme de près de 40 %.
Enfin, pour terminer ce trop rapide tour d’horizon concernant les multiples avancées dans le domaine des vaccins, évoquons l’annonce faite il y a quelques semaines par la société pharmaceutique américaine Johnson & Johnson. Cette firme a en effet révélé qu’elle allait lancer les essais cliniques d’un nouveau vaccin contre le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) en Europe et aux États-Unis dans le courant de cette année.
Dans le cadre de ce vaste essai, ce sont 3 800 hommes des deux continents qui recevront six doses du vaccin. Celui-ci consiste en un cocktail préventif ciblant plusieurs souches du virus HIV. Johnson & Johnson espère pouvoir présenter les résultats de ses tests dans 5 ans. En outre, la société a débuté en 2017 une autre série d’essais cliniques avec une autre version de ce vaccin en Afrique. Près de 2 600 femmes de cinq pays d’Afrique australe ont déjà été vaccinées dans le cadre de cette expérience, appelée Imbokodo. « Ainsi, on a une étude chez des femmes à risque et une autre sur le point de commencer chez les hommes. On pourra ainsi regrouper les essais en une seule soumission globale pour les régulateurs, » explique Mitchell Warren, qui dirige l’AVAC, une organisation de prévention contre le VIH.
Pour le moment, ce vaccin expérimental a assuré une protection aux deux tiers des animaux auxquels il a été administré, et n’a pas semblé présenter de danger pour les humains. Rappelons que l’Organisation Mondiale pour la Santé s’est fixé pour objectif d’éradiquer totalement le Sida d’ici 2030. Ce vaccin prometteur pourrait contribuer à atteindre ce but et représente évidemment un immense espoir au niveau mondial, surtout quand on sait qu’il y aurait 38 millions de personnes séropositives dans le monde et que 770 000 personnes sont malheureusement encore décédées de maladies liées au virus du sida en 2018, selon le rapport d’Onusida dévoilé il y a quelques jours.
Notre pays, fort de ses compétences scientifiques mondialement reconnues dans le domaine des vaccins, doit absolument poursuivre ses efforts de recherche et de développement, tant au niveau fondamental qu’industriel, pour rester demain à la pointe mondiale dans ce domaine stratégique des vaccins, qu'ils soient préventifs ou thérapeutiques, car la vaccination restera plus que jamais au cœur des grandes avancées médicales et des politiques de santé publiques, qui reposeront à la fois sur la prévention et sur la généralisation de la médecine personnalisée, avec probablement, à terme, la conception de vaccins « sur mesure » qui seront parfaitement adaptés à la singularité immunitaire de chacun.
René TRÉGOUËT
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
e-mail : tregouet@gmail.com
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