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A la traque des particules d'énergies ultimes

Après une dizaine d'années d'intense activité, l'Observatoire Pierre Auger, dont la construction est en cours en Argentine, est d'ores et déjà le plus grand détecteur de rayons cosmiques du monde, par la taille et la précision des mesures. Fruit d'une collaboration internationale engagée en 1992, ce détecteur devrait permettre de résoudre l'une des grandes énigmes de l'astrophysique moderne : l'origine des rayons cosmiques d'énergies extrêmes. Les rayons cosmiques sont des particules subatomiques (protons ou noyaux atomiques) produites au cours de phénomènes astrophysiques violents, comme l'explosion de supernovae ou l'absorption brutale d'étoiles par des trous noirs de plusieurs millions de masses solaires, et dont certaines atteignent la Terre après un voyage de plusieurs dizaines de millions d'années-lumière. L'analyse de ces rayons cosmiques constitue donc l'un des moyens permettant d'étudier ces phénomènes qui leur ont donné naissance et, éventuellement, de remonter aux origines de notre Univers. Au cours des dernières décennies, une vingtaine de rayons cosmiques dont les énergies atteignaient ou dépassaient 1020 électron-volts (2) (100 milliards de milliards d'électron-volts, c'est-à-dire plusieurs dizaines de joules !) a été observée par une demi-douzaine de détecteurs. Or, une telle énergie, équivalente à celle d'une balle de fusil, est une énergie macroscopique exceptionnelle pour une particule microscopique. En effet, les énergies les plus élevées qu'il est possible d'atteindre avec les accélérateurs les plus puissants du monde sont cent millions de fois plus faibles. Alors, d'où viennent ces rayons cosmiques d'ultra haute énergie ? C'est aujourd'hui un mystère car aucun mécanisme astrophysique connu n'est capable d'accélérer des particules à de telles énergies. En outre, le fond diffus cosmologique faisant écran à leur propagation, ces particules de très haute énergie ne peuvent arriver jusqu'à nos détecteurs que si elles ont été émises depuis des sites situés au voisinage de notre galaxie où aucune source possible n'a été détectée par les astronomes ! C'est pour tenter de résoudre ces énigmes que la construction d'un immense observatoire de rayons cosmiques d'énergies extrêmes a été lancée en 1992. Avec plus d'une centaine de stations détectrices installées et opérationnelles sur une surface de plus de 100 km2, l'Observatoire Pierre Auger, en cours de construction dans la Pampa argentine, est devenu depuis octobre le plus grand réseau de détecteurs de rayons cosmiques au monde. Construit avec la participation de 14 pays, dont la France qui occupe une place importante, l'Observatoire Auger devrait atteindre sa taille définitive d'ici 2005, avec 1600 stations en réseau réparties sur une superficie de 3000 km2 et un ensemble de 24 télescopes à fluorescence observant le ciel au-dessus de ce site. En interagissant avec l'atmosphère, tout rayon cosmique déclenche une cascade de réactions successives appelée "gerbe atmosphérique" qui peut conduire à la production, au niveau du sol, de plusieurs centaines de milliards de particules. Ce sont ces particules dites " secondaires " que détecte l'Observatoire Auger, et qui permettent ensuite de remonter aux propriétés du rayon cosmique primaire, de l'identifier, et de mesurer son énergie et sa direction de provenance. Au-delà de sa superficie, nécessaire en raison de l'extrême rareté des rayons cosmiques d'énergies extrêmes, l'Observatoire Auger est également le seul détecteur au monde pouvant fonctionner en mode "hybride", c'est-à-dire observer les gerbes atmosphériques créées par les rayons cosmiques à l'aide de deux techniques de détection indépendantes : un réseau de détecteurs de particules et des télescopes à fluorescence. Cette particularité lui permettra non seulement d'observer en un an plus d'événements que l'ensemble des détecteurs ayant opéré de par le monde au cours des 40 dernières années, mais de le faire avec une qualité et une précision sans précédent. La France participe à ce projet, par le biais du CNRS, depuis ses débuts en 1992 avec un petit nombre de pays dont les États-Unis et la Grande-Bretagne. L'étroite collaboration entre les groupes français participant à ce projet et certaines PME de haute technologie a également permis un retour de l'investissement français en contrats industriels. Ainsi, un petit nombre d'entreprises, telles que Photonis (Brive-la-Gaillarde) ou LST Electronique (Aurec-sur-Loire), a signé avec la Collaboration Auger des contrats qui représentent plus de deux fois les sommes investies dans le projet par le CNRS.

CNRS Infos : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/333.htm?

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