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Stocker les données dans de l'encre de couleur
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En 2010, le monde produisait deux zettaoctets de données numériques, soit l'équivalent de deux milliards de téraoctets. En 2020, il en produisait 47 zettaoctet et, selon Statista, le volume mondial de données devrait dépasser les 2 000 zettaoctets en 2035. Les data centers qui hébergent cette quantité phénoménale de données consomment plus de 200 TWh par an, soit 40 % de la consommation électrique totale de la France. Face à ce défi que représente l'explosion des données à conserver, une équipe de chercheurs de l'Université de Harvard a inventé un système révolutionnaire pour stocker des données numériques (texte, images, vidéos...) grâce à des molécules stockées dans de l'encre de couleur qui est ensuite imprimée sous forme de motif.
Le système utilise un mélange de sept colorants fluorescents disponibles dans le commerce. Chaque nombre, lettre et pixel des données que l'on veut stocker est codé sous forme binaire avec des 1 et des 0, selon qu'un colorant particulier est absent ou présent. À l'écriture, les molécules de colorant sont projetées par une imprimante jet d'encre sur une surface époxy contenant certains groupes amines réactifs. Une fois déposées à la surface, les molécules forment des liaisons stables, ce qui verrouille l'information en place. Pour « lire » les données, on utilise un microscope fluorescent qui détecte la présence ou l'absence de molécules de colorant, et peut donc décrypter le message binaire (les 0 et 1). Les chercheurs ont ainsi pu stocker 1.407.542 octets d'informations sur un substrat époxy de 7,2 x 7,2 millimètres avec une précision de 99,6 % et une vitesse de 469 bits par seconde. Mieux encore, ils ont pu lire les données fluorescentes 1.000 fois sans pertes significatives.
« Cette méthode donne accès à un stockage de données à faible coût », se réjouit Amit Nagarkar, auteur principal de l'article publié dans ACS Central Science. « Elle ne requiert que des technologies commerciales existantes - l'impression à jet d'encre et la microscopie à fluorescence ». Ce stockage par colorant pourrait être particulièrement utile pour les informations sensibles (puisqu'il est inviolable), comme les dossiers financiers et juridiques, ou lorsque le stockage à long terme est crucial, comme pour les données satellitaires. De plus, la technique ne nécessite aucune énergie une fois les données enregistrées, et n'est pas sensible à l'eau comme une bande magnétique par exemple.
En 2016, des chercheurs du CNRS avaient déjà réussi à stocker des données dans des polymères artificiels, représentant des 0 et des 1. Mais le processus est beaucoup plus laborieux, car il faut synthétiser les monomères et l'impression est très lente. En 2019, une autre équipe de l'Université de Harvard était parvenue à stocker des données numériques sur des petites molécules organiques (un ensemble de 12 oligopeptides). Cette dernière se fondait sur la masse de chaque molécule pour coder et décoder l'information. La nouvelle méthode à base de colorants est plus rapide à mettre en œuvre en lecture que toute autre méthode, fait valoir l'équipe d'Amit Nagarkar.
« Les méthodes de stockage de données alternatives comme celle à base de colorants vont donc prendre de plus en plus d'importance au cours du XXIe siècle », conclut Amit Nagarkar.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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