Edito : Sachons garder la tête froide
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L'Histoire de l'Humanité et plus particulièrement celle de l'Occident est rythmée par trois à cinq dates qui, chaque siècle, changent son cours. Sans aucun doute, le 11 septembre 2001 fera, malheureusement, partie de cette courte liste. Pourquoi ? Parce que, par les attentats de New York et Washington, en s'attaquant aux symboles économiques et militaires qu'étaient le World Trade Center et le Pentagone, une organisation déterminée vient de déchirer l'image, encore un peu artisanale, que se faisaient du terrorisme les peuples civilisés de notre Terre. En tuant en quelques minutes plus de civils à New York et à Washington qu'une armée n'avait pu le faire, avec des militaires, quelque 60 ans plus tôt à Pearl Harbour, cette organisation terroriste fanatique a sonné un coup de gong qui nous a brutalement réveillés d'un songe béat dans lequel nous nous étions lâchement abandonnés depuis le 9 novembre 1989, jour de la chute du mur de Berlin. Depuis deux millénaires, nous avions acquis la certitude que le plus grand malheur qui pouvait arriver à nos sociétés ne pouvait l'être que par la déclaration de guerre d'un état contre un autre ou d'une partie de la terre contre l'autre, comme nous avons encore su le faire malheureusement le siècle dernier. Il n'en sera plus rien. Nous savons, dorénavant, que le plus grand des malheurs, dans la vie de nos Démocraties, ne nous viendra plus par l'attaque d'une armée mais par des organisations terroristes qui n'ont pas de la mort la même approche que nous. Nous ne pouvons qu'être glacés d'effroi quand nous imaginons l'usage que pourraient faire d'une arme atomique tactique miniaturisée ou d'une arme bactériologique ces kamikazes fanatiques... Ces prochaines heures, ces prochains jours, ces prochains mois, ces prochaines années, vont être déterminants pour l'avenir de notre Civilisation. Soit nous savons avec calme et intelligence dominer la situation et notre civilisation occidentale conservera son leadership mondial, soit nous dégainons comme un cow-boy blessé et alors nous paierons très cher ce manque de sang-froid. Certains éditoriaux publiés dans la grande presse mondiale depuis mardi dernier, dont certains débutent par cette terrible phrase : « La troisième guerre mondiale a commencé mardi 11 septembre... » peuvent laisser croire que nous allons entrer dans une voie de réplique aveugle. J'espère de tout coeur qu'il n'en sera rien. En effet, si nous agissions ainsi, nous donnerions raison aux fous qui ont commandité ces attentats barbares et nous ferions se lever dans le monde des milliers de fanatiques qui seraient prêts à donner leur vie. N'oublions jamais que ces terroristes, en tuant par milliers des civils habitant New York ou Washington, n'ont fait que d' « innocentes victimes » alors que chaque balle, chaque missile tiré par une arme occidentale ne pourra faire surgir que des « martyrs ». Sans bruit, sans spectacle, sans caméra, nos sociétés civilisées doivent, après une profonde analyse de la situation, lancer des commandos efficaces et déterminés, qui iront systématiquement éliminer tous ceux qui ont commandité, organisé cette tuerie sans nom. Cela certes sera moins spectaculaire que des Tomawaks médiatisés qui frapperont des bâtiments officiels mais ô combien plus efficace. Il faut que nous ayons bien conscience, dans ce siècle de l'image, que la plus terrible crainte que peuvent ressentir ces terroristes fanatiques n'est pas de mourir, ils nous l'ont montré, mais c'est surtout qu'il n'y ait pas de caméra de télévision pour saisir leur méfait ou leur mort... Mais cela n'est pas suffisant. Sachant, dorénavant, qu'il sera toujours possible à d'autres fanatiques de se lever, il nous faut organiser autrement nos Démocraties. Le fonctionnement pyramidal de ces dernières, qui veut que l'information ne soit destinée qu'au supérieur et que seul celui-ci puisse décider de l'action, fait que nos sociétés ne sont pas armées pour entendre le faible signal émis par un petit groupe d'hommes déterminés à tuer. Il est encore trop tôt pour répondre à cette question fondamentale du renseignement et de la sécurité sur le territoire américain. Les Etats-Unis dépensent chaque année des milliards de dollars pour le renseignement. Ils ont même, avec des organisations comme le NSA et des dispositifs comme le système d'écoute Echelon utilisés avec une haute intensité, toutes les technologies les plus récentes. Et pourtant des dizaines d'hommes déterminés, pendant plusieurs semaines, ont organisé des repérages, fait des essais, étudié le moindre détail d'un process complexe et l'ont mené à bien sans être repérés, localisés, neutralisés par les services de renseignements du pays le plus puissant du monde. Il y a là quelque chose d'incompréhensible que la raison ne peut pas comprendre. Si les services secrets étaient tenus à une totale transparence, ce qui devrait être une obligation dans toute démocratie, après un tel « loupé » nous devrions apprendre dans quelques jours ou dans quelques semaines que ces terroristes avaient bien été repérés par un pauvre bougre de la base mais que son « renseignement » n'avait encore pu être pris en compte, par manque de moyens diront certains, par manque de compétences répliqueront d'autres. Je dirai, moi, par manque d'organisation. Il faut donc que nous revoyions en profondeur le fonctionnement de nos sociétés démocratiques. Actuellement, le cri poussé par le citoyen lambda en bas de la pyramide n'est pas entendu par le décideur solidement amarré à son sommet. Par contre, le « faiseur d'opinion » exige que le moindre de ses murmures soit entendu par la base. Pour cela, il se sert d'un haut-parleur souvent fort complaisant, trop complaisant pour les plus démagogues, un outil de mass-média : la télévision. Il faut que nos démocraties sachent au mieux utiliser les nouveaux outils de communication qui permettent à chacun de disposer du même niveau d'écoute mais aussi d'émission. C'est en se mettant ainsi en réseau, en utilisant un protocole universel tel que celui d'Internet, que nos démocraties pourront trouver les capacités de relever les nombreux défis de l'avenir. Mais soyons bien vigilants, nous qui, avec ténacité, voulons que les Nouvelles Technologies améliorent le sort de l'Homme. Il se pourrait que nous découvrions dans quelque temps que, pour être plus efficaces et moins détectables, ces organisations terroristes se servent largement de la Toile pour communiquer. S'il en était ainsi, nous verrions sans retard, de « bonnes âmes » qui, par des raccourcis saisissants, accuseraient Internet d'être le plus démoniaque des outils favorisant le développement du terrorisme sur l'ensemble de la planète. Il faut que nous sachions nous préparer à répondre à de telles accusations. Pour cela, la communauté des internautes doit montrer qu'elle a certes une passion immodérée pour la Liberté mais qu'elle sait aussi, quand l'avenir de notre Démocratie, de notre Civilisation, est en jeu, avoir un grand sens des responsabilités.
René TRÉGOUËT
Sénateur du Rhône
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