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Résultats prometteurs pour un patch vaccinal contre la rougeole et la rubéole
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La quasi-totalité (99 %) des infections et des décès dus à la rougeole dans le monde touchent les populations des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (PRFI). La rougeole est responsable de 3 % de la mortalité mondiale des enfants de moins de 5 ans ; la rubéole est la principale cause de malformations congénitales évitables par la vaccination. La couverture vaccinale reste en deçà des objectifs d'élimination de la rougeole.
Même avec une conservation correcte entre 2 et 8°C, les doses inutilisées de vaccin contre la rougeole et la rubéole perdent leur efficacité et doivent être éliminées dans les 6 heures suivant la reconstitution du vaccin, la médiocrité des infrastructures de santé, la pénurie de personnels : même pour les professionnels expérimentés dans des contextes complexes, il est difficile d'atteindre tous les enfants pour obtenir une couverture vaccinale suffisante. Ainsi, mettre au point et développer de nouvelles stratégies pour des contextes d'administration vaccinale difficiles est un impératif de santé et d’équité vaccinale.
Les patchs à micro-aiguilles (microneedle patchs, MNPs) sont une innovation technologique permettant d’améliorer la couverture vaccinale. En fournissant un dispositif d'administration de vaccins plus thermostable, à dose individuelle et sans injection, pouvant être réalisés par du personnel local non médical, les MNPs permettent de réduire les doses de vaccin gaspillées, les effets indésirables liés aux injections et les ruptures de la chaîne du froid, tout en facilitant la gestion des déchets. En outre, pour certains vaccins, les MNPs éliminent la nécessité de reconstituer le vaccin avec les risques qui y sont associés, tels que la contamination ou la perte d’efficacité. Les MNPs représentent une innovation prioritaire au niveau mondial pour surmonter les obstacles à la vaccination, surtout dans les PRFI.
Une stratégie de priorisation de l'innovation en matière de vaccins a été élaborée dans le cadre d'un partenariat entre l’OMS, l'UNICEF, Gavi, l'Alliance du vaccin, PATH et la Fondation Bill & Melinda Gates. Elle a récemment défini le développement de MNPs comme la première priorité mondiale pour surmonter les obstacles à la vaccination dans les PRFI et pour atteindre les objectifs de couverture vaccinale. Une étude conduite par une équipe internationale (Gambie, Afrique du Sud, USA) a permis de fournir les premières données sur la tolérance, l'innocuité et l'immunogénicité d'un MNPs contre la rougeole et la rubéole (MRV).
Il s’est agi d’un essai clinique monocentrique de phase 1/2, en double aveugle, en double hypothèse, randomisé, contrôlé par des tests actifs, mené en Gambie. Trois cohortes d’âge ont été formées : une cohorte « adultes » incluant des sujets âgés de 18 à 40 ans, une cohorte "enfants en bas âge" de 15 à 18 mois, une cohorte "nourrissons" de 9 à 10 mois. Seuls les sujets en bonne santé ont été inclus ; les participants devaient être disponibles pour des visites tout au long de la période de suivi.
Les trois cohortes ont été réparties au hasard (enfants et nourrissons) à recevoir soit un patch rougeole rubéole (MNPs-MRV ; Micron Biomedical, Atlanta, GA, USA), soit un placebo-MNP (patch placebo) associé à une injection sous-cutanée de MRV (MRV-SC ; Serum Institute of India, Pune, Inde). Les préparations de MNPs-MRV, de placebo-MNPs et de MRV-SC étaient visuellement identiques. Des personnels ont suivi les participants à l'aide d'une application en ligne ; ils n’ont pas participé à la collecte des données relatives à l’évaluation des résultats. Le personnel chargé d'administrer les interventions de l'étude, les participants, les parents, le personnel de l'étude chargé d'évaluer les résultats de l’essai, n'ont pas été informés de la répartition des traitements.
La population pour l’évaluation de l’innocuité et la tolérance était constituée de tous les participants vaccinés (adultes, enfants et nourrissons) et l'analyse a été effectuée en fonction de la voie d'administration du MRV. Les effets indésirables locaux et systémiques ont été recueillis pendant les 14 jours suivant la vaccination, et jusqu'au 180ème jour.
La population d'immunogénicité était composée de tous les participants vaccinés (enfants et nourrissons) pour lesquels on disposait d'un résultat de référence et d'un résultat à la visite du 42ème jour et qui n'ont pas eu d'écarts au protocole susceptibles d'affecter de manière substantielle les critères d'évaluation de l’immunogénicité. Les anticorps sériques neutralisants contre la rougeole et la rubéole ont été mesurés au début de l’étude (référence), puis au 42ème jour et au 180ème jour. Les taux de séroprotection et de séroconversion, ainsi que les moyennes géométriques des concentrations d’anticorps, ont été recherchés.
Le recrutement s’est fait sur 1 an, entre mai 2021 et mai 2022. Au total, 45 adultes, 120 enfants en bas âge et 120 nourrissons (séronégatifs pour la rougeole et la rubéole) ont été répartis au hasard, puis vaccinés. Après l'administration du MNPs-MRV, chez les nourrissons, 93 % d’entre eux ont présenté une séroconversion pour la rougeole et 100 % pour la rubéole. Après l'administration de MRV-SC, 90 % et 100 %, respectivement, ont présenté une séroconversion pour la rougeole et la rubéole. Des résultats similaires de séroconversion ont été obtenus chez les jeunes enfants aussi bien après administration du MNPs-MRV qu’après celle du MRV-SC.
Au 180ème jour de suivi, plus de 90 % des nourrissons étaient restés séropositifs pour la rougeole et 100 % des nourrissons l’étaient pour la rubéole. Concernant la tolérance, aucun problème n'a été relevé dans les 14 jours suivant la vaccination, cela dans les trois cohortes. L'induration au site d'application du MNPs-MRV a été la réaction locale la plus fréquente observée chez 46/60 enfants en bas âge (77 %) et 39/60 nourrissons (65 %). Des effets indésirables connexes non sollicités, le plus souvent une décoloration au site d'application, ont été signalés chez 35/60 enfants en bas âge (58 %) et 57 des 60 nourrissons (95 %) ayant reçu le MNPs-MRV. Toutes les réactions locales étaient légères. Il n'y a pas eu d'événements indésirables graves.
Cet essai a fourni les premières données sur l'utilisation de patchs pour administrer des vaccins contre la rougeole et la rubéole aux enfants et aux nourrissons ; il a montré des taux de séroconversion très élevés (de 93 à 100 %) toujours présents après 3 mois de suivi. Pour les auteurs, les résultats très encourageants d'innocuité et d’immunogénicité de cet essai de phase 1/2 soutiennent le développement accéléré du MNPs-MRV pour favoriser l’élimination de ces deux maladies, particulièrement dans les PRFI.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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- Publié dans : Biologie & Biochimie
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