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Une protéine anti-inflammatoire et pro-cicatrisante, produite par des neurones !
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Lorsqu’on se brûle, qu’on se blesse ou encore qu’on souffre d’une infection cutanée, des neurones sensoriels spécialisés, dits "nociceptifs", localisés au niveau de la peau, s’activent et transmettent des signaux générateurs de douleur. Mais ce n’est pas tout : en plus de communiquer rapidement ce signal de danger vers le cerveau, ils libèrent localement des neuromédiateurs dont certains semblent capables de moduler l’immunité. L’équipe de Sophie Ugolini travaille depuis plusieurs années sur les interactions entre le système nerveux sensoriel et le système immunitaire. Un domaine de recherche très exploratoire, dont l’importance clinique est en train d’émerger.
Dans un travail récent, paru dans Nature, elle s’est penchée sur les mécanismes impliqués en cas d’inflammation de la peau liée à un coup de soleil. Avec Guillaume Hoeffel et les autres membres de son équipe, et en collaboration avec le neurobiologiste Aziz Moqrich, elle y décrit le rôle central d’une protéine, TAFA4, libérée par certains neurones sensoriels : « TAFA4 est une molécule capable de favoriser la réparation tissulaire en régulant l’activité de certaines cellules immunitaires de la peau. On peut donc envisager qu’elle devienne une molécule thérapeutique pour traiter des maladies dans lesquelles une destruction tissulaire survient du fait d’un emballement immunitaire », explique la chercheuse.
Selon elle, il existe en réalité plusieurs sous-types de neurones sensoriels. « Nous avons observé que certains d’entre eux, les neurones dits “GINIP” (car ils expriment la protéine G alpha Inhibitory Interacting Protein) étaient préférentiellement activés et produisaient la protéine TAFA4 lors d’une surexposition de la peau aux rayons ultraviolets (UV) », poursuit Sophie Ugolini.
Avec son équipe, elle a comparé la réparation tissulaire après exposition aux UV chez des souris qui possédaient ou non des neurones GINIP : « Les animaux dépourvus de ce type de neurones présentaient une inflammation persistante, un défaut de cicatrisation et une fibrose locale ». Les chercheurs ont obtenu des résultats similaires avec des souris génétiquement déficientes pour le gène TAFA4.
Des expériences complémentaires, conduites in vitro et in vivo, leur ont ensuite permis d’en apprendre plus sur les mécanismes moléculaires et cellulaires impliqués : « Nous avons observé que la protéine TAFA4 régule l’activité des macrophages, des cellules de l’immunité présentes dans les tissus qui ont des activités pro- ou anti-inflammatoires selon les circonstances. Ici, la protéine TAFA4 réduit leur production de cytokines synthétisée par certaines cellules du système immunitaire, agissant sur d'autres cellules immunitaires pour en réguler l'activité inflammatoire et, au contraire, favorise la production d’un médiateur anti-inflammatoire, l’interleukine 10 (IL-10) ». TAFA4 interviendrait donc pour limiter l’inflammation excessive et favoriser la cicatrisation. De manière intéressante, ces neurones qui produisent TAFA4 sont aussi connus pour être impliqués dans la perception des caresses.
Fortes de ces observations, Sophie Ugolini et son équipe poursuivent leurs recherches : ils mettent actuellement au point des modèles animaux qui permettront d’évaluer l’intérêt thérapeutique de TAFA4 dans des maladies où une destruction tissulaire survient, qu’elle soit d’origine auto-immune comme dans la polyarthrite rhumatoïde, ou infectieuse comme dans le choc septique ou la Covid-19 sévère. L’équipe compte aussi approfondir le rôle de la voie TAFA4 dans d’autres pathologies cutanées.
Dans un autre travail expérimental, l’équipe de Sophie Ugolini s’est penchée sur les interactions entre les neurones nociceptifs et l’immunité dans l’infection à HSV-1, le virus responsable des lésions cutanées douloureuses de l’herpès labial. Chez des souris dépourvues de terminaisons sensorielles nociceptives, les chercheurs ont observé une augmentation de la quantité de certaines cellules immunitaires et de certains médiateurs pro-inflammatoires, ainsi qu’un retard de la résolution de l’inflammation. Par ailleurs, ils ont constaté un défaut dans la réponse antivirale des lymphocytes T qui a un effet toxique sur les cellules. Les réponses immunitaires innées et adaptatives seraient donc altérées lorsque les neurones nociceptifs sont absents. Les chercheurs souhaitent maintenant étudier le rôle des neurones GINIP et de TAFA4 dans ces mécanismes.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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