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Première thérapie ciblée pour le mélanome

Pour la première fois un traitement s'avère efficace contre un cancer de la peau très sévère, le mélanome métastatique. Ces résultats ont été présentés au congrès de la société américaine d’oncologie (ASCO) qui se tient à Chicago.

«Un fait unique dans l’histoire du mélanome». C’est ainsi que le Dr Caroline Robert, responsable du service de dermatologie à l’institut Gustave Roussy (Villejuif) commente, très enthousiaste, un travail international très attendu auquel elle a participé et qui sans nul doute va rapidement faire reculer le nombre de morts dus à cette pathologie mortelle et sournoise. Car face au mélanome métastatique, les armes thérapeutiques sont bien maigres. Or, ces nouveaux résultats, «permettent grâce à un nouveau traitement très rapidement actif de repousser l’échéance et d’augmenter la survie globale de patients qui étaient jusqu’à présent condamnés», poursuit la spécialiste. Présenté très solennellement en session dite plénière, devant des milliers de spécialistes, par le Dr Paul Chapman, cancérologue au centre Memorial Sloan-Kettering à New York, lors du congrès international sur le cancer qui se tient actuellement à Chicago, ce travail international a été vivement applaudi par ses pairs. Il est en effet assez exemplaire.

Progression ralentie de la maladie

Les équipes réparties dans 12 pays et 104 centres ont suivi plus de 600 malades tous atteints de mélanome métastatique et ont comparé la chimiothérapie actuelle, la dacarbazine, à une molécule expérimentale, le vémurafénib, un inhibiteur de BRAF. Ce nouveau médicament a été spécialement conçu par les laboratoires Roche-Genentech pour inhiber l'activité d’une protéine mutante, BRAF, intervenant dans la croissance et la survie normale des cellules. Or, dans la moitié des cas de mélanome, on retrouve une mutation de BRAF, V600 BRAF, tout particulièrement impliquée dans les mécanismes de prolifération cellulaire cancéreuse. Les résultats de BRIM3 sont très impressionnants : un risque de décès réduit de 63 % chez les personnes ayant reçu le vémurafénib et une diminution de 74 % du risque de voir la maladie progresser. Des résultats qui ouvrent la voie au premier traitement personnalisé du mélanome. Car parallèlement à la mise au point de la molécule, un test de génétique moléculaire, dit compagnon, a aussi été développé par le laboratoire. Il détecte, à partir d’une biopsie de la tumeur, la présence ou pas de la mutation et rend désormais possible l’identification de manière fiable et rapide des personnes admissibles au traitement.

Tests disponibles en France

L’aventure du vemurafénib va donc commencer. Et même s’il n’est encore commercialisé dans aucun pays, tout va aller très vite. D’ailleurs, «En Francele test peut déjà être pratiqué dans les plates-formes de génétique moléculaire avec le soutien de l’institut National du Cancer (Inca) et des autorisations temporaires d’utilisation de la molécule sont disponibles depuis quelques mois, ce qui va permettre de proposer rapidement le traitement aux patients présentant la mutation », assure le Dr Robert. De bonnes nouvelles donc pour les malades, condamnés à très court terme et qui pourront ainsi espérer quelques mois de survie supplémentaires bien précieux. Rappelons que pris à temps, le mélanome peut dans 80 % des cas être heureusement guéri. Mais dans 20 % des cas, il est découvert trop tardivement et a déjà essaimé des métastases. L’espérance de vie est alors limitée à quelques mois. «Ce premier traitement réussi du mélanome ciblant des patients porteurs de mutations génétiques spécifiques dans leur tumeur pourrait devenir l'une des deux seules thérapies permettant de prolonger la survie de patients atteints d'un mélanome avancé», a relevé le Dr Chapman.

Deux fois plus de cas en 10 ans

La seconde, c’est l’ipilimubab (Yervoy, laboratoires Bristol Myers Squib) dont les premiers résultats avaient été présentés l’an dernier, toujours ici à l’Asco. Dans ce cas, il ne s’agit pas d’une thérapie ciblée mais d’une immunothérapie car le médicament stimule le système immunitaire. Un nouvel essai présenté cette année montre qu’en association avec une chimiothérapie, la dacarbazine, il prolonge aussi la vie des patients. « Mais au prix d’une toxicité, surtout hépatique non négligeable,  qui doit rendre son usage prudent », modère le Dr Willy Lescaut, cancérologue à l’hôpital Princesse Grace à Monaco. Et, bien sûr, un nouvel essai clinique associant vemurafenib et ipilimumab a déjà démarré. Premiers résultats au prochain congrès de l’Asco en 2012. En attendant, rappelons que les mélanomes sont en forte progression, avec un doublement du nombre de cas tous les 10 ans. Chaque année en France, 8.000 nouveaux cas de mélanome sont enregistrés et 1.500 personnes en décèdent.

Sciences & Avenir

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