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La photoémission filmée en 3D et en temps réel
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La photoémission, interprétée en 1905 par Albert Einstein comme l'émission d'un électron par de la matière suite à l'absorption d'un quantum de lumière (le photon), a joué un rôle clé dans le développement de la mécanique quantique au début du XXe siècle. Elle est devenue aujourd’hui un outil d’analyse extrêmement puissant de la matière à l’aide de sources de rayonnement variées, depuis les lasers jusqu’aux synchrotrons, allant de l’UV aux rayons X.
Le processus de photoémission se produit sur des échelles de temps si brèves – de l'ordre du milliardième de milliardième de seconde (1 attoseconde = 10-18 s) – qu'il a, jusqu'à récemment, été inconcevable d'en observer directement la dynamique, pourtant essentielle à sa totale compréhension. En effet, c'est pendant le processus que les signatures spectroscopiques propres à chaque espèce chimique sont transférées au photoélectron, alors que celui-ci quitte l'atome, la molécule ou le matériau, tout en continuant de ressentir l'influence du cœur ionique.
C'est en 2001 que les premières sources d'impulsions de lumière cohérente de durées "attoseconde" ont vu le jour. La disponibilité de ces sources aux propriétés jusqu'alors inédites a marqué l'avènement de la spectroscopie résolue en temps à l'échelle attoseconde, échelle ultime des dynamiques se produisant dans la matière chimique, et demeurant, à ce jour, la plus courte qui puisse être résolue expérimentalement. La spectroscopie attoseconde a depuis fait ses preuves en démontrant la possibilité d'explorer les dynamiques d'une variété de processus fondamentaux, parmi lesquels la photoémission.
Dans ce cadre, une collaboration impliquant des équipes du CEA, de Sorbonne Université, de l'Université Paris-Saclay, de l'Université Lyon 1 et du CNRS a combiné une approche interférométrique attoseconde avec une méthode de détection de photoélectrons dite "d'imagerie de vitesse" afin d'accéder, pour la première fois, à la dynamique complète de photoémission en fonction de la direction d'émission. Les expériences effectuées au CEA Paris-Saclay, sur la nouvelle plate-forme ATTOLab, ont porté sur la photoémission de l'hélium à deux photons, impliquant les états intermédiaires anisotropes 1s3p et 1s4p. Les mesures du module et de la phase de l'amplitude de photoionisation ont pu être analysées et interprétées grâce à des simulations numériques et des développements analytiques menés à Sorbonne Université. Les dynamiques révélées, ainsi que leurs dépendances angulaires, diffèrent significativement selon le degré d'implication des états intermédiaires, illustrant la richesse des phénomènes en jeu.
Cette approche exclusivement expérimentale, permettant de "filmer" la photoémission à l'échelle atomique, est applicable à une large gamme d'espèces chimiques au repos ou participant à une réaction, promettant de révéler les secrets des corrélations et des dynamiques électroniques régissant la structure et les transformations de la matière.
Figure : film en 3D de la photoémission d’un atome d’hélium suite à l’absorption simultané d’un photon d’extrême ultraviolet (XUV) et d’un photon infrarouge (IR). L'instant t = 0 est placé au maximum du recouvrement des impulsions XUV + IR. Chaque instantané représente l'amplitude complexe du taux d'ionisation (module en coordonnées polaires, phase donnée par le code couleur). Au début et à la fin de l’interaction, l’émission d’électrons se fait préférentiellement dans la direction z de la polarisation XUV/IR. De façon remarquable, au maximum de l’interaction avec la lumière, près du temps 0, les interférences entre les voies d’ionisation impliquant les états intermédiaires 1s3p et 1s4p affectent fortement la symétrie de l’émission, qui se fait alors majoritairement perpendiculairement à la polarisation du rayonnement.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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