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Edito : Le peuple de France exige d'être pris en considération

Les Démocraties sont-elles bien armées pour aborder l'avenir ? Quand dans un grand pays démocratique comme la France, quelque 70 % d'électeurs s'abstiennent et qu'un nombre très significatif du bataillon clairsemé de votants s'exprime par un bulletin blanc ou nul, nous avons l'obligation de nous poser cette question. Qu'est-ce qui peut expliquer un tel comportement de toute une Nation et quelles sont les adaptations plus ou moins profondes qui devraient être mises en oeuvre ? Voici les questions auxquelles il nous faut savoir répondre sans retard. Ce comportement collectif met en évidence la déconnexion qui, jour après jour, devient plus profonde entre notre Peuple et le monde politique dans son ensemble. Il a été proposé au Peuple de se prononcer sur une question dont il ne percevait pas l'urgence ni même l'importance alors qu'il avait la tête ailleurs, enferré dans ses problèmes quotidiens quand il constate qu'il dépense chaque mois plusieurs centaines de francs de plus qu'il y a un an, pour faire chaque semaine son plein d'essence et, qui plus est, qu'il doit payer, lui, plus d'impôts alors que des annonces intempestives proclament à tout vent que ceux-ci baissent. Cette abstention massive jamais encore constatée dans notre pays exprime donc avant tout un ras-le-bol. Par ailleurs, le déséquilibre annoncé dans les sondages entre les OUI et les NON, les votes positifs devant l'emporter par 75 %, chacun s'est senti démobilisé, quel que soit son bord, puisque son vote ne pouvait pas peser sur le résultat final. Quelles sont les mesures qui doivent être prises sans retard pour éviter que la situation s'aggrave encore et devienne incontrôlable ? Comme je le dis avec insistance depuis des années, mais mon cri est bien faible dans le tumulte médiatique ambiant, il faut que l'Etat et toutes les organisations politiques évoluent en profondeur en sachant réaliser une véritable mue. Les structures pyramidales qui se montraient encore efficaces il y a quelques décennies ne s'intégrant plus dans l'architecture que réclame le peuple, le temps des « bonnes paroles » lancées du haut d'un piédestal est maintenant suranné. L'avenir est au dialogue, à la transparence, à l'humilité. Avant de prendre des décisions, il faut savoir longuement échanger et écouter. Ce n'est qu'à ce prix que les Démocraties retrouveront un sang neuf et qu'à nouveau les citoyens participeront activement à la vie collective. Prenons un exemple encore modeste aujourd'hui mais qui va devenir déterminant dès ces prochains années. Les plus hauts personnages de l'Etat proclament haut et fort dans des séminaires, dans des comités interministériels, devant les médias, que notre Pays doit entrer avec force dans la société de l'information. Ayant fait cette B.A. (Bonne Action) comme disent les scouts, ces hauts responsables reviennent dans leurs bureaux lambrissés et demandent à leurs collaborateurs et collaboratrices de bien vouloir répondre au flot de mails que leur déclaration vient de générer... car vous le comprenez, ils ont d'autres choses bien plus sérieuses à faire et n'ont pas de temps à perdre... Mais que diable, quand comprendront-ils que notre Démocratie changerait de nature si le Président de la République, le Premier Ministre, les Ministres, les Responsables des partis politiques, les Elus, prenaient une heure chaque jour sur leur précieux temps pour aller sur le réseau Internet à la rencontre du Peuple pour échanger avec lui, pour l'écouter, pour constater combien l'intelligence collective progresse à pas de géant sur le réseau. Que de bourdes seraient évitées sans parler du booster extraordinaire qu'aurait ce comportement pour faire entrer notre Pays dans l'avenir. Il faut aussi que le citoyen puisse s'exprimer autrement pour faire connaître son avis. Pour renforcer la légitimité des représentants élus (Députés et Sénateurs), il faut que le Peuple puisse dorénavant être associé plus étroitement à l'élaboration de la Loi. Il faut ainsi, comme je l'ai fait avec mon collègue Pierre Laffitte en septembre 1999 par notre proposition de Loi sur les logiciels libres, que tous les citoyens intéressés puissent, avec égalité, grâce au réseau Internet, apporter leurs observations et même leur contribution avant la discussion d'une Loi devant le Parlement. D'une Démocratie passive, nous passerions ainsi à une Démocratie participative. Il est urgent que nos plus hauts responsables politiques prennent sans retard conscience que les Démocraties changent actuellement de nature à une vitesse stupéfiante et que les peuples éduqués qui maintenant les composent exigent d'être pris en considération.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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