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Pas bête, le robot

Alexis Drogul ne croit pas à l'intelligence isolée, celle qui émerge de la seule complexité d'un système, fût-ce le cerveau humain. Pour ce jeune chercheur en informatique, toute intelligence est sociale, produit des relations qu'entretient un individu avec son milieu. D'où l'idée du programme Microbes, qu'il mène depuis le laboratoire d'informatique de Paris-VI (LIP6), en partenariat avec le CNET (Centre national d'études des télécommunications). Un projet qui consiste à laisser déambuler dans les couloirs du laboratoire une dizaine de microrobots autonomes, de ne leur assigner aucune tâche et de convoquer ensuite quelques sociologues et anthropologues pour noter comment chacun s'est adapté à la situation, robots comme êtres humains. En fait, les robots " microbes " sont truffés de capteurs. Leurs pare-chocs, par exemple, leur permettent de réagir aux collisions en entamant une marche arrière. Les huit médaillons qui décorent leurs flancs sont des sonars. Avec eux, les robots fonctionnent comme des chauves-souris, en émettant des ultrasons, déduisant la distance les séparant de l'obstacle. Petit à petit, les robots construisent ainsi une carte des lieux. Et, lorsqu'ils sont désorientés, la caméra qui les surmonte les aide à se repérer. Mais tout cela ne servirait à rien si les robots n'étaient dotés de l'équivalent d'un cerveau. A l'intérieur de leur carcasse rouge, un microcontrôleur centralise les informations et les transmet à un ordinateur communicant, équipé d'un modem radio. Le programme, développé sous Linux, comprend à la fois le système de navigation du robot (la cartographie et la localisation) et son modèle de comportement, c'est-à-dire l'architecture de contrôle qui associe à une information une attitude. Ce dernier est en cours de définition par les chercheurs du LIP6. Avec ces outils, les robots devront apprendre à résoudre leurs conflits et à développer des synergies. Des bornes de recharge vont être disposées dans les couloirs pour leur permettre de faire le plein d'énergie. A quoi servira cette expérience ? Alexis Drogoul a déjà imaginé des robots-guides, comme celui qui est développé pour la visite des musées par l'université Carnegie Mellon, aux Etats-Unis. Avec un appendice supplémentaire pour le son, ces robots pourraient aussi lire les agendas partagés des chercheurs et venir les chercher en réunion pour les prévenir d'un rendez-vous. Mais, le plus innovant, il en est persuadé, viendra des observations des chercheurs qui auront cohabité avec les " microbes ". A terme, les robots coopératifs pourraient trouver leur place dans la maison en offrant leur mobilité aux objets qui en sont dépourvus, ou, de manière plus inattendue, en transférant leur structure sociale minimale aux appareils connectés pour leur permettre de mieux gérer les ressources et de s'entraider.

Le monde : http://www.lemonde.fr/article/0,2320,seq-2081-40781-MIA,00.html

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