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Edito : Pandémie de Covid-19 : les craintes, les attentes, les espoirs…
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Avant-Propos : Adhérez à notre association pour sauver RT Flash
La semaine dernière j'ai lancé notre campagne, désormais annuelle, d'adhésions et de dons à l'ADIST pour donner les moyens à cette association de continuer à faire vivre RT Flash. Mais lors de ce lancement j'ai fait une erreur, j'ai oublié de préciser le lien, en bas de mon message, vous donnant la possibilité de vous rendre instantanément sur le site de HELLOASSO qui gère cette campagne. Vous avez été plusieurs à me faire découvrir cette lacune et je vous demande de m'en excuser. Malgré cette erreur, vous avez déjà été 58 donateurs et vous avez versé 4.030 euros. J'espère qu'avec le lien que je place sous cet avant-propos vous serez encore nombreux, cette semaine, à adhérer à notre association et même d'y ajouter un don.
Encore un grand MERCI
René TREGOUET
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Editorial :
Après une relative accalmie en Europe et en Asie, pendant l’été (mais pas aux Etats-Unis et en Amérique latine), la pandémie de Covid-19, qui a déjà touché 30 millions de personnes dans le monde, et en a tué un million, reste bien présente sur notre continent, même si on ne peut pas encore parler de « 2ème vague », car l’évolution globale des hospitalisations et de la mortalité par Covid-19 reste, pour l’instant, très inférieure à celle que nous avons connue au Printemps. L’Oms rappelle en effet qu’il y a eu dans le monde, du 14 au 20 septembre, une augmentation de 6 % du nombre de nouveaux cas de Covid-19 par rapport à la semaine précédente. Mais au cours de la même période, le nombre de décès a diminué de 10 %...
Avant de faire le point sur la situation médicale et sanitaire en France, il est intéressant d’évoquer les dernières données qui éclairent de manière plus précise le risque de mortalité liée au Covid-19 en fonction de l’âge et du sexe. Une série d’enquêtes sérologiques confirment que le risque de décès, qui ne dépasse pas les 1 % chez les jeunes adultes en bonne santé, peut atteindre plus de 11 % chez les plus de 75 ans et est presque deux fois plus élevé pour les hommes que pour les femmes. Ces études confirment que l’âge est de loin le facteur le plus important de prédiction du risque de décès d’une personne infectée (IFR), qui est la proportion de personnes qui mourront parmi celles infectées par le virus, y compris lorsqu'elles ne présentent pas de symptômes.
« Le Covid-19 n’est pas seulement dangereux pour les personnes âgées, il peut l’être aussi pour les personnes dans la cinquantaine ou la soixantaine », estime Andrew Levin, économiste au Dartmouth College de Hanovre, dans le New Hampshire, qui a estimé que l’infection par le SARS-CoV-2 est plus de cinquante fois plus mortelle pour un sexagénaire que de conduire une voiture. Reste que l’âge n’explique pas tout, comme le rappelle un autre épidémiologiste de renom, Henrik Salje, de l’Université de Cambridge, qui ajoute, « Le sexe est également un facteur de risque important, les hommes ayant presque deux fois plus de chances de mourir du coronavirus que les femmes.
Les grandes disparités, selon les pays, du ratio de mortalité pour les groupes d’âge les plus élevés montrent également que le risque de mourir du Covid-19 est corrélé à la capacité des systèmes de soins de santé et au fait que le virus s’est propagé ou non dans les maisons de retraite. Pour estimer le risque de mortalité par âge, les chercheurs ont utilisé des données provenant d’études sur la prévalence des anticorps dans la population de plusieurs pays européens.
En juin et juillet, 109 000 adolescents et adultes sélectionnés au hasard ont reçu par la poste un test de dépistage d’anticorps par prélèvement d’une simple goutte de sang. Sur l'ensemble des personnes testées, environ 6 % possédaient des anticorps contre le SARS-CoV-2. Ce résultat a permis d’évaluer le taux de létalité réelle (IFR) pour le Royaume-Uni à 0,9 %, c’est-à-dire 9 décès pour 1 000 cas. L’IFR est proche de zéro pour les personnes âgées de 15 à 44 ans, monte à 3,1 % pour les 65-74 ans et atteint 11,6 % pour toute personne plus âgée.
Cette estimation est corroborée par une autre étude menée en Espagne, qui a permis de tester la présence d’anticorps chez plus de 61 000 personnes dans des foyers sélectionnés au hasard. L’IFR global pour la population était d’environ 0,8 %, mais il est resté proche de zéro pour les personnes de moins de 50 ans, et atteint 11,6 % pour les hommes de 80 ans et plus – contre 4,6 % pour les femmes de cette même tranche d’âge. Cette étude confirme une nouvelle fois que les hommes sont plus susceptibles de mourir de l’infection par le Covid-19 que les femmes.
Mais un autre facteur important dans les différences du taux de mortalité de chaque pays semble être lié au fait que le virus s’est propagé ou non dans les maisons de retraite et les établissements de soins pour personnes âgées. L’étude anglaise a ainsi montré, qu’après prise en compte des décès dans les maisons de soins, l’IFR chez les personnes âgées de 75 ans ou plus est passé de 11,6 % à 18,7 %.
En France, au 23 septembre, le taux de positivité (proportion du nombre de personnes positives par rapport au nombre total de personnes testées) était remonté à 6,1 %, contre 5,6 % il y a une semaine, et dans 53 départements, le seuil d’alerte épidémiologique (50 cas pour 10 000 habitants) est à présent dépassé. Le nombre d’hospitalisations est lui aussi reparti à la hausse. Quant au nombre quotidien de décès, bien qu’en hausse, il reste à un niveau cinq fois inférieur à celui que nous avons connu entre début mars en fin mai. A cet égard, Jean-François Toussaint, professeur de physiologie à Paris-Descartes, rappelle « Qu’Il y a actuellement un décès nouveau pour 1.000 tests positifs nouveaux » et qu’il est trop tôt pour parler de « 2eme vague », même si la situation sanitaire s’est effectivement dégradée depuis le début de l’été.
Anticipant un possible retour en force du virus, le Gouvernent a annoncé de nouvelles mesures de lutte et de prévention contre le Covid-19. Les pouvoirs publics ont notamment décidé de prendre des mesures locales spécifiques (notamment dans le Rhône et les Alpes maritimes), de prioriser l’accès aux tests et d’adapter les restrictions pour les enfants à l’école. A Nice et Lyon, le taux d’incidence a doublé en trois semaines, pour atteindre respectivement 200 et 213 cas pour 100 000 habitants, soit quatre fois la cote d’alerte ; c’est pourquoi les pouvoirs publics ont décidé de durcir les mesures de protection, de prévention et de distanciation sociales dans ces deux métropoles.
Sur le plan national, le Gouvernement a décidé la nécessaire priorisation des tests pour éviter les phénomènes de saturation dans le traitement de ces tests, faute de moyens humains et matériels suffisants en aval, pour traiter plus d’un million de tests par semaine. Parallèlement, le Gouvernement a ouvert vingt nouveaux centres de prélèvements en Ile-de-France. Le Gouvernement a néanmoins décidé de suivre les recommandations du Haut Conseil de santé publique, et d’assouplir les restrictions qui touchent aux contaminations entre enfants, qui se contaminent peu entre eux et semblent également peu contaminants pour les adultes.
Sur la question centrale liée à l’arrivée et à l’utilisation des nouveaux tests rapides antigéniques, les TRA, le Gouvernement souhaite lancer dans les semaines qui viennent une première vague de cinq millions de tests antigéniques, plus rapides que les tests PCR, en précisant que ces tests ne sont pas destinés aux personnes présentant déjà des symptômes. Ces tests TRA, bien que moins fiables que leurs cousins PCR (qui sont fiables à plus de 90 %), permettront, comme les tests RT-PCR (réaction en chaîne par polymérase ), de déterminer beaucoup plus rapidement (30 minutes) si un patient est infecté au moment précis du dépistage, contrairement aux tests sérologiques qui détectent les anticorps, développés en réaction à un contact antérieur avec le virus.
Il faut bien comprendre que ces familles de tests, sont différentes, tant dans leur nature que dans leur pratique. Les tests par PCR recherchent la présence d’ARN, le code génétique du virus. Les tests antigéniques sont conçus pour détecter les antigènes du SARS-CoV-2, c’est-à-dire des protéines produites par le virus lui-même et présentes à sa surface. Pour les tests TRA, on réalise le prélèvement dans le nez, puis on le mélange à un réactif, directement sur une bandelette, qui se colore en présence du virus, comme un test de grossesse. Il s’agit d’un procédé plus simple et plus rapide que les tests RT-PCR, puisque le résultat est disponible en moins d’une demi-heure.
L’idée est de pouvoir utiliser rapidement, de manière conjointe, ces deux types de tests de manière complémentaire : en première ligne, les nouveaux tests RRA, simples et rapides, puis, en seconde ligne, pour les personnes positives, un test RT-PCR pour confirmer l’infection au coronavirus.
Venons-en à présent à la question centrale que tout le monde se pose : quand disposerons-nous enfin d’un vaccin efficace et fiable contre ce coronavirus ? Sans doute pas avant le second trimestre 2021, selon de nombreux scientifiques, dont l’éminent immunologiste Bruno Lina, qui travaille à Lyon. L'OMS dénombre à ce jour 176 vaccins en développement, dont neuf sont en phase finale des essais cliniques.
Le candidat vaccin le plus avancé se nomme « ChAdOx1 » et est issu du partenariat entre AstraZeneca et l'Université d'Oxford. Il est actuellement testé sur plusieurs milliers de volontaires à travers le monde. Ce vaccin est basé sur un adénovirus — virus composé d'une molécule d'ADN — de chimpanzé modifié. Sa commercialisation pourrait débuter en 2021 et l'Union Européenne a conclu un accord avec le groupe pharmaceutique pour s'assurer 300 millions de doses, avec une option pour 100 millions de doses supplémentaires.
La Chine affirme pour sa part qu’elle disposera d'un vaccin opérationnel avant la fin de l’année, mais ne précise pas de quel vaccin il s'agit parmi les quatre candidats qu’elle développe simultanément. Pékin précise juste que son vaccin final sera « sûr et efficace », même en cas d'éventuelles mutations du virus.
Aux Etats-Unis, Moderna développe l'"ARNm-1273", qui repose sur une nouvelle technologie qui n'a pas encore fait ses preuves : l'ARN messager. Des essais à grande échelle sont en cours depuis deux mois et le vaccin doit être testé sur 30 000 volontaires, pour une commercialisation espérée en fin d’année.
Autre projet de vaccin très avancé, celui mené conjointement par l’américain Pfizer et l’allemand BioNTech. Baptisé "BNT162b2", ce vaccin repose, comme le vaccin de Moderna, sur la technologie de l'ARN messager, en est actuellement à la phase III des tests. Les essais, initialement prévus pour 30 000 volontaires, vont être étendus à 44 000 personnes.
De son côté, Janssen Pharmaceutica, filiale belge du groupe pharmaceutique américain Johnson & Johnson, développe un candidat vaccin basé sur un vecteur adénovirus, qui va être testé sur 60 000 volontaires.
Il faut aussi mentionner le projet de vaccin de l’alliance franco-britannique Sanofi-GSK, mais ce projet est en retard sur les autres et ce vaccin ne devrait pas être disponible avant la fin de 2021. Il repose sur une protéine recombinante, une technique déjà employée par ce laboratoire pour produire un vaccin contre la grippe saisonnière, et devrait coûter moins de 10 euros en cas de commercialisation.
Evoquons enfin le vaccin russe, basé sur un adénovirus et qui doit être inoculé en deux temps, à 21 jours d'intervalle. Baptisé « Bk-V », ce vaccin est en phase III de son développement, et est actuellement testé sur 40 000 volontaires. Mais en dépit d’une étude positive sur son efficacité, de nombreux scientifiques s’interrogent sur la fiabilité des données transmises par la Russie.
L’arrivée de ces futurs vaccins suscite, et c’est bien normal, beaucoup d’interrogations dans le grand public. Parmi ces questions, on retrouve de manière récurrente celle concernant le véritable pouvoir protecteur de ces vaccins, lorsqu’ils seront disponibles, face à un virus qui aura sans doute muté plusieurs fois d’ici là.
Dans une telle perspective, ces vaccins seront-ils encore efficaces ? Il est vrai qu’à chaque fois que ce virus se réplique, des erreurs se produisent dans la copie de son génome. Ces mutations, tout à fait normales, s’inscrivent dans le cadre de la sélection naturelle : elles peuvent donc s’avérer, soit défavorables au virus, soit favorables à son développement, soit, dans la majorité des cas, neutres, c’est-à-dire sans incidence majeure sur sa virulence et sa dangerosité. ! Ce que l’on sait de manière solide, c’est que les coronavirus mutent moins vite que d'autres virus à ARN. Il a notamment été bien établi par les chercheurs que le Sars-Cov-2 mute deux fois moins vite que la grippe et quatre fois moins vite que le VIH, comme l’ont montré les recherches d’Emma Hodcroft, épidémiologiste moléculaire de l'Université de Bâle (Suisse) (Voir Nature).
Bien qu’il faille rester très prudent en la matière, ce qu’on peut dire, c’est que, pour le moment, les scientifiques constatent que le coronavirus reste génétiquement relativement stable. Pour l’affirmer, les chercheurs du monde entier identifient et répertorient les mutations génétiques du coronavirus, qui sont ensuite partagées sur une base de données internationale, GISAID, dont la valeur est inestimable pour la recherche. Or, ce travail de titan montre que les mutations connues de ce virus ne semblent pas avoir modifié fondamentalement ses caractéristiques et ses effets sur l'être humain.
« Le génome du coronavirus est exceptionnellement stable et, depuis le début de la pandémie, nous avons vu environ six mutations dans un génome de 30.000 bases. C’est une seule souche avec des variations mineures », précise Samuel Díaz-Muñoz, virologue évolutionniste à l’Université de Californie, à Davis. Selon cet éminent chercheur, cela s’explique par deux causes : un taux de mutation relativement lent et le fait que la plupart des mutations constituent une entrave au virus et sont donc éliminées. Selon lui, il n’y a pas de preuve pour l’instant de l’apparition d’une « souche » distincte du virus initial, c’est-à-dire une entité biologiquement différente, et possiblement plus virulente. Cette stabilité génétique du virus est également été confirmée par les travaux du Professeur François Balloux, directeur de recherche au Collège universitaire de Londres et du Professeur Simon-Lorière, directeur d'une équipe de recherche en virologie à l'Institut Pasteur, qui ont montré que le coronavirus n’avait pas connu, pour l’instant, de mutations majeures.
Il est vrai que dans une étude parue en juillet dans la revue Cell, des scientifiques avaient affirmé qu'une mutation permettait à la souche la plus répandue du virus d'infecter plus facilement les cellules, grâce à une modification de la protéine Spike qui lui permet d'entrer dans la cellule. Selon leur hypothèse, cette mutation pourrait rendre le virus plus contagieux, ce qui expliquerait sa propagation exponentielle (Voir Cell).
Mais depuis cette publication, de nombreux scientifiques ont souligné que cette étude n'apportait pas la preuve que cette possible capacité plus grande à infecter les cellules rend effectivement le virus plus contagieux. Selon eux, cette souche du virus pourrait tout à fait être plus infectieuse, sans être plus transmissible entre humains. Une hypothèse qui semble renforcée par le fait que les malades hospitalisés, après avoir été infectés par cette souche, ne développent pas plus de formes graves de la maladie.
S’il se confirme, comme cela semble être le cas, que le Sars-Cov-2 mute relativement lentement, ce serait une bonne nouvelle pour la mise au point d’un vaccin gardant un niveau de protection suffisant contre le coronavirus. Autre indicateur rassurant, la plupart des candidats-vaccins ont été élaborés à partir de virus qui correspondent aux premières souches de Wuhan, mais beaucoup de chercheurs ont testé les anticorps de leurs différents candidats-vaccins pour voir s'ils pouvaient neutraliser aussi les nouveaux virus. Et cela semble bien être le cas. Il semble donc que, dans l’état actuel de notre connaissance scientifique de ce virus, et ce point positif me semble particulièrement important pour l’avenir, les vaccins en préparation soient en mesure d’offrir un bon niveau de protection contre les différentes variantes connues du coronavirus, et qu’il ne soit pas nécessaire d’envisager pour l’instant un vaccin différent chaque année.
Il faut également dire un mot de la stratégie dite « de l’immunité collective », présentée par certains comme une alternative possible à la vaccination de masse et choisie, on le sait, par la Suède. Tout en respectant le choix de la société suédoise, on peut tout de même émettre des réserves sur ses résultats réels. Avec 5.900 morts et 87 000 cas confirmés par un test depuis le début de l'épidémie, le taux de mortalité (57,1 pour 100.000 habitants) est dix fois plus élevé que chez ses voisins scandinaves. La Suède est le 11e pays du monde et le 5e en Europe qui a le plus de morts par la pandémie de coronavirus, proportionnellement à sa population. Et pourtant, malgré son niveau élevé de mortalité, la Suède, selon les dernières données disponibles, est encore loin d'avoir acquis une immunité collective.
Par ailleurs, plusieurs études montrent qu’en supposant un seuil d'immunité collective de 50 %, la stratégie de l’immunité collective aurait entraîné au moins 100 000 décès en France…Une étude de l’Inserm qui vient d’ailleurs d’être publiée, et porte sur la sérologie de 15 000 personnes, estime qu’à la sortie du confinement, le pourcentage de la population infectée par le Covid619 variait de 3 % à 9 % selon les régions, ce qui montre qu’on est encore très loin d’atteindre ce fameux seuil de l’immunité collective…
Avant de clore ce chapitre sur l’état d’avancement des vaccins contre le coronavirus, on ne peut que saluer l’initiative lancée le 20 septembre dernier par 75 députés de toutes tendances politiques, qui ont publié un appel à se faire vacciner massivement contre la grippe, pour éviter de voir cette maladie saisonnière s’ajouter à la pandémie de Covid-19, ce qui pourrait provoquer une catastrophe sanitaire, par saturation des capacités de soins et de prise en charge. A l’initiative de cette tribune, Julien Borowczyk, député de la Loire, et médecin, souligne avec force qu’à « l’approche de l’hiver, le risque est grand de voir s’entrechoquer le Covid-19 avec la grippe, elle-même responsable de 10.000 morts environ chaque année ».
Mais, comme vient de la rappeler le directeur européen de l’OMS, nous ne devons pas tout attendre des vaccins et allons devoir apprendre à vivre, sans doute pendant de longues années, avec ce virus. Heureusement, en attendant l’arrivée de traitements antiviraux vraiment efficaces, la prise en charge des patients hospitalisés pour un Covid-19 a fait des progrès que l’on peut qualifier de spectaculaires en seulement quelques mois.
Premier progrès, le recours à l’oxygénothérapie, en remplacement de la ventilation mécanique par intubation, pour soulager les détresses respiratoires aiguës liées à l’infection par le coronavirus. Ce dispositif, très bien toléré par les malades, permet de délivrer par de petits tubes insérés dans le nez un mélange d’air et d’oxygène, humidifié et réchauffé, à un débit très élevé, allant jusqu’à 60 litres par minute, contre 15 litres par minute avec un dispositif classique par masque.
Autre amélioration décisive, le recours à un traitement corticoïde usuel et peu coûteux, la dexaméthasone. Une étude parue le 17 juillet dans le New England Journal of Medicine a montré qu’il réduisait sensiblement la mortalité des patients placés sous assistance respiratoire ou recevant de l’oxygène.
Enfin la délivrance d’anticoagulants à fortes doses et de manière précoce chez les patients atteints de formes sévères de Covid-19 a également montré son efficacité, en diminuant sensiblement le risque d’une embolie pulmonaire, un événement fréquent chez les malades du Covid hospitalisés. « Grâce à l’ensemble de ces progrès dans la prise en charge, le taux de mortalité a diminué de 50 % chez les patients hospitalisés entre le début de l’épidémie et fin juin », a indiqué le professeur Yazdan Yazdanpanah, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Bichat (AP-HP), et membre du conseil scientifique, lors des 21es Journées nationales d’infectiologie, qui se sont tenues à Poitiers du 9 au 11 septembre.
Venons-en à présent aux nouvelles pistes thérapeutiques en cours d’exploration pour lutter contre ce coronavirus déroutant. Après l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Agence européenne du médicament (EMA) vient de recommander à son tour la dexaméthasone, un corticoïde, dont nous avons vu que l’usage pour le traitement des cas sévères de Covid-19 a montré une réelle efficacité. L'EMA s’appuie sur les conclusions de la récente étude britannique Recovery, qui montrent que, chez les patients intubés, 29 % de ceux traités avec la dexaméthasone mouraient au bout de 28 jours de traitement, contre 41% de ceux qui n'en recevaient pas.
Autre médicament prometteur contre le COVID-19, l’anakinra, initialement utilisé pour traiter les rhumatismes. Les observations cliniques réalisées depuis six mois par une équipe pluridisciplinaire du GHPSJ (XIVe arrondissement de Paris) montrent, sur 125 patients étudiés, une forte diminution de la mortalité pour les patients graves traités à l'anakinra.
En matière d’antiviraux, le remdesivir, actuellement testé dans le cadre de l'essai clinique européen Solidarity, est le seul médicament qui semble disposer d’une relative efficacité thérapeutique, avec des effets secondaires acceptables. Selon les derniers travaux disponibles, les patients atteints du COVID-19 à un stade modéré ont vu leur état s'améliorer au terme de cinq jours de traitement au remdesivir, bien que médicament ne semble pas sensiblement réduire la durée des séjours à l'hôpital.
A Lyon, Alaxia, une start-up, a développé un médicament prometteur, baptisé ALX-009. Il s’agit d’un antimicrobien développé, à l'origine, pour les patients atteints de mucoviscidose, qui cible particulièrement les bactéries multi-résistantes aux antibiotiques. Ce médicament est composé de deux molécules : l’hypothiocyanite et la lactoferrine, deux composés antimicrobiens que l’on retrouve dans les poumons d’une personne saine. Fait remarquable, ce médicament semble également avoir un effet antiviral, notamment contre le virus de la grippe A/H1N1, et il sera bientôt testé contre le coronavirus, car les chercheurs pensent quel’ALX-009 pourrait également être efficace contre le Covid-19.
Mais nous devons bien comprendre que, même avec l’arrivée probable d’un vaccin l’année prochaine, même avec les progrès thérapeutiques que j’ai évoqués dans les traitements et la prise en charge, nous ne pourrons pas parvenir à maîtriser durablement cette pandémie mondiale si nous n’adoptons pas collectivement, sans doute pour de longues années, de nouvelles règles de protection et de « prudence » sociales, ce qui va nous obliger, il est vrai, à repenser nos comportements individuels et toute l’organisation de notre société. A cet égard, toutes les études scientifiques récentes vont dans le même sens : l’adoption massive des règles de prudence sociale, de port systématique du masque dans les endroits clos et les zones ouvertes fréquentées, et d’hygiène individuelle minutieuse est indispensable pour casser et maîtriser durablement les chaînes de contamination et protéger les plus fragiles d’entre nous, c’est-à-dire nos ainés.
Une vaste revue de la littérature scientifique a montré que si la distanciation physique et les mesures d’hygiène recommandées constituent aujourd’hui les meilleures interventions contre l’épidémie, le port du masque réduit lui aussi le risque infectieux (Voir The Lancet ).
Il y a quelques semaines, une autre étude américaine, réalisée par des chercheurs de l'université américaine de Duke, a montré que les masques réservés au personnel hospitalier, les « N95 » (la norme américaine, équivalente aux FFP2 en Europe) sont les plus efficaces, réduisant la transmission de gouttelettes de plus de 99,9 %, par rapport à une personne parlant sans masque (Voir Science Advances).
Une autre étude publiée il y a quelques jours par des chercheurs de l’école de santé publique de l’Université John Hopkins a, elle aussi, clairement montré que les personnes qui veillent à adopter des pratiques de prudence sociale ont beaucoup moins de risque de contracter le coronavirus. Selon ce travail, qui a analysé le comportement de 1 000 habitants du Maryland, les participants ayant pris les transports en commun au moins trois fois dans les deux semaines précédant l’étude avaient quatre fois plus de risques d’être contaminés par le SARS-CoV-2, en comparaison aux personnes n’ayant pas utilisé ces moyens de transport. Quant à celles qui avaient fréquenté un lieu de culte, elles voyaient leurs risques d’infection multipliés par seize…
Citons encore une autre étude américaine, très intéressante, qui montre que les personnes portant des lunettes au moins huit heures par jour, seraient cinq fois moins susceptibles de recevoir un diagnostic de Covid-19 que les autres, simplement parce qu’elles se toucheraient moins souvent les yeux avec leurs mains contaminées (Voir JAMA).
Heureusement, nous pouvons tous constater que, depuis quelques semaines, on assiste à un salutaire basculement dans les comportements individuels observables dans nos villes et villages : le port du masque, qui était déjà devenu la règle dans tous les espaces clos, a en effet également progressé à l’extérieur, dans les endroits fréquentés, et l'on doit s’en réjouir. Néanmoins, cet effort reste insuffisant pour endiguer la nouvelle flambée de contamination par le Covid-19 qui touche certaines métropoles, comme celle de Lyon. C’est pourquoi les mesures annoncées le 21 septembre par le Préfet du Rhône : extension et durcissement du port du masque à l’extérieur, meilleur respect des règles de distanciation sociale dans les cafés et les restaurants et limitation des visites en EHPAD, me semble tout à fait justifiées.
Je voudrais également dire un mot sur l’échec très instructif de l’application numérique « Stop-Covid » qui devait favoriser le traçage des personnes qui ont été en contact avec un malade du Covid, et n’a pas trouvé son public. Cet échec cinglant montre qu’à présent, on ne peut plus imposer à nos concitoyens des mesures de contrôle, même pour de très louables motifs, sans réaliser un vrai travail d’information et de pédagogie et apporter toutes les garanties nécessaires en matière de respect de la vie privée. Si cette application n’a pas rencontré l’adhésion massive de nos concitoyens, ce n’est pas par manque de civisme, mais sans doute parce qu'elle a été lancée de manière précipitée, et n’a pas été accompagnée d’un travail suffisant d’explication de la part des pouvoirs publics. Et ce n'est pas la récente révélation du Premier Ministre avouant qu'il n'avait pas téléchargé « Stop-Covid » qui améliorera la situation... En revanche, chez nos voisins allemands, où ce travail a été fait, l’application équivalente (Corona-Warn-App) a fait l’objet d’un large consensus social, avec plus de 18 millions de téléchargements.
Nous ne devons pas rester sur cet échec, car il est impensable de ne pas exploiter toute la puissance qu’offrent les outils numériques et robotiques pour mieux prévenir et combattre cette pandémie. Mais j’invite nos responsables politiques à tirer les leçons de ce refus et à associer plus étroitement tous les acteurs locaux, sociaux et associatifs, dans le développement des nouveaux outils numériques dont nous avons absolument besoin pour combattre cette redoutable pandémie.
Parmi les nombreuses avancées technologiques récentes qui méritent d’être évoquées, on peut citer le projet du MIT et de la start-up Ava Robotics, qui a développé un robot autonome capable de désinfecter les surfaces et l’air des bâtiments à l’aide de rayons UVC. Il peut, selon ses concepteurs, parcourir une surface de 400 m² en une demi-heure et surtout, neutraliser au moins 90 % des particules de coronavirus. En France, une entreprise de Cholet, Octopus Robots, a conçu et développé un robot qui rencontre un grand succès. Il diffuse des produits désinfectants aux normes sanitaires et alimentaires, et permet un retour rapide et sécurisé du public après désinfection.
Mais la pandémie de Covid-19 va également accélérer la généralisation des robots autonomes de services qui font leur apparition dans les hôtels, les commerces ou encore les restaurants. En Corée du Sud, l’opérateur de télécommunications KT a ainsi développé son « AI Serving Robot », un étonnant robot-serveur autonome, capable d’évoluer avec une grande précision dans les restaurants (et d’éviter les obstacles imprévus), pour venir apporter, en toute sécurité, la commande à la table des clients.
La pandémie a également accéléré l’usage de « robots-convoyeurs », tels que ceux actuellement expérimentés par la Poste, pour livrer les colis au domicile des clients. Mais ces robots, qui ont la forme de coffres à roulettes restent limités dans leurs actions et leur capacité de mobilité ; c’est pourquoi une nouvelle génération de robots autonomes, humanoïdes ceux-là, devrait prochainement sortir des laboratoires. Ces robots bipèdes, comme le Digit, conçu par Agility Robotics, seront capables d’évoluer dans des environnements complexes et changeants pour assister ou remplacer l’homme dans une multitude de tâches pénibles ou dangereuses. Et, dans ce contexte de pandémie durable au Covid-19, on peut parier que leur généralisation sera bien plus rapide que prévue.
En Ouganda, une entreprise, Simi, a mis au point un smartphone bon marché doté d’un capteur infrarouge, qui permet de mesurer de manière fiable et rapide la température du corps et pourrait s’avérer un outil précieux de prévention contre le Covid-19, mais également contre d’autres maladies, comme la malaria.
Dans cette panoplie technologique qui commence seulement à se déployer, n’oublions pas les technologies spatiales, appelées à jouer un rôle-clé dans la détection et la prévision des épidémies. Selon la chercheuse Rita R. Colwell, professeure à l'université du Maryland, College Park, « La puissance des modèles informatiques, combinée à la couverture satellitaire permettent à présent de prédire de manière fiable le niveau de risque de voir émerger une épidémie dans telle ou telle région ; je suis pour ma part convaincue que la prochaine épidémie de COVID-19 sera prédite par satellite ».
S’agissant de la désinfection des surfaces, sols et zones de contact en milieu hospitalier, de récentes recherches menées à l’Université libre de Bruxelles ont montré que la technologie du « plasma froid » (qui repose sur l’utilisation d’un gaz fortement ionisé) permet de tuer de manière rapide, efficace et durable les virus et même de rendre certaines surfaces métalliques elles-mêmes virucides. Ce nouvel outil pourrait donc permettre d’améliorer sensiblement le niveau de désinfection et d’élimination du coronavirus dans les établissements de soins, et plus largement dans les bâtiments publics.
Je suis persuadé que nous possédons les moyens humains, économiques, technologiques, pour parvenir, dans un cadre démocratique et collaboratif, à maîtriser cette pandémie qui risque fort de devenir saisonnière et sera probablement durable. Nous allons devoir apprendre à vivre avec ce virus, en refondant sur de nouvelles bases nos modèles économiques, sociaux et démocratiques qui doivent plus que jamais favoriser à tous les niveaux la recherche et l’innovation et replacer au cœur de leur finalité et de leur fonctionnement l’intérêt général, la solidarité générationnelle et sociale et le bien commun.
René TRÉGOUËT
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
e-mail : tregouet@gmail.com
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