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De nouveaux algorithmes quantiques pour résoudre des équations non linéaires
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Les mathématiques peuvent prédire facilement l'évolution de processus simples, comme l'écoulement de l'eau d'un robinet. Mais dans les systèmes non linéaires, des éléments peuvent influer sur eux-mêmes : lorsque l’air circule autour des ailes d’un avion, le flux d’air modifie les interactions moléculaires, qui modifient en retour le flux d’air, etc. Ces boucles de rétroaction peuvent engendrer des phénomènes chaotiques : de petits changements dans les conditions initiales conduisent à un comportement radicalement différent par la suite, ce qui rend les prédictions presque impossibles – quelle que soit la puissance de l’ordinateur utilisé.
« C’est en partie pour cette raison qu’il est difficile de prédire la météo ou de comprendre le comportement des flux complexes de fluides », explique Andrew Childs, chercheur en information quantique à l’Université du Maryland. « Certains problèmes de calcul ardus pourraient être résolus si on arrivait à comprendre ces dynamiques non linéaires ».
Cela pourrait bientôt être possible. Dans des études indépendantes publiées en novembre 2020, deux équipes – l’une dirigée par Andrew Childs, l’autre au MIT (l’Institut de technologie du Massachusetts) – ont décrit de nouveaux outils qui devraient permettre à des ordinateurs quantiques de mieux modéliser la dynamique non linéaire.
Les ordinateurs quantiques tirent profit de phénomènes quantiques pour effectuer certains calculs plus efficacement que leurs homologues classiques. Il existe déjà des algorithmes exploitant ces capacités, qui pourraient venir à bout d’équations différentielles linéaires complexes de façon exponentiellement plus rapide que leurs homologues classiques. Les chercheurs ont longtemps espéré qu’ils pourraient également maîtriser les problèmes non linéaires avec des algorithmes quantiques astucieux.
Le problème est que la physique qui sous-tend les ordinateurs quantiques est elle-même fondamentalement linéaire et donc peu adaptée au traitement des systèmes non-linéaires. « C’est comme apprendre à une voiture à voler », déclare Bobak Kiani, coauteur de l’étude du MIT. Depuis plus de dix ans, les chercheurs en information quantique tentent d’utiliser des équations linéaires comme clés pour débloquer les équations différentielles non linéaires.
Une percée a été réalisée en 2010, lorsque Dominic Berry, aujourd’hui à l’Université Macquarie, à Sydney, a construit le premier algorithme permettant de résoudre des équations différentielles linéaires de façon exponentiellement plus rapide sur des ordinateurs quantiques que sur des ordinateurs classiques. Puis il s’est intéressé aux équations différentielles non linéaires. « Nous avions travaillé sur ce sujet », affirme Dominic Berry. « Mais nos résultats étaient très, très inefficaces ».
L’astuce consiste donc à trouver un moyen de convertir mathématiquement un système non linéaire en un système linéaire. Les deux nouvelles approches imitent ainsi la non-linéarité par un ensemble plus digeste d’approximations linéaires, bien que leurs méthodes varient considérablement. L’équipe d’Andrew Childs a utilisé la linéarisation de Carleman, une technique mathématique passée de mode depuis les années 1930, pour transformer des problèmes non linéaires en un ensemble d’équations linéaires.
Malheureusement, cet ensemble d’équations est infini. Les chercheurs doivent alors déterminer où ils peuvent s’arrêter dans la liste pour obtenir une approximation suffisante. « Est-ce qu’on prend les dix premières équations ? Les vingt premières ? » demande Nuno Loureiro, physicien des plasmas au MIT et coauteur de l’étude du Maryland. L’équipe a prouvé que, pour une classe particulière de non-linéarité, leur méthode permettait de tronquer cette liste infinie et d’aboutir à la résolution des équations.
L’article des chercheurs du MIT propose une approche différente, en modélisant tout problème non linéaire comme un condensat de Bose-Einstein. Il s’agit d’un état de la matière à très basse température où toutes les particules sont liées dans le même état quantique. Les particules influent les unes sur les autres dans des boucles de rétroaction caractéristiques de la non-linéarité.
L’algorithme du MIT imite ce phénomène non linéaire sur un ordinateur quantique, en utilisant la statistique de Bose-Einstein pour relier la non-linéarité et la linéarité. Ainsi, en imaginant un pseudo-condensat de Bose-Einstein adapté à chaque problème non linéaire, cet algorithme en déduit une approximation linéaire exploitable. « Donnez-moi votre équation différentielle non linéaire préférée, je construirai un condensat de Bose-Einstein qui la simulera », résume Tobias Osborne, chercheur en informatique quantique à l’Université Leibniz, à Hanovre, qui n’a participé à aucune des deux études. « C’est une idée que j’ai vraiment aimée ».
Les chercheurs ont maintenant deux façons distinctes d’aborder les problèmes non linéaires avec les ordinateurs quantiques. Selon Dominic Berry – qui n’a participé à aucun des deux articles –, « leur importance réside dans le fait qu’ils montrent qu’il est possible de tirer parti de ces méthodes pour obtenir un comportement non linéaire ». « Ce qui est intéressant dans ces deux articles, c’est qu’ils ont mis en évidence un régime où, compte tenu de certaines hypothèses, il existe un algorithme efficace », juge pour sa part Mária Kieferová, chercheuse en informatique quantique à l’Université de technologie de Sydney.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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