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Les neurones de l'argent
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La monnaie est une invention récente, à l'échelle de l'évolution des espèces. Alors que notre cerveau a eu le temps de s'adapter à certains dangers ou prédateurs qui le côtoient depuis des millions d'années (araignées ou serpents), on considère qu'il n'a pas eu le temps de se doter de structures innées spécifiques à la reconnaissance de l'argent.
Et pourtant, Catherine Tallon-Baudry, de l'Institut du cerveau et de la moelle, et ses collègues ont montré que le cerveau présente une activité bien particulière quand on lui présente une pièce de monnaie, et ce indépendamment du fait que cette pièce ait été ou non vue ou utilisée préalablement. Comme si le concept d'argent avait trouvé un ancrage dans certains circuits neuronaux, que l'on nomme la voie visuelle ventrale.
Dans leurs expériences, C. Tallon-Baudry et ses collègues ont présenté à des volontaires des pièces de monnaie connues, ayant ou non une valeur aujourd'hui (euros et francs), et également des pièces inconnues ayant ou non une valeur (dollars canadiens et marks finlandais). Ils ont constaté que le fait de représenter une valeur monétaire, indépendamment de la familiarité de la monnaie, active la voie visuelle ventrale. C'est le cas de l'euro et du dollar canadien. En revanche, une pièce sans valeur actuelle, qu'elle soit familière ou non, ne l'active pas : c'est le cas du franc ou du mark finlandais.
Ces expériences montrent que le cerveau s'est adapté à une donnée culturelle (économique et sociale), la monnaie, en établissant un moyen de catégorisation régulière et identique d'une personne à l'autre de cette donnée culturelle. C'est aussi ce qui s'est passé lors de l'invention de l'écriture : avant l'apparition des premiers symboles écrits, aucune zone du cerveau n'avait évolué en fonction d'une quelconque contrainte de sélection intégrant les symboles écrits. Malgré tout, le cerveau a mobilisé des zones bien précises pour traiter l'écrit, et ces aires cérébrales sont aujourd'hui bien identifiées.
D'autres symboles culturels, représentant un concept nouveau et distinct comme ce fut jadis le cas de la monnaie ou de l'écriture, pourraient à l'avenir « recruter » des zones cérébrales qui n'avaient certainement pas été « conçues » à cette fin. Cela pourrait être le cas de l'arobase qui revêt une valeur particulière dans le monde d'Internet, ou du « hashtag », symbole « dièse » sur un clavier d'ordinateur, de plus en plus utilisé sur les pages Twitter pour attribuer une fonction générique à un mot-clé lors d'une recherche. L'effet du hashtag est de transformer un mot en « mot-clic » qui entraîne l'affichage de toutes ses occurrences sur d'autres pages Twitter ou Internet. La valeur conceptuelle d'un mot-clic étant très différente d'un mot simple, il est probable que chez les internautes en faisant un usage régulier, une zone du cerveau prenne en charge ce nouveau concept. Mais il faudrait d'autres expériences pour s'en assurer.
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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