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Maladie de Parkinson et MICI : un lien génétique entre ces maladies chroniques

Des chercheurs américains de l'Icahn School of Medicine at Mount Sinai (New York) ont confirmé  un lien génétique entre les maladies inflammatoires de l’intestin et la maladie de Parkinson. Cette découverte ouvre la voie à des traitements innovants. Les maladies inflammatoires de l’intestin et la maladie de Parkinson sont des affections chroniques susceptibles de partager des processus physiopathologiques communs. De plus en plus de preuves suggèrent en effet un lien entre ces troubles a priori sans rapport. Grâce à une vaste analyse génomique, des chercheurs de l’École de médecine du Mont Sinaï ont effectivement identifié plusieurs facteurs génétiques communs aux deux maladies. Cette découverte ouvre la voie à des traitements innovants.

Les maladies inflammatoires de l’intestin (MII) désignent les maladies qui affectent principalement le tractus gastro-intestinal. Il s’agit notamment de la maladie de Crohn et de la colite ulcéreuse. Selon l’Inserm, ces maladies concernent plus de 200 000 personnes en France. Elles résultent d’une dérégulation du système immunitaire. La maladie de Parkinson (MP), qui concerne plus de 270 000 Français, est l’un des troubles neurodégénératifs les plus courants. La maladie se caractérise par la destruction des neurones à dopamine. Elle se manifeste essentiellement par des tremblements, des mouvements lents et une forte rigidité des membres. Des preuves émergentes suggèrent un lien entre ces deux troubles, indiquant des facteurs de risque partagés et une physiopathologie sous-jacente cohérente avec l’hypothèse de « l’axe intestin-cerveau », notent les chercheurs.

Une méta-analyse récente, impliquant 12 millions de patients issus de 9 études observationnelles, a par exemple montré que la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse sont associées à un risque accru de diagnostic de MP. De plus, les thérapies anti-inflammatoires proposées aux patients atteints de MII ont tendance à réduire significativement le risque de MP. Ces résultats suggèrent l’implication de processus médiés par l’inflammation et/ou de facteurs génétiques potentiellement partagés par les MII et la MP. Les scientifiques ont porté leur intérêt sur le gène LRRK2 (leucine-rich repeat kinase 2). Des études ont montré en effet que les mutations de ce gène provoquent des effets communs sur le risque de maladie de Crohn et de MP. Les variantes qui entraînent une activité accrue de LRRK2 sont associées à un risque élevé de développer à la fois la MP et la maladie de Crohn. À l’inverse, une mutation désactivante de LRRK2 confère une protection contre la maladie de Crohn et la MP.

Cependant, chaque trouble correspond à des variantes spécifiques du gène LRRK2. Par exemple, la mutation G2019S est le risque génétique majeur de la MP, alors que N2081D est considéré comme un risque de maladie de Crohn, précise l’équipe. L’une de ces variantes ou d’autres variantes de LRRK2 peuvent-elles entraîner une comorbidité MII-MP ? Les chercheurs se sont penchés sur la question. À partir de données de séquençage provenant des biobanques danoise et britannique, et de la biobanque BioMe du Mont Sinaï, ils ont étudié l’effet des mutations faux-sens de LRRK2 dans différentes conditions. Les données concernaient des individus atteints de la MP et/ou d’une MII. Elles ont offert aux chercheurs la possibilité d’explorer des variantes génétiques rares à fort impact. Ils ont également pu identifier de nouveaux gènes et voies biologiques qui contribuent à la comorbidité MII-MP.

Des techniques d’analyse génomique avancées ont révélé des associations significatives entre les variantes du gène LRRK2 et la cooccurrence des MII et de la MP. L’équipe a notamment utilisé le "regroupement d’hétérogénéité basée sur le réseau" (ou NHC, pour Network-based Heterogeneity Clustering). Cette méthode est efficace pour la découverte de gènes hébergeant des variantes vraisemblablement délétères au sein de petites cohortes.

L’analyse a identifié la mutation G2019S comme étant associée de manière significative à la comorbidité MII-MP. Cette variante augmente le risque de MP et des deux sous-types de MII. La variante N2081D, connue pour augmenter le risque de maladie de Crohn, était elle aussi associée à la comorbidité MII-MP. Les chercheurs rapportent avoir identifié 11 variantes candidates supplémentaires de LRRK2 susceptibles de contribuer à cette comorbidité. Les chercheurs ont identifié 14 gènes candidats, qui présentent tous des fonctions pertinentes pour la pathogenèse des MII et de la maladie de Parkinson.

En examinant la cohorte MII-MP, ils ont confirmé ou découvert l’implication de certains gènes dans la MP et les MII. Parmi eux, IL10RA, un gène codant pour une sous-unité du récepteur de l’interleukine-10. Des variantes de ce gène entraînent une MII très précoce. Des déficiences dans la production et la signalisation de l’IL10 interviennent dans certaines maladies neurodégénératives, y compris la MP. Après LRRK2 et IL10RA, le troisième gène le plus significatif était DHRS2. Ce gène code pour une enzyme impliquée dans le métabolisme lipidique. Leur analyse a également révélé plusieurs voies liées à l’immunité, à l’inflammation et à l’autophagie (le système de recyclage cellulaire du corps), impliquées dans les deux conditions. « Ces résultats confirment le lien potentiel entre le dérèglement immunitaire, l’inflammation intestinale et les symptômes moteurs observés dans la maladie de Parkinson et sont conformes aux résultats précédents concernant l’incidence réduite de la maladie de Parkinson chez les patients atteints de MII recevant un traitement anti-inflammatoire », écrivent les auteurs de l’étude.

Ces travaux soulignent une nouvelle fois l’importance de la recherche génétique dans le développement d’approches de médecine personnalisée. On sait à présent que certains facteurs génétiques communs sont à l’origine des MII et de la MP. L’identification et la compréhension de ces facteurs pourraient conduire à des thérapies plus adaptées, visant simultanément les deux affections. « Notre recherche relie non seulement génétiquement ces deux maladies, mais ouvre également la voie à de nouvelles formes de traitement, et potentiellement à des stratégies de prévention, qui pourraient alléger le fardeau de ces maladies sur les patients », a déclaré le Docteur Meltem Ece Kars, qui a dirigé l’étude.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

IPM

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