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La main américaine sur le commerce électronique
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Sur la planète du commerce électronique, la France a bien du mal à garder son rang de quatrième puissance industrielle avec environ 5 sites Web en France pour 1.000 habitants contre 10 en Allemagne et 90 aux Etats-Unis. Question équipement informatique des foyers, le rapport serait de 1 à 3 entre l'Hexagone et l'Amérique du Nord . " En France les lourdeurs administratives ne facilitent ni la création de nouveaux intermédiaires ni la remise en cause des emplois dans la chaîne de distribution classique ", estime Jean-Claude Guez, associé d'Andersen Consulting. Le cabinet américain n'y va pas par quatre chemins : " La France et l'Europe ont deux ou trois ans pour se réveiller avant que les consommateurs jeunes et riches ne remplissent leurs caddies virtuels de produits américains et asiatiques ". Bigre ! Le propos peut paraître alarmiste, voire grossièrement libéral. Pourtant il reflète bien les formidables enjeux du commerce électronique et l'ébullition qui s'est emparée des Etats-Unis, alors que les grandes entreprises françaises font preuve tout au plus d'un intérêt poli pour le sujet. En matière d'enchères, par exemple, les transactions électroniques vont plus vite que la loi. Alors qu'il est prévu en France que seuls les notaires et les commissaires-priseurs français - qui perdront leur monopole l'année prochaine - sont autorisés à pratiquer ce genre de vente, les internautes français ont pu il y a quelques semaines acquérir des Paris-Berlin ou des allers retours Paris-Miami pour quelques centaines de francs. Il suffisait de participer aux premières enchères électroniques hexagonales portant sur des billets d'avion. Aux Etats-Unis, où la réservation de billets sur Internet a augmenté de 301 % au cours des deux derniers mois , Priceline, lancé le 6 avril 1998, s'est déjà hissé dans le top 10 des vendeurs de tickets de compagnie aérienne. Le principe est simple : l'internaute donne sa destination et le prix maximum qu'il est prêt à payer pour s'y rendre. Pour remplir leurs avions, les compagnies aériennes adhérentes du service communiquent leur offre et les discounts qu'elles sont prêtes à réaliser et Priceline rapproche les uns et les autres. Trois mois après son lancement, 40.000 billets avaient déjà été vendus sur ce site. Priceline envisage maintenant d'exporter son système en Europe. Le secteur automobile n'est pas en reste avec Auto-By-Tel qui a réussi en quelques années à bouleverser la mentalité de millions de consommateurs dans un pays où le cylindre fait pourtant office de culture. 15 % des 22.000 revendeurs automobiles du pays sont désormais adhérents du site en ligne, reversant en plus de l'abonnement (2.500 dollars par mois) un pourcentage sur chaque voiture vendue. En 1997 aux Etats-Unis, 11 % des voitures neuves ont été vendues sur Internet, selon le cabinet JD Power. Et cette proportion devrait s'élever à 16 % en 1998 et 50 % en l'an 2000. Selon Carat Interactive, les constructeurs français ont commencé à réagir cette année en augmentant sensiblement leur volume de publicité sur le Net. Mais, au-delà de cette réaction défensive, certaines grandes marques françaises commenceraient déjà à s'interroger sur le rôle des concessionnaires, sachant qu'elles ont à leur disposition de gigantesques bases de données sur leurs clients. Aux Etats-Unis, l'un des premiers supermarchés virtuels a été lancé par CUC, leader sur le marché du marketing direct. A travers les centaines de milliers de produits qu'il propose à " prix cassés ", Netmarket, qui compte 400.000 abonnés (49 dollars par mois), revendique de couvrir 20 % des besoins moyens d'un ménage américain. En France, quand Continent propose une vingtaine de produits à vendre sur son site, Carrefour et Monoprix ne laissent d'autre choix à l'internaute que de faire du... lèche-vitrine. A l'heure du commerce électronique mondial, Leclerc dispose d'un site en ligne qui ne lie que sur Cannes alors que Hyper U a jeté son dévolu sur Parthenay et sa campagne environnante (il est possible de se faire livrer jusqu'à 8 kilomètres autour de la ville). Seul Casino a décidé d'offrir aux Français de véritables gondoles électroniques. " C'est très joli tout ça, mais nous réagirons quand le marché sera mûr ", rétorque-t-on dans la plupart des entreprises françaises. Propos à courte vue. Car en réalité les Américains ont déjà remporté - faute de combattants - une première bataille qui pourrait s'avérer décisive. En effet, au-delà des sites thématiques - du livre au supermarché -, le modèle du Net penche aujourd'hui vers des réseaux mondiaux couvrant le monde entier, les désormais fameux " portails ". Netscape, Yahoo, Infoseek... Toutes les stars du Net ont opéré leur mutation, aboutissant ni plus ni moins à créer de gigantesques réseaux de distribution à l'échelle de la planète.
(La Tribune/30/10/98)
http://www.latribune.fr/tribjour/indextri.html
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