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L’exposition à des médicaments anticholinergiques augmente le risque de démence
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On estime à 47 millions le nombre de personnes démentes à travers le monde. À côté des facteurs de risque bien connus, la prise de médicaments anticholinergiques (parmi lesquels certains antihistaminiques, antidépresseurs, des produits contre les troubles gastro-intestinaux ou vésicaux) représente un facteur de risque distinct, mais modifiable, bien que, jusqu’à maintenant, l’on ne sache pas avec précision si leur consommation sur une longue durée accroît le risque de démence.
C’est là l’intérêt d’une vaste étude, menée par CAC Coupland et coll. afin de préciser l’association possible entre traitements anticholinergiques et risque de démence, chez des sujets âgés d’au moins 55 ans, à partir d’une large cohorte représentative de la population britannique, en analysant la prescription de différents types d’anticholinergiques jusqu’à 20 ans avant le diagnostic de démence.
Il s’agissait d’une étude cas-témoin intégrée, issue du QRearsch qui est une banque de données informatiques regroupant plus de 30 millions d’individus, suivis prospectivement pour les soins médicaux de base.
Ont été inclus tous les sujets de 55 ans ou plus, du 1er janvier 2004 au 31 janvier 2016, non déments à l’entrée dans l’étude. Le nombre de patients déments a ensuite été noté, tout comme celui des sujets ayant reçu une un inhibiteur de l’acétylcholine estérase (donépézil, galantamine, mémantine, rivastigmine,…).
Les démences spécifiques liées à une maladie de Huntington, de Parkinson, de Creutzfeldt-Jakob ou au VIH ont été exclues, tous comme les patients parkinsoniens, atteints d’une maladie de Huntington ou d’une sclérose en plaques. Chaque sujet dément a été apparié à 5 cas contrôles indemnes, en tenant compte de l’âge, du sexe, des soins courants et de la date. L’étude a couvert une période d’au moins 10 ans soumise à l’exposition potentielle aux anticholinergiques référencés. Les médicaments en cause, soit 50, ont été identifiés selon les critères BEER de l’American Geriatric Society 2012.
Le paramètre essentiel analysé a été la durée totale de l’exposition aux médications anticholinergiques, avec calcul de la dose totale standardisée journalière par patient (TSDD), pour chaque type de médicaments (antihistaminiques, antidépresseurs, antivertigineux, anti-émétiques, antiparkinsoniens, antipsychotiques, antimuscariniques agissant sur la vessie, relaxants musculaires, antispasmodiques, anti-arythmiques, antiépileptiques et bronchodilatateurs).
Plusieurs covariables ont été incluses dans l’analyse dont l’indice de masse corporelle, les consommations alcoolique et tabagique, les principales comorbidités, l’origine ethnique et les autres médicaments utilisés. L’exposition aux anticholinergiques a été classée en 5 catégories suivant la TSDD : 0, de 1 à 90, de 91 à 365, de 366 à 1 095 et au-delà de 1 095 TSDD, pour 11 types différents de médicaments. En outre, des analyses par sous-groupes ont été conduites selon le sexe et le type de démence ainsi que des analyses de sensibilité.
La cohorte de base comprenait 3 638 582 individus, âgés de 55 à 100 ans. Durant un suivi total de 20 005 739 personnes-années, 128 517 démences ont été diagnostiquées. Après exclusions diverses, 58 769 cas ont été retenus, appariés à 225 574 témoins. L’âge moyen, lors du diagnostic, était de 82,4 ans ; 63,1% des patients étaient de sexe féminin. Globalement, 60,1 % des démences retenues étaient de type alzheimérien, 36,3 % de type vasculaire et 3,6 % d’autres types.
Dans les années précédentes, allant de 1 à 11 ans, 56,6 % des malades déments (n= 33 253) et 51 % des témoins (n= 115 094) avaient eu une prescription d’au moins un anticholinergique. Il s’agissait le plus souvent d’antidépresseurs (dans, respectivement, 27,1 % et 23,3 % des observations), d’antivertigineux ou d’antihistaminiques (23,8 % et 21,7 %) ou de médicaments agissant sur la motricité vésicale (11,7 % et 8,3 %).
Une augmentation significative du risque de démence suivant la prise d’antidépresseurs anticholinergiques a été mise en évidence (OR ajusté : 1,2 ; IC : 1,24-1,34). Il en est allé de même avec les médicaments antiparkinsoniens (OR ajusté : 1,52 ; IC : 1,16-2,00), les antipsychotiques (OR ajusté : 1,70 ; IC : 1,53-1,90), les muscariniques actifs sur la motricité de la vessie (OR ajusté : 1,65 ; CI : 1,56-1,75) et les antiépileptiques (OR ajusté à 1,39 ; IC : 1,22-1,57) pour une TSDD conséquente, au-delà de 1 095. A contrario, aucune augmentation significative n’a été trouvée avec les antihistaminiques, les myorelaxants, les antispasmodiques, les anti-arythmiques et les bronchodilatateurs antimuscariniques.
Au total, cette large étude cas-témoin démontre que le risque de démence est accru en cas de prise régulière de certains médicaments anticholinergiques. Il est aussi plus élevé avant l’âge de 80 ans et en cas de démences vasculaires. On trouve une augmentation de 50 % du risque quand l’exposition totale dépasse 1 095 TSDD sur une période de 10 ans, ce qui équivaut à une prise quotidienne pendant 3 ans d’un seul anticholinergique puissant, à la dose minimale recommandée.
En conclusion, cette étude renforce la preuve qu’il existe un risque de démence associée à la prise régulière d’anticholinergiques. À côté de leurs bénéfices potentiels, les effets secondaires de ces médicaments doivent donc être pris en considération et des traitements alternatifs proposés, quand ils sont possibles. Ces résultats renforcent enfin l’importance de réduire le recours aux anticholinergiques aux âges moyens et avancés de la vie.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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