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L'expansion de la nouvelle économie menacée par la pénurie croissante de matière grise

La pénurie d'ingénieurs, déjà sensible en début d'année, s'est encore aggravée au deuxième trimestre. « Il manque au moins 10.000 informaticiens en France. Et on ne les trouvera pas », assure François Dufaux, président du Syntec Informatique, organisme qui regroupe la quasi-totalité des sociétés de services dans l'Hexagone. Si ce manque de ressources n'est pas propre à la France, la loi sur les 35 heures semble l'avoir aggravé. Le constat revient comme une antienne chez Cap Gemini, Atos, Sema Group ou GFI Informatique. En attendant, le Syntec renouvelle ses recommandations : tenter de délocaliser le plus possible, et confier des tâches à la sous-traitance. « Il existent de très bons ingénieurs en Tunisie ou au Maroc. Utilisons-les », encourage François Dufaux. Se tourner vers l'étranger ? De toute façon, on retrouve les mêmes problèmes en Espagne, en Allemagne, en Italie ou aux Etats-Unis, qui avouent un déficit de 800.000 informaticiens. En Allemagne, l'« urgence économique » a d'ailleurs poussé le chancelier Gerhard Schröder à adopter un décret permettant le déblocage immédiat de 10.000 permis de travail pour encourager l'arrivée d'informaticiens étrangers. En France, les SSII rivalisent d'imagination pour attirer seniors et jeunes diplômés, quitte à aller les chercher, comme Sema Group, dans des centres de recherche napolitains. Plan de guerre pour les uns, plan marketing pour les autres, le recrutement ne se limite plus au soin apporté par la SSII pour soigner son image ou faire miroiter de grands projets. « Tous les moyens sont utilisés pour se faire connaître : presse, Internet, télévision. Tous les secteurs sont concernés : la distribution, les banques, les assurances, l'industrie, les services, le tourisme... Selon le cabinet d'analyse IDC, le chiffre d'affaires généré par le commerce électronique devrait atteindre 6,7 milliards d'euros en France cette année. Or, le commerce électronique requiert de la part de l'entreprise des mutations technologiques, organisationnelles, marketing ou commerciales. Les prévisions de croissance des investissements dédiés aux technologies de l'information et de la communication illustrent bien la frénésie actuelle. Les dépenses en moyens informatiques, télécoms et multimédias vont passer de 576,5 milliards de francs (87,9 milliards d'euros) cette année à 1.106 milliards en 2010, soit un doublement sur la décennie, estime le cabinet d'études Pierre Audoin Conseil (PAC). Corollaire de cette adhésion au phénomène Internet : le besoin crucial de spécialistes. PAC chiffre à 1,1 million le nombre de spécialistes dont le marché aura besoin en 2010, « soit environ 400.000 créations nettes d'emplois et une croissance de 53 % sur la période ». Finalement, et en prenant en considération les départs en retraite, les besoins dans l'Hexagone seront d'environ 20.000 ingénieurs par an, pour une promotion de 7.000 diplômés par an. « La pénurie d'ingénieurs est dès aujourd'hui clairement ressentie comme un frein au développement de nombreuses entreprises, en particulier dans le segment des start-up, moteur de la nouvelle économie », souligne cette étude. Elle ajoute que « la poursuite de la croissance économique est conditionnée par la capacité des pouvoirs publics à accroître le nombre d'ingénieurs diplômés dans les technologies de l'information » Pendant des lustres, les pays développés ont pu soutenir leur rythme de croissance en important massivement de la main-d'oeuvre peu qualifiée. Le changement de décor n'en est que plus spectaculaire. Désormais, c'est d'informaticiens, de programmateurs, de mathématiciens, de spécialistes des hautes technologies en tout genre que les grandes économies mondiales ont besoin pour faire face à l'explosion, décidément sans exemple, des industries de pointe. La France évalue ses besoins non satisfaits, s'agissant des seuls informaticiens, à quelque 10.000 spécialistes. L'Allemagne révise sa politique d'immigration pour les mêmes raisons. Il n'est pas jusqu'aux Etats-Unis qui n'aient décrété un véritable état d'urgence technologique. Le Congrès et la présidence sont en train de se mettre d'accord pour assouplir les règles d'immigration afin de combler le manque de spécialistes hautement qualifiés évalué à quelque 300.000 personnes ! Un projet de loi, faisant passer de 115.000 à 200.000 par an le nombre des visas d'immigration pour les travailleurs étrangers du secteur technologique devrait ainsi être approuvé avant la fin de l'année. Voilà un beau sujet de réflexion pour tous ces Etats dits avancés, dont aucun n'a su prendre la mesure, par un système scolaire et universitaire approprié, d'un phénomène qui pourrait bien limiter sérieusement l'expansion de leurs économies. Et sérieuse raison de préoccupation aussi pour les économies émergentes, qui ont souvent formé leurs élites à grands frais, et qui risquent aujourd'hui de les voir fuir sous d'autres cieux pour s'y construire un avenir plus assuré que chez elles.

La Tribune :

http://www.latribune.fr/Tribune/Online.nsf/Articles/20000703144014?OpenDocument

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