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L'espace à portée de plasma

Les yeux levés vers le ciel, avec un rêve : la conquête du système solaire ! À travers le monde, des spécialistes s'ingénient à faire voler, toujours plus loin, sondes et vaisseaux spatiaux. Les procédés se perfectionnent pour des missions interplanétaires sur des centaines de millions de kilomètres. Et certaines innovations amorcent déjà l'exploration spatiale de demain. Pour preuve, le brevet déposé par le Laboratoire de physique et technologie des plasmas1 (LPTP) de Palaiseau, concernant un système novateur de propulsion plasmique, baptisé Pegases2. La nouveauté ? « L'utilisation de gaz électronégatifs, plutôt que l'habituelle matière chargée positivement, en guise de carburant », répond Pascal Chabert, chercheur CNRS au LPTP. Avec, au final, un gain en puissance et l'économie d'une étape dans le fonctionnement du moteur. Explications.

Dans l'espace, la gravitation terrestre est négligeable. La propulsion d'engins requiert donc une poussée modeste mais une forte impulsion spécifique : c'est-à-dire une motorisation qui éjecte à forte vitesse un flux continu de carburant. Initiée au milieu du xxe siècle, la propulsion par plasma a montré toute son efficacité l'an dernier, avec la sonde lunaire de l'Agence spatiale européenne (ESA) Smart-1. Ses qualités sont nombreuses. Un exemple ? Elle consomme cinq fois moins qu'une propulsion chimique classique. Cette économie de gaz - et donc de poids - permet une poussée constante sur de très longues périodes.

Idéale donc pour le changement d'orbite ou pour la propulsion de croisière des sondes spatiales. Mais voilà. Jusqu'ici, les procédés - propulseurs à grille ou de type Hall - n'utilisaient que de la matière chargée positivement pour se propulser. Pour cela, le gaz (souvent du xénon) subit trois transformations avant d'être éjecté : première étape, formation d'un plasma par ionisation du gaz. S'ensuit une accélération des ions positifs par un champ électrique. Enfin, ce jet d'ions est neutralisé par des électrons injectés en aval de l'accélération pour éviter que l'engin ne s'électrise (à la manière d'une voiture qui envoie de petites décharges lorsque l'on touche la carrosserie).

Les atouts de l'innovation brevetée par le LPTP ? Ce système utilise un gaz « électronégatif » (iode ou oxygène), c'est-à-dire capable de capter les électrons libres, ce qui va notamment permettre de sauter cette dernière étape de neutralisation. « Lors de l'ionisation, un faisceau d'ions positifs est généré. Les électrons arrachés sont directement captés pour former d'autres ions, négatifs cette fois. Ces deux faisceaux simultanés, l'un positif et l'autre négatif, augmentent la poussée et rendent inutile tout autre processus de neutralisation », confirme Pascal Chabert. Ce phénomène ainsi que la séparation des deux faisceaux d'ions ont déjà été démontrés au LPTP. Pour ce qui est des manières de les accélérer, le procédé breveté envisage soit un système de grilles polarisées, soit une tuyère magnétique qui remplace les grilles d'accélération et supprime ainsi tout risque d'érosion de celles-ci. Au final, la taille et les performances de ce propulseur à plasma électronégatif peuvent être facilement modifiées pour s'adapter à diverses applications.

CNRS

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