Edito : Google va-t-il devenir le maître du Net ?
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On se souvient qu'il y a quelques semaines, Google annonçait un accord avec les bibliothèques de Harvard, de Stanford, de l'université du Michigan, d'Oxford et de New York pour ajouter le contenu de ces bibliothèques à son programme "Google Print", qui consiste à indexer, pour de nombreux livres, un résumé de leur contenu (quatrième de couverture, biographie de l'auteur ou introduction), avec possibilité de recherche par mots clés.
L'accord porte sur plus de 15 millions d'ouvrages. Les universités du Michigan et de Stanford sont les plus impliquées puisqu'elles ont accepté la numérisation de l'ensemble de leur fond. Les livres anciens, libres de droits, seront intégralement numérisés et disponibles en ligne. Les livres récents seront disponibles sous la forme d'extraits uniquement. Le visiteur pourra ensuite acheter le livre, s'il le désire, auprès de sites marchands.
Après ce projet ambitieux de bibliothèque universelle numérique et poursuivant son irrésistible ascension et sa conquête du Web, Google vient de lancer Google Earth (http://earth.google.com/)qui propose aux internautes de survoler l'ensemble de la surface du globe depuis leur écran. Le programme permet de se déplacer en continu, grâce à un impressionnant effet de survol, d'un point à un autre de la planète.
Parallèlement, Google, dont la capacité d'innovation et la créativité semblent sans limites, lance deux nouveaux services dédiés aux téléphones mobiles et aux PDA. Google propose deux versions de son moteur de recherche adaptées aux écrans d'appareils mobiles. Les services www.google.fr/xhtml et www.google.fr/wml , basés sur le WAP 2.0, permettent aux utilisateurs de téléphones mobiles d'accéder à un index de pages Web spécialement conçu pour s'afficher sur un écran de téléphone. Ce nouveau service permet donc, en principe, de ne naviguer que sur des sites théoriquement compatibles avec les écrans de téléphones mobiles. Il intègre les outils de recherche locale et de recherche d'images.
Le service Google SMS (www.google.com/sms ) permet quant à lui d'effectuer certaines recherches sur Google en envoyant un SMS au numéro 46645 (touches qui correspondent à "GOOGL" sur la plupart des téléphones). Moins d'une minute plus tard, le résultat est retourné, également sous la forme d'un SMS. Ce service est toutefois limité aux Etats-Unis pour l'instant.
Par ailleurs, selon la presse en ligne américaine, Google pourrait lancer un service de paiement sécurisé en ligne pour concurrencer "Paypal" (eBay) et ainsi diversifier ses sources de revenus, qui sont pour l'instant issus à 99 % de la publicité. Les services de paiement du type PayPal fonctionnent comme des comptes électroniques basés sur une carte de crédit ou un compte chèque. Lors d'une transaction via PayPal, aucune des deux parties n'a besoin de communiquer ses coordonnées bancaires. Ce nouveau service pourrait porter le nom de "Google Wallet" (porte-monnaie Google).
Cependant, le système de transaction sécurisée sur Internet de Google devrait s'inspirer fortement de Paypal. La commission prélevée sur chaque transaction effectuée grâce à ce service assurerait de nouveaux subsides à Google. Le PayPal d'eBay a ainsi généré 233,1 millions de dollars (189,71 millions d'euros) au premier trimestre de l'année et compte pour 23 % des revenus du site d'enchères en ligne. Cette démarche permettrait également à Google de se rapprocher des sites d'e-commerce en leur proposant une prestation complémentaire à la publicité contextuelle et aux liens sponsorisés.
Le numéro un de la recherche en ligne Google s'est également lancé récemment dans la recherche locale en ligne. Son service Google Local, en version bêta, est disponible depuis avril 2005, aux Etats-Unis et au Canada. Il couple la recherche locale d'une entreprise, d'un commerce ou d'un lieu public à sa technologie récemment lancée en version test Google Maps.
Concrètement, l'internaute saisit les coordonnées du lieu recherché (son nom et sa ville). Google Local lui propose les adresses correspondant à sa recherche et pour chaque réponse trouvée il dispose d'un plan d'accès. Sur celui-ci, l'internaute peut zoomer et considérer les alentours de l'adresse recherchée en quelques clics. Le plan affiche les noms des rues et quelques points d'intérêt se trouvant à proximité. Google Local propose aussi de retrouver un itinéraire pour se rendre d'un site à un autre : l'option "Driving directions" livre en fait une simple liste des directions à prendre pour se rendre à bon port. Mais la vraie innovation de ce service réside dans la possibilité, depuis avril 2005, de basculer de la carte à l'image satellite correspondante.
Autre innovation récente : en mars 2005, après avoir traduit sa toolbar, Google annonçait la disponibilité en français de son logiciel "Google Desktop Search", un puissant outil de recherche interne. Tout comme les outils de Yahoo!, MSN ou Copernic, ce logiciel s'installe sur le PC et indexe l'ensemble des fichiers présents sur le disque dur. Ces derniers peuvent ensuite s'afficher parmi les réponses de Google, entre deux URL web. Google n'a pas non plus oublié les internautes qui surfent avec Firefox : depuis le 7 juillet ils peuvent télécharger une barre Google adaptée à leur navigateur.
Enfin, Google vient également de faire une entrée fracassante sur le marché en pleine expansion de la recherche professionnelle en lançant pour les entreprises une nouvelle version de son outil de recherche pour intranet baptisé "Google Search Appliance". Disponible en plusieurs versions, de 3000 $ à 27 000 $, cet outil exploite toutes les technologies logicielles de Google : algorithmes de recherche, auto détection de la langue, administration, crawl continu, sécurisation, etc...
Le système Google Search Appliance permet d'accéder en un clic aux innombrables informations disséminées sur des serveurs Web, systèmes de fichiers et bases de données relationnelles. Il suffit de le configurer en fonction de l'emplacement des informations, d'ajouter un champ de recherche à votre site et, en quelques heures, les utilisateurs ont la possibilité de lancer des recherches sur plus de 220 formats de fichiers différents et dans toutes les langues. Le système Google Search Appliance peut indexer jusqu'à 15 millions de documents et ses fonctionnalités de sécurité garantissent que les utilisateurs accèdent uniquement aux documents qu'ils sont autorisés à consulter.
Depuis quelques semaines, Google, qui avait déjà laissé sur le chemin Viacom et Walt Disney, a dépassé en bourse AOL Time Warner, avec une capitalisation boursière de 84 milliards de dollars, là où le moteur de recherche Yahoo! pèse 55 milliards et le site de vente aux enchères eBay 45 mds. Moins d'un an après son introduction en bourse, le titre de Google a déjà triplé, passant de 85 dollars en août 2004 à 300 dollars en juin 2005.
Alors quelle sera la prochaine étape de Google dans cette diversification et cette volonté de puissance sur le Web ? Le célèbre moteur de recherche envisagerait à présent de lancer un navigateur basé sur la technologie open source Mozilla. Si Google parvient à imposer son propre navigateur internet, face à Firefox et Internet Explorer, il entrera dans la cour très fermée des géants de l'économie numérique, aux côtés de Microsoft, Intel, Aol Time Warner, Sony, et Yahoo!. Dans cette hypothèse, Google serait dans une position de domination et de contrôle du Web qui n'est pas sans rappeler celle de Microsoft sur l'informatique mondiale il y a quelques années.
Les conséquences de cette nouvelle hégémonie de Google sur le Web vont être considérables et bouleverser l'ensemble du secteur mondial des TIC. Face à l'émergence de ce nouveau géant, Il est grand temps que l'Europe dépasse enfin ses querelles et ses rivalités internes contreproductives pour prendre toute la mesure de cette menace techno-économique et culturelle majeure et contrecarrer cette implacable stratégie de conquête.
René Trégouët
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
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