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Les gènes du riz éveillent les appétits
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Le géant de l'agrochimie Syngenta, né de la fusion de Novartis et Astra Zeneca, va publier le génome du riz dans l'édition du 5 avril de Science. Un travail lourd et coûteux : le décryptage de la séquence brute de l'ADN de la plante, soit 430 millions de paires de bases (ou « lettres » du code génétique) réparties sur douze chromosomes. Ces données pourront servir de base de travail pour les spécialistes du riz : à partir des séquences, il s'agira de retrouver les gènes et leurs fonctions. Il a été longtemps difficile de savoir sous quelles conditions la firme permettrait l'accès aux données. Les interrogations étaient nombreuses car la céréale constitue la principale ressource alimentaire dans les pays en voie de développement. Il semble aujourd'hui acquis que les séquences seront mises gratuitement à disposition d'institutions à but non lucratif originaires de 41 pays parmi les plus pauvres de la planète. Les données ne seront cependant pas accessibles à tous les chercheurs : Syngenta est en concurrence avec un consortium de laboratoires publics, l'International Rice Genome Sequencing Program (IRGSP). « Le projet public de séquençage devrait aboutir vers le mois de décembre. Syngenta aurait intérêt à ne pas rendre accessibles gratuitement ses résultats d'ici là : entre-temps, ils peuvent être exploités », explique Francis Quétier qui travaille au Génoscope d'Evry, associé à l'IRGSP. Concrètement, la firme pourrait vendre ses données ou bien les échanger contre des collaborations. Cette dernière stratégie permettrait à la compagnie d'être informée sur le travail des chercheurs du monde entier et de toucher des royalties sur les éventuels brevets déposés par les chercheurs. Au début du mois, vingt généticiens de renom avaient adressé une lettre de protestation à Science, qui dénonçait la légèreté des critères de publications la revue . Le Docteur Michael Ashburner, de l'université de Cambridge (Grande-Bretagne), fait partie des signataires : il estime que « le génome de la plante est une information si fondamentale pour son exploitation agricole qu'il ne devrait pas être la propriété d'une seule entreprise commerciale ». Pour l'organisation non gouvernementale ActionAid, le génome du riz ne devrait pas être négociable : il fait partie de « l'héritage de l'humanité ». Dans quelle mesure la lettre adressée à Science, associée aux pressions des organisations comme ActionAid, a-t-elle incité Syngenta à ouvrir ses informations aux organisations à but non lucratif ? Il restera difficile de le savoir. De même, il est toujours difficile de discerner la part de publicité dans les annonces d'une grande compagnie d'agrochimie : les firmes ont tout intérêt à susciter le désir de collaboration chez les chercheurs. La vocation d'une entreprise privée est de gagner de l'argent : de ce point de vue, l'attitude de Syngenta n'est pas forcément condamnable. Il est certain qu'une grande multinationale s'expose particulièrement à la critique quand elle travaille sur des sujets aussi sensibles que le génome humain ou l'agronomie. Cependant, l'attitude de Syngenta est restée longtemps ambiguë : en janvier 2001, la firme avait déjà annoncé avoir terminé le travail de séquençage. Pendant plus d'un an, elle a refusé de préciser quelles seraient les modalités d'accès au génome. Les grandes multinationales qui travaillent sur le sujet n'ont pas toutes la même stratégie : la firme Monsanto, qui avait terminé en avril 2000 une première ébauche du génome du riz, a choisi une collaboration avec l'IRGSP. Francis Quétier y voit « une illustration de ce qui est possible quand le privé et le public travaillent main dans la main ». Il déplore l'attitude des responsables de Syngenta, qui « ont fait la sourde oreille quand l'IRGSP leur a proposé une collaboration ». En travaillant sur les gènes, les scientifiques auront accès à une meilleure connaissance de la plante. A terme, ils pourront ainsi optimiser le rendement des cultures, par exemple en créant des variétés transgéniques résistantes aux attaques de certains insectes ou aux maladies. Le génome du riz offre aussi la particularité d'être plus court que celui des autres céréales comme le blé ou le maïs. Il constitue donc un modèle, une clé pour l'étude de ces plantes alimentaires cultivées sur l'ensemble de la planète : on comprend le désir des scientifiques d'accéder au génome.
http:// : http://www.lefigaro.fr/sciences/20020327.FIG0191.html
Science : http://www.sciencemag.org/
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