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Les forêts ne sont plus les puits de carbone les plus importants

Ces trente dernières années, l'accumulation du carbone terrestre s'est surtout faite dans les sols, les réserves d'eau et les zones humides plutôt que dans les forêts, d'après une étude internationale. Jusqu'à présent, les forêts, ces poumons verts, étaient considérées comme les puits de carbone les plus importants. Une étude internationale publiée récemment, à laquelle ont participé l'Inrae et le CEA, révèle qu'en réalité ces trente dernières années, la majorité de l'accumulation du carbone terrestre s'est déroulée dans des environnements anaérobies, c'est-à-dire sans oxygène.

« Ce résultat bouleverse la conception que nous avions des choses : nous pensions qu'une grosse partie du stockage de carbone était réalisée par la végétation vivante comme la forêt, finalement celle-ci joue un rôle relativement mineur. La majorité des puits de carbone est dans les sols, les réserves d'eau et les zones humides », détaille Jean-Pierre Wigneron, l'un des deux chercheurs français ayant participé à l'étude, également directeur de recherche à l'Inrae.

D'après l'analyse des flux de carbone sur les dernières décennies, seul 6 % du carbone à l'échelle mondiale s'est accumulé dans les forêts. Celles-ci restent évidemment essentielles : leur capacité de stockage de carbone est surtout endommagée à cause des perturbations liées au réchauffement climatique et aux activités humaines. « Certaines plantations en Russie ou en Chine continuent à avoir un rôle majeur. A l'échelle mondiale, les forêts pâtissent surtout de la déforestation et de la mortalité causée par la sécheresse », pointe l'ingénieur. Le carbone se stocke donc majoritairement dans les zones humides comme les fonds de plan d'eau naturels, mais également, fait plus surprenant, dans les barrages ou dans les plans d'eau construits par l'homme. Autre information essentielle : sur la dernière décennie, les puits de carbone ont augmenté de 30 %. Environ 35 gigatonnes de carbone ont été séquestrées sur la surface terrestre entre 1992 et 2019.

« Ce chiffre est dur à comprendre, l'une des raisons qui peut l'expliquer est la baisse de la déforestation sur les trente dernières années, même si celle-ci reste encore trop importante », note le spécialiste. Une bonne nouvelle, alors que les stocks de carbone dans les écosystèmes terrestres permettent d'atténuer d'environ 30 % les émissions de CO2 liées aux activités humaines, rappelle l'étude. « Notre découverte pointe du doigt la difficulté pour les modèles de végétation de prédire réellement ce qu'il se passe. La modélisation prédisait qu'une majorité de carbone terrestre était stockée dans les forêts, ce n'est pas ce que nous disent les données des observations du foncier forestier, réalisées notamment par satellite. Les modèles peinent encore à appréhender l'impact des feux, de la sécheresse de la déforestation sur la végétation », interroge le scientifique.

Même si la valeur des puits de carbone sur la Terre est connue assez précisément par la sphère scientifique, par déduction du bilan carbone total de la planète, la répartition des réservoirs de carbone terrestre entre végétation vivante et carbone organique non vivant a toujours été plus complexe à identifier. Ce qui explique la surestimation du rôle des forêts ces trente dernières années. Dans sa conclusion, l'étude suggère par ailleurs que le carbone organique du sol aurait « un temps de résidence environ cinq fois plus long » que celui stocké dans la biomasse vivante, à condition de ne pas être perturbé par l'activité humaine. Grâce à cette découverte, de futurs modèles de stockage de carbone dans la biomasse végétale pourraient voir le jour.

INRAE du 21.03.2025 : https://www.inrae.fr/actualites/majorite-gains-carbone-terre-est-sequestree-sols-eaux-terrestres

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