Edito : Energie, Climat et Population : les termes indissociables d'une même équation planétaire
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Lors de l'ouverture du sommet mondial sur l'énergie de l'avenir à Abou Dabi, le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, a appelé à une véritable révolution dans le domaine des énergies propres. "Nous avons besoin d'une révolution globale dans le domaine des énergies propres, une révolution qui rendrait l'énergie accessible et abordable pour tous", indique-t-il. (ONU).
L'ONU prévoit que d'ici 2030, la consommation d'énergie aura augmenté de 40 % dans la plupart des pays en voie de développement. Or, dans ces pays, 1,6 milliard de personnes souffrent toujours d'un manque d'accès à l'électricité et 3 milliards de personnes dépendent encore de l'énergie traditionnelle pour la cuisine, le chauffage et d'autres besoins de base.
Lors de son allocution, le secrétaire général de l'ONU a encore une fois soutenu que des progrès ont été réalisés en décembre au Sommet de Cancun sur le climat. Il a dit considérer comme des avancées majeures l'engagement des gouvernements concernant la mise en oeuvre d'objectifs ciblés, l'amélioration du transfert de technologies vertes et le financement sur le long terme de la lutte contre le réchauffement climatique.
Par ailleurs, Ban Ki-moon a rappelé que, chaque année, deux millions de personnes, surtout les femmes et les enfants, meurent en raison de la pollution de l'air, soit presque le double du nombre de morts par le paludisme !
«Investir dans l'économie verte n'est pas simplement un luxe du monde développé. Cela représente aussi une opportunité pour la création d'emplois, la croissance économique des pays et la prospérité pour tous», a ajouté Ban Ki-moon.
Cet appel du Secrétaire général de l'ONU survient au moment où une cette étude publiée par l'"Universal Ecological Fund", une organisation non gouvernementale (Voir étude) révèle que le réchauffement et l'accroissement de la population mondiale risquent d'entraîner des pénuries alimentaires d'ici 2020.
Si rien de plus n'est fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, dont surtout le CO2 produit par la combustion des hydrocarbures et du charbon, un tel scénario est alors très plausible, insistent les auteurs de cette étude. Les experts du Groupe international d'experts sur le climat (Giec) avaient déjà déterminé en 2006 qu'une hausse de la température terrestre de plus de 2 degrés au-dessus de celle d'avant l'ère pré-industrielle "serait dangereuse".
La combinaison de l'impact de la montée des températures sur la production agricole et de la croissance de la population mondiale, qui devrait atteindre 7,8 milliards d'individus en 2020 (plus 900 millions par rapport à aujourd'hui) entraînera des pénuries pour trois des quatre principales cultures du globe, selon eux.
La production mondiale de blé subira un déficit de 14 % par rapport à la demande d'ici dix ans. Ce chiffre sera de 11 % pour le riz et de 9 % pour le maïs. Le soja est la seule culture majeure qui connaîtra une augmentation de sa production, permettant un excédent de 5 % sur la demande, selon cette projection.
L'eau et le climat, deux ingrédients essentiels à la production alimentaire, seront particulièrement affectés par le réchauffement, relève le climatologue Osvaldo Canziani, un des anciens responsables du Giec et principal conseiller scientifique pour ce rapport. En outre, la plupart des terres arables dans le monde sont déjà exploitées, rappellent ses auteurs qui soulignent que les espaces agricoles sont devenus des valeurs spéculatives.
Depuis 2006, près de 20 millions d'hectares de terres arables auraient fait l'objet de négociations dans le monde, selon Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l'alimentation. Des transactions correspondant presque à la surface arable française. Cette étude est à recouper avec les chiffres de l'ONU qui montrent qu'en 50 ans, la surface moyenne de terres arables par personne a été divisée par deux dans l'ensemble des pays en développement, passant de 0,3 à 0,15 hectare par personne.
L'eau disponible, principalement sous forme de précipitations, et les conditions climatiques seront donc les deux facteurs les plus déterminants pour la production alimentaire mondiale, avec des effets négatifs pour les régions devenant plus sèches, et positifs pour celles plus humides et chaudes. L'Inde, second producteur mondial de riz et de blé, pourrait subir une diminution de jusqu'à 30 % de ces deux récoltes. En revanche, la Chine, plus grand producteur de riz et de blé et second de maïs, devrait accroître ces productions de 20 %.
En Europe, les pays du Nord, comme la Suède ou la Norvège, bénéficieront du réchauffement pour voir leurs rendements de blé grimper de 3 à 4 % d'ici 2020, selon ce rapport. Mais les pays européens du bassin méditerranéen dont l'Italie, l'Espagne et la France subiraient une baisse de 10 % de l'ensemble de leurs récoltes, surtout des raisins dont ils représentent ensemble aujourd'hui 30 % de la production mondiale.
L'impact du changement climatique sur les secteurs productifs de l'économie latino-américaine serait une réduction de 1,3 % du PIB de la région si la température moyenne augmente de 2 degrés, note le rapport.
En Amérique du Nord, une baisse des précipitations va surtout toucher les Etats-Unis, notamment l'ouest, posant des problèmes d'irrigation et affectant diverses productions comme le raisin. Si les auteurs prévoient une certaine augmentation des rendements de blé dans les Grandes Plaines, ils prédisent une réduction des récoltes de maïs et de soja dans la "Corn belt". Enfin, l'Afrique devrait voir les deux tiers de ses terres arables disparaître d'ici 2025 en raison de la sécheresse.
Une autre étude internationale publiée dans "Science", (Voir étude) vient nous rappeler, en s'appuyant sur une analyse rigoureuse des cernes des arbres depuis 2000 ans, que les modifications climatiques de grande ampleur qui sont intervenues depuis 20 siècles coïncident avec des bouleversements démographiques, économiques et politiques majeurs, qu'il s'agisse de la chute de l'Empire romain, du 3ème au 5ème siècle, de la peste noire du milieu du 14ème siècle ou des grandes migrations du 19ème siècle de l'Europe vers l'Amérique.
Ces différentes études nous montrent que tout se tient et que nous devons modifier radicalement la gestion globale des ressources de notre planète si nous voulons assurer la survie de notre espèce. Il est frappant de voir, en nous appuyant sur l'histoire de la terre au cours de ces vingt derniers siècles, à quel point les changements climatiques ont des conséquences importantes sur le plan économique, social et politique et nous risquons malheureusement d'en avoir une illustration de grande ampleur si nous ne prenons pas au niveau planétaire des mesures plus énergiques et plus cohérentes pour limiter pendant que cela est encore possible, le changement climatique majeur qui est en train de s'opérer sous nos yeux à un rythme sans précédent dans l'histoire de l'humanité.
René Trégouët
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
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- Publié dans : Terre Sciences de la Terre, Environnement et Climat
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