Edito : Edito : La maison du futur sera communicante et conviviale
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Conscient de l'énorme enjeu industriel de la domotique à l'horizon 2020, les grands groupes japonais, qu'ils fabriquent des appareils électroniques comme Matsushita ou des toilettes comme Toto, investissent actuellement de manière massive dans le développement de produits domotiques pour la maison du futur, où chaque appareil serait connecté, accessible depuis n'importe où et en permanence. Les acteurs industriels de la domotique cherchent comment relier en réseau toutes les fonctions de la maison sans attenter à la vie privée de ses habitants et comment améliorer les conditions de vie des personnes âgées et des handicapés qui restent à leur domicile, tout en rendant leur logement plus écologique et plus ouvert sur l'extérieur. Le groupe Matsushita Electric Industrial et sa filiale Matsushita Electric Works (MEW) présentent leur vision de l'avenir domotique dans un appartement-témoin à Tokyo où l'on s'identifie par scanner de l'iris pour pouvoir entrer et être accueilli par un robot parlant. Le bureau ressemble à un poste de pilotage de navette spatiale et la salle à manger comprend une table dotée d'un écran tactile qui diffuse des images projetées depuis le dessous, tandis qu'un écran géant et des enceintes en verre vibrant envahissent un des murs. Quand un convive s'assoit autour de la table, un petit poisson, avatar d'un "agent", nage vers lui. Chaque membre de la famille a son "agent", un logiciel qui recense des informations personnelles. Une famille peut par exemple planifier ses vacances autour de la table, chaque personne utilisant son agent pour lui demander de rechercher sur Internet la destination de ses rêves. Dans cet appartement-prototype, la communication passe par des appareils plus simples d'emploi, commandés par le toucher, la voix ou une souris à un seul bouton. "L'agent connaît les goûts et les centres d'intérêt de chaque membre de la famille ; vous n'avez pas à utiliser directement l'ordinateur", explique Nao Kurosawa, une guide du Panasonic Center qui abrite le "showroom" de Matsushita. "Beaucoup de personnes âgées ou d'enfants ont du mal à utiliser un ordinateur (commandé par un clavier)." La maison totalement connectée, telle qu'elle est présentée par Matsushita, n'existera cependant pas avant de longues années car, outre les problèmes posés par le manque de bande passante sur le réseau Internet et la pénurie d'adresses Internet, les consommateurs ne sont pas encore prêts à payer des équipements qui restent coûteux. Matsushita propose aujourd'hui à l'essai dans la région japonaise du Kansai un service baptisé "Kurashi Net", "kurashi" signifiant "vie à la maison" en japonais. Ce service permet de contrôler à distance des appareils électroménagers grâce à une commande centrale ou un téléphone mobile. L'utilisateur peut par exemple déclencher la climatisation avant son arrivée à la maison ou lancer la cuisson d'un plat dans le four à micro-ondes pendant son trajet de retour au domicile. Kurashi Net propose également une fonction de sécurité qui envoie une alerte sur un téléphone mobile quand une fenêtre ou une porte reste ouverte. Les plus importants progrès réalisés par les groupes japonais se sont faits dans un domaine où le génie nippon a déjà déployé des trésors d'inventivité : les toilettes. Alors que les toilettes des pays occidentaux ne présentent bien souvent qu'une seule fonction, la chasse d'eau, celles des Japonais proposent le siège chauffant, un capteur de déclenchement de la chasse d'eau et un bidet télécommandé. La société Toto commercialise des toilettes qui prélèvent et testent un échantillon d'urine de l'utilisateur afin de surveiller sa santé. Le numéro un japonais des toilettes travaille sur une version connectée de cette machine, ce qui prendra d'après lui au moins trois ans et pose des problèmes de confidentialité dans la transmission des données si elles sont envoyées sur le réseau Internet tel qu'il existe actuellement. "Nous opérons des recherches conjointes avec une société de communication sur la meilleure façon de collecter et de stocker des données avant de les envoyer au médecin", a expliqué Kaoru Nogami, directeur général de la recherche et développement de Toto. Ces nouveaux concepts de recherche montrent que le modèle de la maison domotique à commande centralisée, telle qu'on l'imaginait il y a 20 ans, ne correspond plus aux nouvelles attentes des utilisateurs. En effet, avec la montée en puissance de l'Internet, le concept de spécificité de la maison connectée doit être revu car l'utilisateur ne cherche plus à tout contrôler depuis sa maison. Il souhaite plutôt évoluer dans un environnement convivial capable de lui délivrer à chaque moment de la journée et à chaque endroit où il se trouve une information personnalisée et utile via un réseau d'objets connectés. Ce type de communication pourra prendre la forme d'un téléphone qui permet d'ouvrir les volets et de mettre en marche la climatisation à distance en rentrant de week-end ou encore d'un téléviseur qui signale discrètement l'arrivée de courriels et permet leur lecture. Il reste que la généralisation de ce concept de système interconnectés d'objets personnalisés, qui dépasse largement l'approche domotique traditionnelle "pyramidale", suppose au moins deux transitions technologiques : le déploiement de réseaux sans fils à très haut débit sécurisés -qui combineront Wi-Fi et UWB- et le passage à l'IPv6, absolument indispensable pour attribuer à chaque objet de notre environnement une adresse IP. Les réseaux domestiques supposent en effet que chaque équipement qu'ils relient ait une adresse IP. Aujourd'hui, l'IPv4 autorise le déploiement de plus de 4 milliards de combinaisons d'adresses. C'est peu, lorsqu'on veut faire un réseau mondial et construire un réseau de communication sur IP. Deux tiers des adresses de ce protocole sont aujourd'hui attribuées. L'IPv6 offre des capacités d'adressage bien plus étendues, en augmentant la taille des adresses IP de 32 à 128 bits. A l'heure actuelle, la meilleure application pour IPv6 réside dans les caméras de sécurité connectées à Internet, selon Matsushita. IPv6, codé en 128 bits au lieu de 32 pour l'IPv4 actuel, permet un nombre virtuellement illimité d'adresses Internet car celles-ci ne sont plus restreintes à 12 chiffres, mais peuvent dépasser les 39 chiffres. Le passage en 128 bits permettra également d'augmenter la bande passante maximale entre deux machines. Malgré les limitations du protocole actuel en matière de nombre d'adresses et de fonctions de sécurité, les constructeurs proposent déjà des produits qui donnent une idée de ce que sera la société connectée de demain. Le géant nippon Matsushita commercialise déjà un service baptisé T-Navi qui permet de naviguer sur le web avec un téléviseur numérique ou encore un lecteur-enregistreur de DVD programmable à distance avec un téléphone mobile. On le voit, la maison de demain, loin des fantasmes de science-fiction imaginant un ordinateur central omnipotent, contrôlant l'ensemble de la maison, fonctionnera de manière intuitive et conviviale en utilisant l'intelligence de manière souple et répartie pour faciliter notre vie quotidienne tout en se faisant oublier. Dans une telle maison, la commande vocale et tactile sera reine et, compte tenu du vieillissement inexorable de notre population, un grand nombre de nos objets usuels intégreront des fonctionnalités de télédiagnostic et de télésurveillance médicale aussi discrètes qu'efficaces. Autre aspect très novateur de cet habitat du futur : la mise en réseaux de nos habitations et le recours à des matériaux intelligents seront mis au service de l'environnement et du développement durable. Ces nouvelles technologies peuvent en effet concilier de manière très féconde confort d'utilisation, sécurité et respect de l'environnement. On peut par exemple imaginer des maisons et bâtiments conçus comme des systèmes écologiques intelligents et utilisant beaucoup moins d'énergie pour le chauffage comme pour la climatisation, qui pourraient dans de nombreux cas être assurée au moindre coût énergétique par une meilleure combinaison de solutions techniques et architecturales naturelles. Pour être acceptée et utilisée dans nos maisons, cette nouvelle domotique sera conviviale, adaptative et personnalisée. Elle devra se faire oublier tout en "apprenant" à s'adapter aux goûts, aux habitudes et aux besoins -médicaux notamment- des utilisateurs. Cet habitat intelligent sera non seulement plus sur, plus performant pour le travail, et plus confortable mais aussi plus respectueux de l'environnement et finalement plus chaleureux et plus humain.
René TRÉGOUËT
Sénateur du Rhône
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