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Dépression : une nouvelle voie thérapeutique ?
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Des chercheurs américains viennent de mettre en évidence chez la souris "le circuit" de l’anhédonie, cette difficulté à ressentir des émotions positives et expérimenter le plaisir. Cette découverte laisse envisager la possibilité de nouveaux traitements pour certaines dépressions sévères.
En France, 3 millions de personnes seraient touchées par la dépression. Cette maladie affecte de nombreux aspects de la vie quotidienne dont la joie de vivre, perdue chez de nombreuses personnes. La découverte de Rob Malenka, dont l’étude est publiée dans Nature, pourrait peut-être changer la vie des malades. L'équipe de ce neuroscientifique de l’Université de Stanford a mis en évidence le circuit de l’anhédonie, cette incapacité à ressentir des émotions positives lors de situations plaisantes. Il semblerait qu’il soit possible de jouer sur ce sentiment particulier. Cette découverte rend envisageable la mise au point de traitements spécifiques avec l’immense avantage d’être déconnectés des autres symptômes liés à la dépression.
- Le manque de plaisir identifié dans le cerveau
C’est en cherchant à mieux comprendre les circuits cérébraux impliqués dans l’apparition de symptômes dépressifs induits par un stress chronique que Rob Malenka et son équipe ont fait cette découverte. En effet, le stress chronique induit la production de mélanocortines, hormones impliquées dans la pigmentation de la peau mais aussi dans la modulation de la prise alimentaire. Or, il existe de nombreux récepteurs de mélanocortine dans le noyau accumbens, une région du cerveau impliquée dans le "mécanisme de récompense". Quand ce circuit fonctionne normalement, il permet de ressentir du plaisir suite à l’accomplissement d’un objectif ou d’expériences agréables (liées à la nourriture, au sexe…). A l’inverse, quand ce circuit est défectueux, pas de plaisir. On parle alors d'anhédonie. Mais jusqu’à présent, on ne savait pas si la modulation de l’activité de mélanocortine pouvait influer sur ce circuit de récompense et donc sur la "joie de vivre".
- Vers de nouveaux traitements de la dépression ?
Pour tester leur hypothèse, les chercheurs ont donc travaillé avec deux types de souris : des souris dites "normales et heureuses" et d’autres chez qui un stress chronique a été induit (en les confinant dans un tube 3 à 4 heures par jour durant 8 jours). Pour tester leur "joie de vivre", il leur a donc été proposé de l’eau sucrée – généralement appréciée des souris - ou normale. Logiquement, les souris stressées étaient moins attirées par l’eau sucrée que les autres. Par ailleurs, ces souris stressées avaient perdu en moyenne 5 à 10 % de leurs poids corporel, symptôme fréquemment observé chez les dépressifs.
Au-delà de ce simple test comportemental, les chercheurs ont utilisé diverses techniques pour savoir exactement ce qu’il se passait au niveau moléculaire. Ils ont ainsi observé que le stress chronique et l’administration directe de mélanocortines dans le noyau accumbens provoquaient une diminution de la force du signal synaptique (jonction entre deux neurones). Et quand le noyau accumbens était dépouillé des récepteurs à mélanocortine, le stress n’arrivait plus à induire les changements synaptiques observés "normalement". Par ailleurs, l’appétence des souris stressées pour le sucre était redevenu normal, tout comme leur poids.
Enfin, d’autres expériences (remplacer le sucre dans l’eau par de la cocaïne, jeter les souris dans une piscine et les forcer à nager jusqu’à ce qu’elles abandonnent...) ont également confirmé l’hypothèse de base des auteurs : le stress chronique réduit la force des signaux synaptiques des récepteurs de mélanocortine du noyau accumbens. Ainsi, les symptômes d’anhédonie disparaissent quand ces récepteurs sont bloqués.
Rob Malenka et ses collègues seraient les premiers à avoir mis en évidence le rôle de la mélanocortine dans les symptômes liés à la dépression. Leur découverte ouvre de nombreuses perspectives thérapeutiques, d’autant plus que de nombreux analogues et inhibiteurs de mélanocortine ont été développés par divers laboratoires. Néanmoins, quelques biais méthodologiques liés à la difficulté des expérimentations animales dans le domaine des sciences cognitives (on peut s'interroger sur la pertinence des critères utilisés pour déterminer l’anhédonie comme le fait d’abandonner la nage forcée...) nous conduisent à rester prudents.
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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