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La découverte d'un trou noir très ancien bouleverse notre compréhension de l'Univers

Des astronomes ont découvert, au centre d'une galaxie lointaine, un trou noir qui pèse 800 millions de masses solaires. Situé à 13,1 milliards d'années-lumière de la Terre, ce géant baptisé J1342+0928 est le plus lointain jamais observé par l'humanité. C'est donc le plus ancien que l'on connaît, puisque la lumière du quasar, c'est-à-dire la matière extrêmement lumineuse qui gravite autour du trou noir, a mis 13 milliards d'années à parvenir jusqu'à la Terre.

Les astronomes ont pu observer ce "trou noir fossile" tel qu'il était 690 millions d'années seulement après le Big Bang. Paradoxalement, cette époque de transparence s'appelle "l'âge sombre". La lumière n'apparaît effectivement que des centaines de millions d'années plus tard, quand les premières étoiles, les premiers quasars et les premières galaxies, se forment. Leur rayonnement "réionise" les gaz neutres et forme peu à peu des bulles de gaz ionisé.

"C'est le début de la Réionisation, la dernière transition majeure de l'Univers et l'une des frontières actuelles de l'astrophysique", indique l'astrophysicien qui a piloté l'étude, Eduardo Bañados, sur le site de son Université, Carnegie Mellon. Cette période aurait commencé environ 400 millions d'années après le Big Bang et duré 600 millions d'années.

C'est là que notre J1342+0928 entre en jeu. En analysant la lumière du quasar, qui date de 690 millions d'années après le Big Bang, soit en plein milieu de l'ère de Réionisation, les scientifiques ont pu déterminer qu'une grande partie de l'espace autour du trou noir était composée d'hydrogène neutre. Ce qui signifie que la Réionisation était récente. Elle aurait donc débuté plus tard que ce que l'on pensait.

Mais ce n'est pas le seul élément troublant à propos de J1342+0928. Malgré son "jeune âge", ce trou noir avait une masse 800 millions de fois plus grande que notre Soleil. Or il ne devrait pas être aussi gros, aussi tôt dans l'histoire de l'Univers. « Qu'il soit devenu aussi massif en moins de 690 millions d'années pose un véritable défi aux théories sur la croissance des trous noirs supermassifs, » souligne Eduardo Bañados.

Pour bien comprendre, il faut se pencher sur les deux principales hypothèses autour des trous noirs supermassifs. La première avance qu'ils sont issus de l'effondrement gravitationnel des premières étoiles et que leur masse initiale était relativement "faible", autour de 10 fois celle de notre Soleil. Ils auraient ensuite grossi, au fur et à mesure qu'ils fusionnaient avec d'autres trous noirs ou aspiraient des étoiles et des planètes. Sauf que ce processus, théoriquement très long, explique difficilement l'existence de J1342+0928, fort de 800 millions de masses solaires, 690 millions d'années seulement après le Big Bang. 

L'autre hypothèse est celle de l'apparition d'une première génération de trous noirs supermassifs de plusieurs dizaines, voire centaines de milliers de masses solaires, qui pourraient être issus de l'effondrement de titanesques nuages de gaz. Ce qui explique l'existence, aujourd'hui, de trous noirs de plusieurs milliards de masses solaire (comme NGC1277 ou SDSS J0100+2802), mais aussi celle, à l'époque, de J1342+0928. Sa présence, alors que l'Univers était si jeune, "renforce le modèle selon lequel les premiers trous noirs avaient une masse initiale de plus de 10 000 masses solaires", confirment les chercheurs dans leur étude.

Apparus quand l'Univers était encore très jeune, ces monstres auraient alors catalysé la formation des premières galaxies, comme indiquait à L'Express Jean-Pierre Luminet, astrophysicien et directeur de recherche au CNRS. Ce qui pourrait expliquer une dernière bizarrerie concernant ce lointain trou noir.

En observant la lumière émise par J1342+0928, ou plutôt son quasar, les astronomes ont déduit que "la galaxie qui l'entourait, malgré son très jeune âge -moins 690 millions d'années - avait déjà dû produire énormément de poussières d'éléments lourds. Ce qui veut dire qu'elle avait déjà vu naître une grande quantité d'étoiles".

Or, selon les théories actuelles, cette galaxie n'aurait pas dû être si développée aussi tôt dans l'histoire de l'Univers. Sauf, éventuellement, avec le scénario évoqué par Jean-Pierre Luminet. Quoi qu'il arrive, "les modèles théoriques vont devoir expliquer comment une galaxie a pu créer autant d'étoiles en aussi peu de temps", insiste Bram Venemans.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

L'Express

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