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Covid-HP simule les interactions entre le virus et ses traitements potentiels

Porté par Sorbonne Université, le projet Covid-HP a été sélectionné le 3 avril pour bénéficier des ressources en supercalcul du consortium européen Prace. Pendant six mois, il simulera les interactions entre le virus SARS-CoV-2 et des médicaments potentiels à l’échelle atomique. Une résolution élevée est permise grâce au logiciel Tinker-HP qui intègre des modèles inspirés de la physique quantique.

Baptisé Covid-HP, il est le premier projet lié au Covid-19 accepté dans le cadre de la procédure d’urgence mise en place par le Partenariat pour le calcul avancé en Europe (Prace).

Le 3 avril, le consortium européen de calcul haute-performance (HPC) a annoncé lui avoir alloué 20 millions d’heures de calcul pour une durée de 6 mois sur la machine Joliot-Curie Rome exploitée par les équipes du Très Grand Centre de calcul du CEA (TGCC). « Pour un projet validé en urgence, c’est un nombre d’heures très important », relève Jean-Philip Piquemal, professeur de chimie théorique à Sorbonne Université et responsable du projet.

Le projet est également soutenu par le Grand équipement national de calcul intensif (Genci). Un certain nombre d’heures de calcul ont été allouées sur le supercalculateur Jean Zay exploité par l'Institut du développement et des ressources en informatique scientifique (IDRIS) du CNRS.

Covid-HP a pour but d’approfondir la connaissance du virus SARS-CoV-2 et de réaliser un criblage virtuel (« virtual screening », en anglais) à grande échelle pour aider à trouver un traitement contre l’infection. Cela consiste à modéliser les interactions entre certaines protéines du virus et des molécules médicamenteuses. « En passant en revue les millions de molécules qui existent dans les bases de données privées et académiques disponibles, nous allons élaborer une liste de molécules potentiellement intéressantes qui pourront ensuite être testées expérimentalement », explique M. Piquemal. « Le faire informatiquement est un gain de temps phénoménal ».

Pour cela, des filtres de plus en plus fins sont appliqués successivement pour éliminer les molécules qui présentent peu d’intérêt et ne garder que celles qui ont un potentiel. En chimie théorique, cet intérêt est quantifié par une valeur d’« énergie libre » : plus cette énergie est forte, plus le médicament se lie fortement à la protéine. Elle est l’équivalent théorique de l’activité que mesurent les biologistes avec la concentration inhibitrice médiane (CI50), qui leur permet de qualifier l’affinité d’un médicament avec une protéine.

Si la sélection à travers les filtres est d’abord rapide et grossière lors des premières étapes de calcul, elle se complexifie, gagne en finesse et en durée au fur et à mesure que le nombre de molécules candidates diminue. Le projet Covid-HP regroupe notamment des spécialistes de ces différents niveaux de criblage virtuel comme le Professeur Matthieu Montes au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) et le Professeur Pengyu Ren de l'Université du Texas à Austin.

L’étape de sélection ultime sera effectuée par le logiciel Tinker-HP. « Sa particularité est d’utiliser des modèles plus proches de la physique quantique », précise M. Piquemal. « Et plus précisément les champs de forces polarisables, pour simuler plus finement les interactions moléculaires en incluant les effets à N-corps. Nous sommes les seuls à l’envisager, là où les autres projets se limitent à la mécanique newtonienne. Or au niveau atomique, la mécanique quantique domine ».

La difficulté vient du fait que chaque atome est modélisé et que le virus lui-même et les parties intéressantes pour le criblage sont très grosses : « Le virus contient 250 millions d’atomes et les parties intéressantes sont généralement constituées de 500 000 à 3 millions d’atomes », avertit M. Piquemal. Heureusement, les modélisations peuvent se focaliser dans un premier temps sur ces seules zones d’intérêt, sans avoir forcément besoin de modéliser le virus entier. Mais le calcul reste lourd si l’on considère les différentes cibles possibles, à multiplier par les millions de molécules disponibles.

Le gros challenge au niveau mondial, selon M. Piquemal, est de modéliser la protéine « Spike » du virus : « Tel un moustique, elle se plante dans un récepteur sur la cellule humaine pour transférer le matériel génétique du virus contenu dans son ARN », explique-t-il. « En bloquant cela, nous espérons diminuer l’infection ». Une autre stratégie consiste à rentrer dans le virus avec des médicaments pour « casser sa machinerie » et l'empêcher de fonctionner.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

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