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Comment créer la vie sur un ordinateur
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Let's make a creature («Donnons la vie»), écrit une jeune femme blonde sur le clavier d'un ordinateur. Aussitôt saisi, le texte fait apparaître des insectes virtuels colorés sur un grand écran, qui se développent et prennent leur envol. Le choix des lettres l, e, m, leur ordre d'apparition et la syntaxe de la phrase déterminent la forme, la couleur, le mouvement et même la longévité de ces créatures volantes. «Nous avons développé un système qui permet d'utiliser du texte écrit à la façon d'un code génétique et de le traduire en créatures visuelles», explique Christa Sommerer, conceptrice avec Laurent Mignonneau de cet étrange environnement de vie artificielle. «De la complexité du message écrit dépendent le dessin du corps et des membres, et la capacité de ces insectes virtuels à se mouvoir. Certains vont bouger très vite alors que d'autres se déplaceront beaucoup plus lentement.» Lâchées sur l'écran, les bestioles en images de synthèse sont alors livrées à elles-mêmes, se nourrissent, cherchent un partenaire pour s'accoupler. Et si un petit vient à naître, il portera le même «patrimoine génétique» que ses parents numériques. Baptisé «Life Spacies II», ce dispositif sur Internet est l'une des installations interactives créées par le duo Sommerer et Mignonneau. A la fois chercheurs et plasticiens, ils travaillent dans un champ intermédiaire entre art, science et technologie. Basés à l'ATR Media Integration & Communication Research Laboratories de Kyoto au Japon, ils mettent au point ensemble des programmes informatiques simulant la croissance d'organismes naturels, qu'ils revendiquent comme des oeuvres d'art. C'est à l'intérieur d'un espace intitulé «La vie in silico», dédié à la création de «vies artificielles», qu'a pris place l'installation multimédia «A-Volve» de Christa Sommerer et Laurent Mignonneau. Penché au-dessus d'un aquarium virtuel (un dispositif rempli d'eau composé d'un rétroprojecteur se reflétant dans un miroir), le visiteur dessine une créature sur un écran tactile (une vue de face, un profil). L'ordinateur la transforme en trois dimensions et l'immerge dans l'aquarium virtuel, où elle rejoint d'autres congénères. Ensemble, ils nagent, mangent, se reproduisent et meurent comme de vrais êtres vivants. Il y a des prédateurs et des proies, comme dans tout écosystème, les plus faibles sont mangés par les plus forts, les plus forts donnent naissance à de nouvelles créatures. « Nous voulons montrer comment l'ordinateur peut simuler de façon ludique la complexité du monde vivant », explique Marie-Pierre Lahalle, chargée de projet à la Cité des sciences. En ajoutant que le visiteur peut bloquer une créature avec sa main pour la soustraire à l'écosystème. «Pour nous, une oeuvre d'art interactive doit ressembler à un système vivant, dans un sens métaphorique, bien sûr, résume Christa Sommerer. De plus, les utilisateurs s'impliquant dans ces oeuvres y projettent leur comportement et leur émotion propre qui à leur tour vont contaminer l'oeuvre d'art.» C'est toute l'idée, depuis Kurt Schwitters et Marcel Duchamp, du regardeur qui fait l'oeuvre, jusqu'à des artistes comme Robert Rauschenberg ou Nam June Paik, incluant le public dans le processus même de création. Il s'agit donc, pour Sommerer et Mignonneau (qui collaborent au prestigieux MIT Center for Advanced Visual Studies de Boston), de mettre au point pour chacun de leurs environnements évolutifs et autonomes des algorithmes génétiques ou de croissance. Nos deux botanistes multimédia sont allés encore plus loin. A l'heure où les chercheurs planchent pour acheminer sur Internet odeurs et autres fragrances, Christa Sommerer et Laurent Mignonneau ont cherché à introduire une dimension organique dans le système du web. Ainsi l'un de leurs travaux les plus récents, «Riding the Net», met en présence deux utilisateurs parlant entre eux. Au fil de leur conversation, les mots clés qu'ils emploient sont décodés par un système de reconnaissance vocale et utilisés pour rechercher et télécharger les images correspondantes sur Internet. Par exemple, si les deux interlocuteurs parlent de fleurs ou d'arbres, différentes images de fleurs ou d'arbres sont téléchargées et projetées en temps réel sur un écran à proximité. Ces propos «imagés» se démultipliant en images tournoyantes et psychédéliques, au son d'une musique planante...
Télérama : http://multimedia.telerama.fr/
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