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Edito : Comment augmenter la productivité de la France, et donc obtenir de la croissance, sans dépense d'argent public ?
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2 avis :
Certains parmi vous qui me lisent, semaine après semaine, depuis 14 ans, auront eu un petit moment de surprise en lisant le titre de cet édito.
En effet, notre lettre de prospective, depuis 1998, s’est toujours tenue loin de l’actualité politique et continuera à tenir la même ligne éditoriale.
Aujourd’hui, je vais simplement reprendre les idées essentielles d’un édito " Transports urbains du futur : vers la fin des grandes infrastructures " que j’avais mis en ligne le 18 Septembre 1999.
Prenons, tout d’abord, une information qui nous est parvenue le 10 Mai dernier « Google a obtenu le premier permis de circulation pour sa voiture à pilotage automatique ». Ainsi, pour la première fois, une autorité administrative responsable, l’Etat du Nevada, a donné l’autorisation pour qu’un véhicule entièrement automatique circule parmi toutes les autres voitures pilotées par des êtres humains. Certes, le texte du règlement précise qu’une personne devra être à bord pour surveiller et intervenir, si besoin, sur le système informatique, mais le pas franchi n’en est pas moins historique. Qui aurait pu imaginer, il y a seulement quelques années, qu’une voiture entièrement automatique aurait pu s’insérer dans le flot de voitures ininterrompu du Strip à Las Vegas !
Et pourtant, ce qui était annoncé arrive. Google vient de préciser qu’il commercialisera ce véhicule, entièrement automatique, dans les 5 ans.
Ne soyons pas surpris d’une telle annonce ! Observons ce qui se passe dans de nombreux véhicules déjà aujourd’hui.
Nos véhicules, dont toutes les commandes essentielles (direction, freins, accélérateur, boite de vitesses, embrayage, etc…) ont été électrifiées (donc automatisables !), dans ces dernières années, commencent à être bardés, sur l’ensemble de leur périmètre, de radars et de caméras.
Ces voitures qui circulent aujourd’hui sur nos routes ralentissent automatiquement si la voiture précédant la vôtre ralentit, vous ramènent dans le droit chemin si, par inadvertance, vous quittez votre couloir de circulation sans avoir mis le clignotant, vous envoient un signal fort si un véhicule se trouve dans votre angle mort alors que vous mettez votre clignotant pour changer de ligne, et savent même se garer seules, sans que vous interveniez sur le volant, l’accélérateur ou le frein.
Tout cela existe déjà. Ceci signifie que, si les Pouvoirs Publics abandonnaient clairement leurs idées actuelles d’aménagement des déplacements urbains (hors le métro) dont les principes remontent à plus d’un siècle, pour faire le choix d’une automatisation intégrale de tous les déplacements individuels dans les grandes agglomérations, ces nouveaux modes de transport pourraient être totalement opérationnels, dans les 10 ans qui viennent.
Comment cela fonctionnerait-il ?
Comme je l’écrivais déjà en 1999, des « cybercars » automatisés de 4 places, qui seraient fabriqués par nos industriels nationaux, seraient soit achetés par des particuliers qui trouveraient là un vecteur nouveau de placement, soit par les opérateurs ayant obtenu, sur appel d’offres, un droit d’exploitation auprès du gestionnaire public du réseau de l’ensemble de l’agglomération. Pas un seul centime d’argent public ne devrait être dépensé pour acquérir ces dizaines de milliers de « cybercars », dans chaque agglomération. En effet, au même titre que le citoyen s’achète un forfait ou paie ses communications, pour utiliser son téléphone, il en fera de même pour utiliser ces « cybercars ». Dès le départ, la concurrence devra s’exprimer dans ce nouveau marché des « cybercars ». Les normes (technologies, sécurité, protocole de communication, etc…) seront édictées par les Pouvoirs Publics, et tous les opérateurs qui voudront faire fonctionner ces « cybercars » sur l’ensemble de l’agglomération devront strictement respecter ces normes et les règles d’utilisation.
Les financements pour l’installation de tels réseaux seront faciles à mettre en place auprès des investisseurs privés car la masse potentielle des individus transportés, malgré le prix unitaire très bas, sera à la source de revenus substantiels. Ne pas oublier que dans un tel modèle économique tous les véhicules non automatisés (qu’ils soient privés ou publics) n’auront plus le droit de circuler dans les aires urbaines.
L’utilisateur Lambda, c’est-à-dire vous ou moi, de ces futurs « cybercars » n’aura aucune difficulté pour se servir de ce véhicule du futur. Il lui suffira d’avoir son téléphone portable sur lui. Quand il voudra appeler un « cybercar », pour aller à un rendez-vous, ou faire des courses, il lui suffira d’appuyer sur une touche spécifique protégée, qui sera alors disponible sur chaque téléphone. L’appui confirmé sur cette touche vous permettra, en associant les données très précises de géolocalisation de votre téléphone, d’obtenir en quelques secondes une (ou plusieurs) proposition, vous précisant l’heure exacte (éventuellement les conditions financières) à laquelle le « cybercar » arrivera à l’endroit où vous vous trouvez. Vous confirmerez en appuyant sur le numéro de l’opérateur retenu. A l’heure précise, le « cybercar » se présentera devant vous. Quand vous monterez à bord du « cybercar, un échange automatique se fera entre votre téléphone et le véhicule, pour d’abord certifier que vous ne vous trompez pas de « cybercar », et ensuite ouvrir votre fiche personnelle (identité, abonné ou non, moyen de paiement…). Tout cela se fera sans intervention de votre part ! La seule chose qui vous sera demandée sera de préciser, à voix haute, votre adresse de destination. Après quelques instants de consultation, auprès de l’ordinateur central, votre « cybercar » vous annoncera, à la minute près, votre heure d’arrivée, tous les mobiles étant gérés par une même unité centrale. A partir de cet instant votre « cybercar » se transformera en lieu de détente et de travail. Vous n’aurez plus à vous préoccuper de la circulation et à en subir le stress…
Au lieu d’entrer dans une phase de temps perdu (embouteillages, cohue des transports en commun…), vous pourrez, tout au contraire, en circulant dans les grandes agglomérations, entrer dans une phase d’enrichissement personnel de votre temps (navigation sur Internet, consultation de dossiers, échange d’e-mails…) et arriver détendu et non stressé sur votre lieu de travail. Les « Cybercars » qui seront hyper connectés aux réseaux très haut débit vous inciteront ainsi à enrichir votre temps.
Les études les plus sérieuses nous affirment que les Français passent quelque 20 milliards d’heures, chaque année, dans les moyens de transports. Imaginons que la moitié de ce temps soit affectée au salarié pour son enrichissement intellectuel personnel et pour sa navigation sur Internet, et que l’autre moitié soit affectée à son entreprise.
Ce sont alors quelque 10 milliards d’heures supplémentaires productives soit l’équivalent de plus de 600.000 personnes à temps plein qui viendraient, sans coûts supplémentaires pour l’entreprise et la collectivité, améliorer la compétitivité de notre pays, et ce, sans que le temps global que chacun d’entre nous consacre au travail, chaque jour, (présence dans l’entreprise et temps de trajet) soit augmenté et sans qu’un centime d’argent public soit dépensé. Imaginons un instant le coup de booster énorme qu’une telle modification des déplacements individuels rendue possible par l’innovation et les nouvelles technologies apporterait à notre économie…
Dans une période de crise, où chacun se pose la question : « Comment retrouver la croissance et éviter l’austérité », ce type de réponse s’appuyant sur l’innovation est porteur d’espoir.
Dans ces temps difficiles où l’argent public devient de plus en plus rare, ne faudrait-il pas enfin réfléchir à toutes les améliorations de compétitivité et de bonheur que pourraient nous apporter les nouvelles technologies ?
En effet, il n’y a pas que dans le domaine des déplacements urbains que nous pourrions résoudre cette équation « comment améliorer notre productivité et relancer la croissance sans dépenser de l’argent public. » Dans la plupart des domaines où il y a innovation et nouvelles technologies (très haut débit avec la fibre optique, énergies alternatives, aides aux personnes âgées, santé, robotique personnelle, formation, transports, etc…), nous pouvons améliorer la compétitivité de la France et ce, sans faire appel à l’argent public.
Certains affirmeront que cela n’est pas possible. J’affirme le contraire.
Pour preuve, je vous raconterai dans un prochain édito, comment le Conseil Général du Rhône, sur ma proposition, (j’étais alors le Premier Vice-Président de cette Assemblée), a décidé, en 1989, de construire le plus grand réseau optique unifié de France. Aujourd’hui, alors que tous les Rhodaniens peuvent accéder aux 100 mégabits (à comparer avec les 10 à 20 mégabits de notre ADSL national..), je peux affirmer qu’en fin de concession, dans quelques années, ce réseau unique en France n’aura pas coûté un centime au contribuable !
Réfléchissons bien, tous ensemble, au potentiel énorme que représentent l’innovation et les nouvelles technologies pour améliorer la productivité de notre Pays. C’est bien dans cette direction qu’il faut rechercher la porte qui nous permettra d’atteindre un meilleur avenir.
René TRÉGOUËT
Sénateur Honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
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Laya Patrice-Louis
25/05/2012Bravo Mr Trégouët...j'espère que cet état d'esprit atteindra les neurones de nos Parlementaires...Effectivement, les premières ressources pour sauver notre Humanité sont d'abord en chacun d'entre nous
Une nouvelle investiture vient d'être célébrée avec ses grandes incertitudes et ses risques multiples de tous ordres…mais aussi, avec ses opportunités pour ceux et celles qui sauront s’adapter et évoluer.
>>>De nouvelles méthodes d’organisation personnelles, professionnelles, sociales s’installent. Elles reposent sur l’échange, le partage, la coopération voire la coopétition, et seuls ceux qui développeront ces valeurs en mettant l’humain au coeur de tous les projets, traverseront les tempêtes et les changements inéluctables annoncés.
>>>Les sommets à conquérir sont himalayiens et pour les atteindre, il faudra bien choisir sa cordée (ses partenaires) en prenant soin d’alléger son sac à dos de tout le superflu : laisser la peur, le doute, la colère, les idées reçues, les échecs passés…
Quant aux ressources disponibles, elles sont immenses si nous prenons conscience que nous n’utilisons que 5 % de nos potentiels Physiques, Affectifs, Intellectuels, voire Spirituels.
un premier pas vers l’humilité pour sauvegarder l’humanité ! et pour ce qui est de la mandature, le citoyen a donné une délégation à un homme pour faire, mais faire faire ne veut pas dire laisser faire !!!
Laya Patrice-Louis
25/05/2012Par ailleurs, je vous invite à lire "la Troisième Révolution industrielle : Comment le pouvoir latéral va transformer l’énergie, l’économie et le monde" de Jeremy Rifkin.
Jeremy Rifkin est un économiste, essayiste, conseiller politique et activiste américain, spécialiste de prospective économique et scientifique. Son travail est principalement centré sur l’impact des changements scientifiques et technologiques sur l’économie, le travail, la société et l’environnement.
Ce livre développe la thèse d’une troisième révolution industrielle –que l’auteur appelle de ses vœux-, un nouveau paradigme économique qui va ouvrir l’ère post-carbone, basée notamment sur l’observation que les grandes révolutions économiques ont lieu lorsque de nouvelles technologies de communication apparaissent en même temps que des nouveaux systèmes énergétiques (hier imprimerie/charbon ou ordinateur/ ; aujourd’hui Internet & les énergies renouvelables).
Les cinq piliers de cette Troisième Révolution Industrielle seraient :
1) Passer aux énergies renouvelables.
2) Transformer les bâtiments sur chaque continent en mini-centres énergétiques, créant de nombreux emplois.
3) Permettre à chaque bâtiment de conserver cette énergie.
4) Utiliser la technologie internet pour créer un réseau similaire d’énergie. Chaque bâtiment ayant de l’énergie en trop pouvant la vendre sur ce réseau.
5) Créer des réseaux électriques continentaux dans lesquels les véhicules électriques puissent vendre leurs surplus d’énergie en se branchant à une prise, tout en étant garés.