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La cocaïne provoque le veillissement accéléré du cerveau

Les consommateurs chroniques de cocaïne perdent deux fois plus rapidement leurs cellules nerveuses au cours du vieillissement que les personnes non exposées à cette drogue, révèle une étude publiée dans la revue Molecular Psychiatry. «Nous avons une nouvelle preuve physiologique que la cocaïne peut induire une véritable maladie du cerveau», commente Laurent Karila, psychiatre responsable du Centre d'enseignement et de recherche du traitement des addictions (Certa) du CHU Paul-Brousse à Villejuif (Val-de-Marne).

Pour obtenir ce résultat, les chercheurs de l'université de Cambridge (Royaume-Uni) ont mesuré par imagerie cérébrale la quantité de cellules nerveuses présentes dans le cerveau chez de 120 personnes, dont 60 cocaïnomanes âgés de 18 à 50 ans et dépendants depuis plusieurs années. «Le lien entre la durée de la consommation de cocaïne et le déclin de la matière grise était déjà connu», précise Karen Erschen qui a dirigé ce travail.

Les régions préfrontales et temporales du cerveau apparaissent particulièrement touchées, or elles sont importantes pour la mémoire, l'attention et la prise de décision, des fonctions justement très perturbées chez les consommateurs réguliers de cocaïne. L'origine de ce nouvel effet délétère de la drogue n'est pas encore connue, mais pourrait découler, selon Karen Erschen, d'une augmentation du stress oxydant au niveau des cellules nerveuses qui a déjà été observé chez l'animal. Cette toxicité vient s'ajouter aux nombreuses complications, notamment cardio-vasculaires, pulmonaires et psychiatriques, liées à la consommation de cocaïne. Celle-ci, en induisant une décharge massive de dopamine, de noradrénaline et de sérotonine dans le système nerveux, provoque euphorie et sentiment de puissance mais aussi de l'hypertension, une vasoconstriction de tous les vaisseaux qui bloque l'oxygénation des tissus et des douleurs thoraciques, pour ne citer que les symptômes les plus courants.

Aux États-Unis, la cocaïne est ainsi devenue la première cause de fréquentation des services des urgences parmi tous les produits illicites, devançant même l'alcool car elle multiplie par plus de 20 les risques d'accident cardio-vasculaire et par 14 ceux d'attaque cérébrale. «En France, nous avons une propagation très inquiétante de la consommation de cocaïne dans tous les milieux et à tous les âges, s'alarme Laurent Karila. En 2011, 3 % des jeunes de 17 ans avaient déjà expérimenté cette drogue.» Tous les consommateurs réguliers de cocaïne ne deviennent cependant pas dépendants, la proportion étant de 5 % lors de la première année d'usage et de 20 % sur le long terme selon le spécialiste.

Une susceptibilité génétique est aussi en cause, comme l'ont montré Karen Erschen et son équipe dans une étude publiée récemment dans Science. Les chercheurs ont en effet retrouvé des anomalies du cerveau spécifiques de la dépendance à la cocaïne chez les frères et sœurs de cocaïnomanes chroniques. Elles se traduisent notamment par une plus grande impulsivité mesurée chez ces personnes comparé à la population générale. De quoi envisager des mesures de prévention chez les personnes détectées comme à risque de dépendance aux drogues. Lors de l'apparition des premiers troubles cognitifs, l'abstinence et des exercices mentaux peuvent permettre de récupérer une grande partie de ses facultés psychologiques. La difficulté sera pour le toxicomane de changer de vie alors que la cocaïne affaiblit précisément ses capacités d'autocontrôle et de prise de décision.

Le Figaro

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