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La chouette se fait des illusions
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Si l'on demandait à quelqu'un de définir le "triangle de Kanisza", il y a fort à parier que la réponse serait : un triangle blanc cachant trois disques. Et pourtant, ce triangle n'existe pas. C'est une image subjective reconstruite par le cerveau à partir des trois coins qui, seuls, sont bien réels. Jusqu'à présent, on considérait le processus cognitif mis en jeu dans la perception des illusions comme l'apanage de l'être humain ou de ses cousins les singes. Mais voici que deux chercheurs de l'Institut für Biologie II (Aachen, Allemagne) ont réussi à montrer que les chouettes sont, elles aussi, capables de "s'illusionner". Une petite révolution dans le monde des sciences cognitives...Pour arriver à cette conclusion, Andreas Nieder et Hermann Wagner ont dû réaliser un véritable tour de force expérimental. "Ce qu'ils ont accompli est une performance extraordinaire, tant au niveau du résultat que de la manipulation", s'enthousiasme François Vital-Durand, directeur de recherche à l'Inserm U371 "Cerveau et vision" (Lyon, France). Jugez plutôt. Tout d'abord, il leur a fallu apprendre aux animaux à distinguer un triangle d'un carré. Technique : on montre à la chouette une image représentant l'une de ces figures géométriques sur un fond noir rayé de blanc. L'oiseau désigne alors avec son bec une clé qui, si elle se révèle être la bonne, lui permet de recevoir une récompense. Après cette phase de conditionnement, les chercheurs ont intégré, entre les images "classiques", des images cette fois subjectives. Il s'agissait des mêmes fonds rayés noir et blanc dont une partie (en forme de carré ou de triangle) avait été décalée de manière à générer des discontinuités. Chez l'homme, les neurones assemblent les extrémités de ces discontinuités pour en faire une ligne qui constitue la bordure de l'illusion ; c'est le mécanisme de colinéarité, présumé fort complexe. Mais les chouettes entraînées par les scientifiques allemands ont tout de suite été capables de reconnaître les formes subjectives. "On réalise maintenant que la colinéarité ne serait qu'un calcul neuronal relativement élémentaire, constate François Vital-Durand. Même si le cerveau d'un oiseau est tout de même plus développé que celui d'une grenouille..."
Après quoi, Andreas Nieder et Hermann Wagner se sont intéressés aux aspects neurophysiologiques du phénomène. L'expérience se faisant sur des chouettes éveillées, il a fallu leur apprendre à ne pas bouger la tête le plus longtemps possible - un exploit en soi ! Et durant ce court laps de temps une électrode implantée dans le crâne était chargée de débusquer les neurones manifestant une réponse optimale aux figures subjectives visionnées par l'oiseau. Les scientifiques allemands ont ainsi pu constater que, pour un neurone traitant par exemple l'information correspondant à une barre verticale, la décharge électrique fournie était la même avec une image subjective qu'avec une image objective. Tandis qu'un motif uniquement horizontal ne provoquait aucune décharge. Voilà qui confirmait de manière irréfutable les résultats de l'étude comportementale menée précédemment. Mais n'allez pas croire que tout est clair pour autant... En effet, le Wulst - l'équivalent chez les oiseaux du cortex des mammifères - reste un mystère pour la science. A côté de l'organisation stricte en couches et en colonnes du cortex des primates, le Wulst fait même office de véritable botte de foin. Alors, comment expliquer que l'on retrouve le même mécanisme chez deux types de cerveaux aussi différents
Info-Science : http://www.infoscience.fr/articles/articles_aff.phtml?Ref=260
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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