Un choc pétrolier est-il nécessaire pour réduire les émissions de CO2 ?
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Et si l'OPEP était l'association écologiste la plus efficace du monde ? En maîtrisant les prix du brut, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole se révèle être l'agent le plus convaincant pour encourager - ou démobiliser - les politiques de maîtrise de l'énergie. C'est la conclusion paradoxale que l'on peut tirer de la publication, le 2 mars, par l'Agence internationale de l'énergie (AIE) d'une étude analysant trente ans de consommation énergétique. En effet, alors que les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 ont entraîné des progrès très nets dans l'efficacité énergétique des pays développés, le retour du prix du pétrole à des niveaux modérés à partir de 1986 a incité les pays riches à relâcher leurs efforts. Ainsi, l'étude de l'AIE (30 Years of Energy Use In IEA Countries) met en exergue une rupture des tendances autour de 1990 : entre 1973 et 1990, les pays couverts par l'Agence connaissent une croissance limitée de la consommation d'énergie (+ 0,4 % par an), tandis qu'à partir de 1990 cette augmentation passe à 1,4 %. Ce phénomène n'est pas dû à la croissance économique elle-même. On pourrait en effet penser que si l'économie tourne fort, la consommation d'énergie doit suivre. Mais, en fait, tout dépend des efforts d'économies d'énergie. Ceux-ci se traduisent par un découplage entre consommation d'énergie et produit intérieur brut (PIB) : on produit une même unité de PIB avec moins d'énergie. La vigueur de ce découplage est mesurée par la baisse de l'intensité énergétique (quantité d'énergie nécessaire pour produire une unité de PIB). Or, cette intensité, qui avait baissé au rythme de 2,5 % par an entre 1973 et 1982 dans les pays de l'AIE, ne diminue plus que de 1,5 % par an entre 1983 et 1990, avant que l'effort ne se relâche totalement (- 0,7 % depuis). La corrélation est assez étroite avec le prix du baril de pétrole, qui donne le "la" à l'ensemble des prix de l'énergie : en prix réel, c'est-à-dire corrigé de l'inflation, le baril de pétrole a atteint des sommets dans les années 1970, déclinant ensuite lentement, puis franchement en 1986. Il s'est depuis lors stabilisé à un niveau bas, proche de celui qui existait avant le choc pétrolier de 1973. Aujourd'hui encore, malgré la hausse enclenchée en 2000, il reste au même prix qu'en 1973. Ainsi, la contrainte économique n'a plus stimulé la maîtrise énergétique. Cela dit, tous les acteurs sociaux n'ont pas évolué de la même manière. L'industrie, qui avait fourni les plus grands efforts dans les années 1970, s'est laissée aller à partir de 1986 : son intensité énergétique n'a dès lors plus décliné que de 0,6 % par an. C'est ailleurs qu'il faut chercher la responsabilité. Premier accusé : le transport automobile et aérien. Ils ont tous les deux explosé - le nombre de passagers par avion a triplé depuis 1973, celui d'automobiles a doublé -, tirant la demande de pétrole. Certes, les moteurs se sont améliorés, mais ce progrès technique a été plus que compensé, d'une part par l'augmentation du trafic, d'autre part, pour les automobiles, par le passage à des véhicules plus lourds et plus consommateurs d'énergie en raison de leur équipement en climatisation et autres gadgets. Le transport de marchandises par camion a lui aussi crû sans contrôle, doublant de ce fait la consommation d'énergie de ce secteur. Dans un autre domaine, les particuliers sont aussi responsables de l'augmentation de la consommation énergétique : la quantité d'équipements électriques - électroménager, audio-vidéo, ordinateurs, etc. - s'est multipliée, tirant largement la consommation d'électricité. Soulignant que des possibilités très importantes d'économies d'énergie existent encore, l'Agence appelle les gouvernements à mener des politiques pour les favoriser. Mais l'absence de telles politiques dans la décennie passée, alors que la conjoncture économique était plus facile, rend douteux que l'appel de l'AIE soit entendu. D'autant plus qu'il va à l'encontre des politiques menées par ailleurs, qui encouragent le développement des échanges et la baisse du prix de l'électricité, jugée comme un stimulant économique. Dans ce contexte, sans doute vaut-il mieux attendre d'une hausse continue du prix du pétrole une baisse de la consommation d'énergie et des émissions de CO2.
Le Monde :
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3238,36-355790,0.html
IEA :
http://www.iea.org/Textbase/press/pressdetail.asp?PRESS_REL_ID=123
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- Publié dans : Climat
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