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Des chimistes réussissent pour la première fois à modifier des liaisons chimiques atome par atome…

Des chercheurs viennent de modifier les liaisons dans une seule molécule. Pour réaliser cet exploit, ils ont utilisé un microscope à effet tunnel leur permettant de manipuler molécule par molécule pour remplacer un atome par un autre. Depuis longtemps, les chimistes du monde entier caressent un rêve un peu fou concernant les molécules et les liaisons chimiques. Pouvoir manipuler les liaisons d’une molécule de manière sélective ! C’est chose faite avec cette équipe internationale de chercheurs depuis qu’ils ont utilisé un microscope à effet tunnel.

Développé en 1981, le microscope à effet tunnel est constitué d’une pointe métallique très fine alimentée par du courant électrique. On approche cette pointe à très courte distance de la surface à analyser qui est constituée de molécules elles-mêmes composées d’atomes. Lorsqu’on applique une tension électrique entre la fine pointe et la surface à étudier, des électrons de cette surface sont arrachés par l’effet tunnel. Un courant électrique apparaît alors entre la pointe et la surface. Cet effet ne se produit qu’à très courte distance et uniquement quand la pointe passe au-dessus d’un atome. En traçant l’intensité du courant électrique en fonction de la position de la pointe, il est possible de déduire la position des atomes de l’échantillon à analyser avec une précision supérieure au dixième de nanomètre.

Un microscope à effet tunnel peut aussi servir à faire de la spectroscopie. Comment ? En mesurant le courant de la pointe en fonction de la tension électrique. La courbe obtenue sur l’écran de l’appareil dépend des propriétés des électrons présents à l’endroit où se trouve la pointe. Cette technique apporte des renseignements sur les propriétés électroniques locales du matériau à l’échelle du nanomètre.

Le microscope à effet tunnel fonctionne sous des températures cryogéniques dans l’ultravide. Pourquoi ? Afin de maintenir la stabilité des molécules. Il peut aussi servir à déplacer des atomes ! Et donc à rompre des liaisons chimiques pour en créer d’autres. En approchant sous certaines conditions la pointe au plus près d’un atome, il est possible de l’attirer et de le soulever, puis de le déplacer.

Cette modification sélective des liaisons chimiques a permis de créer des molécules constituées de dix-huit atomes de carbone et de huit atomes d’hydrogène. Les chercheurs ont réussi à manipuler les atomes et les liaisons pour faire prendre différentes formes à ces structures moléculaires avant de les ramener à leur forme initiale. Pour y arriver, ils ont utilisé des impulsions électriques à basse tension leur permettant de manipuler la molécule comme ils le souhaitent. Grâce à cette technique, ils peuvent modifier la structure tridimensionnelle des centaines de fois s’ils le souhaitent.

Ces molécules sont toutefois instables comme l’explique Diego Pena de l’Université de Santiago de Compostela en Espagne. « Si vous deviez demander aux chimistes si certaines de ces molécules peuvent être synthétisées, ils vous répondront que c’est impossible, car les molécules réagissent avec leur environnement et ne durent que quelques millisecondes ».

Les chimistes ont travaillé avec une molécule comportant un noyau tétracyclique. Auprès de celui-ci, ils ont retiré quatre atomes de chlore grâce au microscope à effet tunnel. Ils ont ensuite déplacé la pointe du microscope jusqu’à une liaison carbone-chlore au sein de la molécule. Et ils ont rompu cette liaison à l’aide d’une décharge électrique. Ils ont répété cette opération avec les autres liaisons carbone-chlore et carbone-carbone. Ceci afin de créer un radical diracial avec six électrons libres. Permettant ainsi la réalisation de nouvelles liaisons.

Les chimistes ont pu créer de nouvelles liaisons chimiques aboutissant à la formation d’un alcyne ! C’est-à-dire un hydrocarbure possédant au moins une triple liaison carbone-carbone. Une telle liaison chimique est une liaison insaturée très riche en électrons. Elle a l’avantage de se "prêter" à de nombreux types de réactions chimiques. Les applications d’une telle mise au point sont nombreuses. « Les réactions sélectives à une seule molécule peuvent permettre la création de nouvelles machines moléculaires artificielles plus complexes et plus polyvalentes. Elles pourraient effectuer des tâches telles que le transport d’autres molécules ou nanoparticules, la fabrication et la manipulation de nanostructures et la facilitation des transformations chimiques ». – Leo Gross, chimiste du centre de recherche IBM à Zurich.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

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