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Cancer : Un mécanisme-clé de formation des métastases mieux compris…
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Comme le rappelle Raphaël Rodriguez, directeur de recherche au CNRS, le tissu tumoral n’est pas homogène. À la manière d’un organisme pluricellulaire, une tumeur contient plusieurs types ou sous types cellulaires que l’on peut classer en deux grandes familles : les cellules épithéliales et les cellules mésenchymateuses. Les premières dérivent du tissu dont est issue la tumeur (muscle, peau, os, …).
Quant aux cellules mésenchymateuses, elles proviennent de la conversion des cellules épithéliales. En effet, sous la contrainte de leur environnement, certaines cellules épithéliales prolifératives, peuvent se transformer en cellules mésenchymateuses, cellules souches cancéreuses, peu prolifératives, mais ayant acquis la capacité d’envahir de nouveaux tissus. Ainsi se développent les métastases !
Les récents travaux de l’équipe de Raphaël Rodriguez (directeur de recherche au CNRS à l’institut Curie), éclairent les étapes et les mécanismes moléculaires qui induisent cette transition cellulaire. Ces chimistes et biologistes ont découvert que la protéine CD44, qui traverse la membrane cellulaire, et est connue comme récepteur de l’acide hyaluronique (un des composants majeurs de la matrice extracellulaire), sert de porte d’entrée au fer dans la cellule cancéreuse. Ils ont également démontré que cet apport de fer supplémentaire modifie le métabolisme et l’expression des gènes de la cellule cancéreuse, ce qui favorise sa transformation en cellule capable de dissémination. Ces découvertes lèvent un peu plus le voile sur un des aspects les moins connus du cancer : son environnement.
Ces recherches se sont appuyées sur les travaux de Robert Weinberg, biologiste du cancer au MIT2009, qui a découvert en 2009 un produit naturel, la salinomycine, capable de cibler une population particulière de cellules tumorales : les cellules souches cancéreuses, qui ont un caractère mésenchymateux.
L’équipe de Raphaël Rodriguez a fait deux découvertes fondamentales : la première, c’est que la cible de la salinomycine est le fer qui se trouve dans le compartiment lysosomal (organite cellulaire, NDLR). La seconde concerne les cellules souches cancéreuses. Nous nous sommes rendu compte que ces dernières avaient une homéostasie du fer qui était surrégulée : leur taux de fer était anormalement élevé.
Ces travaux ont par ailleurs montré que ces cellules souches cancéreuses étaient vulnérables à la ferroptose, qui est un mécanisme de mort cellulaire mis en évidence en 2012 par des chercheurs américains. Ces découvertes ont amené deux questions fondamentales : comment se produit cette surrégulation du fer ? Et à quoi sert le fer ?
En temps normal, la cellule fait entrer du fer via la transferrine et son récepteur transmembranaire. C’est la voie la plus connue d’internalisation du fer, cela fait 70 ans qu’elle est décrite. Cette voie s’autorégule négativement, c’est-à-dire que plus il y a de fer dans la cellule, moins il y aura de production de son récepteur. C’est ce qui permet aux cellules d’avoir suffisamment de fer sans en avoir trop. Une trop grande quantité de fer dans la cellule induit en effet une surproduction de dérivés réactifs de l’oxygène (radicaux libres), essentiels au processus de ferroptose. C’est donc, en quelque sorte, le moyen qu’ont trouvé les cellules pour contrôler leur taux de fer.
Pourtant, cette voie ne pouvait pas être la seule impliquée dans l’addiction au fer des cellules souches cancéreuses, car un taux élevé de fer – ce qu’on constate dans ces cellules – devait mécaniquement induire une répression du récepteur à la transferrine. Il se trouve que la plupart des modèles de cellules souches cancéreuses surexpriment la protéine CD44. Que ce soit dans le cancer de l’ovaire, du sein, de la prostate ou des poumons, CD44 est un marqueur ubiquitaire de mauvais pronostic, un marqueur positif de métastases et de résistance.
CD44 est un récepteur de l’acide hyaluronique. Or, ces recherches ont permis de montrer que l’acide hyaluronique favorise potentiellement la transition des cellules cancéreuses d’un statut épithélial (qui appartiennent à un tissu spécifique) à un statut mésenchymateux.
Ce sont les groupements carboxylates présents dans l’acide hyaluronique qui ont la particularité de très bien interagir avec le fer, ce qui confirme que CD44 est bien une autre porte d’entrée du fer dans la cellule.
Au final, ces recherches ont réussi à montrer et à confirmer que plus les cellules étaient mésenchymateuses, plus CD44 était exprimée, plus les cellules étaient riches en fer et paradoxalement moins il y avait de récepteurs à la transferrine. Cela indique que la voie de signalisation dominante dans ces populations cellulaires se fait via CD44.
Grâce à cette voie, la cellule peut surréguler l’entrée du fer en son sein, sans qu’elle soit inhibée. Cela lui permet d’avoir un taux de fer supérieur à ce qu’il devrait être, ce qui par ailleurs la rend vulnérable à la ferroptose. Ces travaux ont donc montré que le fer est bien nécessaire au maintien du caractère mésenchymateux de certaines cellules cancéreuses.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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