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Le “neuromarketing” sera bientôt dans nos villes
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Paris, Marie passe devant une affiche de cinéma. Automatiquement, la bande-annonce se télécharge sur son téléphone portable vidéo. L'adresse du cinéma le plus proche apparaît ainsi que l'horaire de la prochaine séance en version originale puisqu'elle est professeur d'anglais. Tentée, elle achète sa place en ligne pour une séance dans une heure. Une publicité pour une chaîne de restauration rapide toute proche s'affiche alors sur son écran. Si elle s'y rend immédiatement, une promotion sur sa formule préférée lui sera offerte.
En chemin, son oeil s'arrête sur un écran publicitaire électronique qui la "reconnaît". Une animation s'affiche : veut-elle participer à un jeu concours pour une crème revitalisante adaptée aux femmes de 40 ans, l'âge de Marie ? Elle est séduite, mais ça, la marque le sait déjà grâce à son étude de "neuromarketing". Résultat : elle reçoit dans la minute un bon d'achat sur son téléphone portable.
Dans dix ans, les marques de grande consommation connaîtront-elles intimement Marie et ses congénères au point de leur envoyer à tout moment, où qu'elles se trouvent, des publicités personnalisées et autres signaux commerciaux pour les inciter à acheter ?
La recherche est déjà active. Des experts spécialisés en neuromarketing tentent d'appréhender l'émotion du client, de décrypter le processus de décision d'achat. "C'est la version XXIe siècle du subliminal. Comment imprégner un cerveau d'une publicité sans qu'il s'en rende compte ?", explique Olivier Oullier, chercheur au CNRS à Marseille mais aussi à la Florida Atlantic University aux Etats-Unis. "L'obtention de l'image du cerveau en 3D est un grand pas, mais la neuro-imagerie est encore limitée. Dans dix ans, les résolutions spatiales et temporelles auront progressé, pronostique M. Oullier. On ne lira pas dans la tête des gens, mais on pourra tenter de prédire leurs réactions." Ces recherches touchent des territoires sensibles.
Actuellement, seule la société automobile DaimlerChrysler finance ouvertement des travaux dans ce domaine. "Beaucoup d'entreprises s'y intéressent sans le dire. Il y a une omerta, une peur de l'opinion publique", remarque M. Oullier. Justement, des voix se font déjà entendre pour pointer les risques d'intrusion. Vigie de tous les dérapages publicitaires aux Etats-Unis, l'association Commercial Alert a fait du neuromarketing une priorité.
Avant même le déploiement de cette nouvelle science, marques et publicitaires cherchent à créer une communication personnalisée, plus ciblée, pour amadouer les plus rétifs. Les révolutions technologiques à venir servent leur projet. Les consommateurs seront de plus en plus équipés - téléphone mobile de troisième ou quatrième génération, journaux électroniques. Les réseaux de communication urbains vont monter en puissance, grâce aux technologies infrarouge, Bluetooth, Wi-Fi, RFID, etc. Et la ville va se vêtir d'écrans d'affichage électronique, de "puces" disséminées dans les vitrines. Avec ce maillage électronique, la publicité ne lâchera plus le consommateur.
Des tests grandeur nature se multiplient partout dans le monde. Au Japon, les consommateurs sont invités dans la rue à "photographier" avec leur téléphone mobile des codes-barres imprimés sur des affiches. Instantanément, ils sont mis en relation avec un mini-site Internet ventant les mérites du produit.
A Tokyo, grâce à une image projetée sur un trottoir, les piétons se retrouvent comme entourés de papillons et du logo de la marque de beauté Kanebo qui bougent au gré de leurs mouvements de bras. Les réactions des passants sont analysées en temps réel par un logiciel de traitement d'image. Aux Etats-Unis, Google, le poids lourd de l'Internet, a jeté son dévolu sur San Francisco et propose d'offrir gratuitement à tous les citoyens une connexion sans fil (Wi-Fi) à Internet. Mais, en contrepartie, chaque internaute devra accepter d'être "suivi électroniquement" en temps réel : Google enverra des publicités ciblées en fonction de là où il se trouve.
Des partenariats se nouent avec des chercheurs. A Caen, depuis le printemps, plus de 300 "cobayes", équipés de téléphones mobiles dotés de la technologie RFID, sont suivis à la trace. Leurs interactions avec les publicités et les jeux concours, leurs achats en ligne sont analysés par France Télécom et la société d'affichage Clear Channel. Son concurrent Jean-Claude Decaux vient, lui, de s'allier les compétences des chercheurs de l'Inria en "informatique diffuse". L'objectif ? Etablir un dialogue automatisé entre les Abribus, les panneaux d'affichage, etc., et les téléphones mobiles des passants. La société LM3Labs, fondée par des scientifiques du CNRS, prépare un logiciel de traitement de l'image pour identifier chaque personne s'arrêtant devant un panneau interactif.
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